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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Cabinet de Philippe Bas
Ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées,
aux personnes handicapées et à la famille

Paris, le 16 mars 2006


Communique

La réforme de la protection de l’enfance
Présentée par Philippe Bas,
ministre délégué à la Sécurité sociale,
aux Personnes âgées, aux Personnes handicapées et à la Famille

 

Pourquoi cette réforme ?

Il y a tout d’abord les drames de la maltraitance. Certaines tragédies ont été fortement médiatisées (Angers, Drancy…). Elles sont la partie émergée de l’iceberg. Car il y a surtout tous ces enfants qui souffrent en secret et dont le nombre ne cesse de croître – plus de 270.000 sont pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance.

Notre système de protection de l’enfance repose sur des fondements solides, justes car il recherche dans toute la mesure du possible la consolidation du cadre familial pour assurer le développement de l’enfant. Mais il y a des failles, des dysfonctionnements ; il faut resserrer les mailles du filet.

Est-il normal que dans un pays où l’on dépense plus de 5 milliards d’euros pour la protection de l’enfance, seulement 4% de ces sommes soient consacrées à la prévention ?
Est-il normal que des enfants souffrent en silence pendant des années sans que personne n’intervienne ?
Est-il normal qu’il n’y ait pas de moyen terme entre la séparation qui découle de l’accueil de l’enfant en établissement, avec les traumatismes que cela peut provoquer, et le maintien dans une famille, alors qu’elle rencontre des problèmes aigus ?

Nous devons donc réformer notre dispositif de protection de l’enfance, selon 3 grands axes :
- renforcer la prévention,
- organiser le signalement
- diversifier les modes de prise en charge des enfants.

De plus, il faut donner au Conseil général le rôle de chef de file de la protection de l’enfance dans le département.

Comment s’est construite cette réforme ?

Dans la concertation, avec le plus grand nombre de professionnels, d’élus, de représentants d’associations, tout au long des neuf mois écoulés ; au travers de nombreux déplacements sur le terrain ; dans des rencontres, des débats ; grâce à des travaux parlementaires.
- Rapport de la mission d’information BLOCHE / PECRESSE sur la Famille et les droits des enfants de l’Assemblée nationale ; rapports de Louis de BROISSIA, Sénateur, sur « l’amélioration de la prise en charge des mineurs protégés » ; de Philippe NOGRIX, Sénateur, sur « l’amélioration des procédures de signalement de l’enfance en danger » ; de Marie-Thérèse HERMANGE, Sénateur, sur « périnatalité et parentalité » ;
- Rapports de l’Observatoire National de l’Enfance en Danger ; de l’Observatoire Décentralisé de l’Action Sociale ; de la Défenseure des enfants ; de l’Inspection Générale des Affaires Sociales sur les bonnes pratiques du signalement ;
- Organisation de 12 Journées thématiques, réunissant à chaque fois une quarantaine de professionnels ;
- Mise en place d’un Comité national de la protection de l’enfance, composé de personnalités reconnues dans leurs disciplines respectives.
- En concertation avec l’Assemblée des Départements de France, proposition aux Présidents de Conseil général d’organiser dans leur département un débat avec l’ensemble des acteurs locaux, en demandant aux préfets de s’engager à leurs côtés avec les services sociaux et sanitaires et les inspections d’Académie, en liaison également avec le Garde des Sceaux pour la présence des procureurs de la République et des présidents de Tribunal de grande instance. Les deux tiers des départements ont répondu favorablement.

Le contenu de la réforme

Trois grands volets.

Les débats, rencontres, contributions ont montré une forte convergence des points de vue des différents acteurs, soulignant la nécessité d’agir à trois niveaux :

  • Renforcer significativement la prévention ;
  • Organiser le signalement, pour détecter plus tôt et signaler plus efficacement les situations de danger ;
  • Diversifier les modes de prise en charge, pour les adapter aux besoins de chaque enfant.

Certaines mesures relèvent de la loi : elles seront contenues dans le texte que Philippe BAS présentera au Conseil des ministres à la mi-avril.
D’autres dispositions touchent à l’organisation, aux pratiques ou aux moyens. Elles feront partie du dispositif d’accompagnement qui sera mis en place dès cette année, avec les différents partenaires : départements, services de l’Etat, professionnels de la protection de l’enfance, associations…

1 / Renforcer la prévention
Le projet de loi affirme clairement que la prévention fait partie des missions de la protection de l’enfance, alors que la loi est aujourd’hui muette sur ce point.
L’objectif est de multiplier les points de contact entre l’enfant, sa famille et les professionnels pour anticiper les difficultés possibles et pouvoir accompagner, aider, soutenir les familles afin d’éviter que la situation de l’enfant ne se détériore.
Les mesures :

  • Systématiser l’entretien au 4ème mois de grossesse et le suivi qui en découle, pour qu’au-delà du souci de la santé, on identifie les problèmes pouvant créer des difficultés futures dans le lien mère-enfant, et qu’on aide à les surmonter.
  • Lors du séjour à la maternité, mettre systématiquement en contact les parents avec les services de la protection maternelle et infantile (PMI). Pour cela, la PMI devra se coordonner avec les maternités : il s’agit de faire savoir à la mère qu’elle peut toujours appeler si elle a des questions ou un problème, de participer à des actions précoces sur la parentalité et d’identifier les situations difficiles (femme isolée, grossesse non suivie, problèmes psychologiques, etc.).
  • Proposer systématiquement à la jeune mère la visite de la PMI à son domicile, à son retour de la maternité. Cette visite sera automatique lorsque les services de la maternité auront identifié des difficultés particulières pour la mère.
  • A l’école maternelle, assurer un bilan à tous les enfants de 3-4 ans .
  • A l’entrée en primaire, assurer un bilan à tous les enfants dans leur sixième année.
  • Aider les adolescents en souffrance par une écoute, un soutien, un accompagnement éducatif pour prévenir les comportements à risque, addictions, fugue, errance, suicide : il s’agit de développer les lieux d’écoute, les accueils de jour, les lieux de médiation entre parents et enfants, les maisons d’adolescents…

2 / Organiser le signalement
Aujourd’hui, le signalement n’est pas suffisamment organisé. Le professionnel qui constate des faits inquiétants est seul face à sa responsabilité : doit-il signaler des faits dont il n’est pas sûr ? Doit-il prendre le risque de se taire ? A qui doit-il s’adresser ? Un mode d’emploi est nécessaire.
Les mesures :

  • Créer dans chaque département une cellule de signalement : un lieu clairement identifié avec un numéro d’appel qui devra être connu de tous, composé de professionnels de la protection de l’enfance qui évaluent la situation et pourront déclencher un recours à l’aide sociale ou à la Justice. L’objectif est de réunir toutes les informations permettant d’apprécier la situation afin de prendre une décision collégialement.
  • Cette collégialité est rendue possible par le partage d’informations entre professionnels du travail social et de la protection de l’enfance habilités au secret professionnel. En dehors de cet aménagement, la règle du secret professionnel est réaffirmée, dans l’intérêt même des enfants et des familles.
  • Le partage des missions entre l’aide sociale à l’enfance (ASE) -qui intervient sur la base d’un accord avec les parents- et la Justice -qui prend des décisions d’autorité- est clairement défini. L’aide sociale à l’enfance intervient à titre principal. La Justice est saisie en cas de danger manifeste, ou lorsque les parents ne peuvent ou ne veulent pas accepter l’accompagnement proposé par l’aide sociale à l’enfance.
  • Former les professionnels au contact des enfants, pour leur permettre de mieux détecter les signes de danger et de connaître comment s’organise le signalement.
    Le Conseil général pourra ainsi jouer pleinement son rôle de chef de file de la protection de l’enfance.

3 / Diversifier les modes de prise en charge
Il faut ouvrir tout l’éventail des possibilités entre le maintien dans la famille et le placement en établissement ou en famille d’accueil ; il faut que chaque enfant puisse bénéficier de la solution la plus adaptée à sa situation. Il s’agira de nouveaux dispositifs de l’aide sociale à l’enfance, mis en œuvre avec l’accord des parents.
Les mesures :

  • Renforcer l’assistance éducative à domicile afin d’éviter des placements traumatisants pour l’enfant et sa famille, en impliquant les parents.
  • Permettre l’accueil de jour de l’enfant pour lui assurer un soutien éducatif, en dehors du domicile familial, en associant ses parents ;
  • Permettre l’accueil en alternance domicile / placement, qui doit contribuer à surmonter les périodes difficiles, à apaiser les conflits familiaux ;
  • Permettre l’accueil d’urgence, pour accueillir un adolescent ponctuellement, avec l’accord de ses parents, lors d’une fugue ou pendant une crise aiguë. C’est l’occasion de faire le point, de proposer une médiation entre l’adolescent et ses parents ;
  • Expérimenter l’accueil d’enfants souffrant de troubles graves du comportement par des familles d’accueil agréées et spécialisées, formées et soutenues par des professionnels de la pédopsychiatrie, ou dans des unités d’accueil articulant soutien psychologique et accompagnement éducatif.
  • Mettre en place un accompagnement social et budgétaire : une nouvelle prestation sera proposée aux familles qui ont des difficultés à gérer le budget familial. Cela peut avoir des conséquences négatives pour l’enfant. Un accompagnement, assuré au besoin à domicile, par un professionnel de l’économie sociale et familiale, doit permettre d’améliorer la situation.
  • Garantir la continuité et la cohérence de la prise en charge de l’enfant dans le temps par le Conseil général, en s’assurant que l’ASE dispose toujours de toutes les informations dont elle a besoin.
  • Elaborer des guides de bonnes pratiques, avec les professionnels, sur l’évaluation de la situation des enfants, les procédures de signalement, les modalités et le contenu des interventions auprès des enfants.

Les moyens de la réforme

- Coût estimé : 150 millions d’euros / an, à l’issue d’une montée en charge sur trois ans.
- Emplois créés, sur trois ans : 4.000 (médecins, sages-femmes, psychologues, puéricultrices, éducateurs, assistants sociaux, techniciens d'intervention sociale et familiale).

Le calendrier de la réforme

- Le projet de loi sera présenté au Conseil des ministres en avril et aussitôt déposé au Parlement.
- Le dispositif d’accompagnement montera en régime sur trois ans.

 
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