« Bête noire, « condamné à plaider » | 567... ça n'en fini plus ! » |
Quel silence, ou blackout
NDLR : Oui, novembre 2005, de l'histoire déjà ancienne, aux archives pour le Parisien. Roland Agret, ou une banal histoire de malentendus, puis de difficultés d'acheminement des communications ou correspondances...
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Indemnisation refusée
Roland Agret se tire une balle dans le pied
Le Parisien | Timothée Boutry | 11.11.2005
HIER MATIN, vers 9 heures, il a mis sa terrible menace à exécution. Chez lui, comme il l'avait annoncé, Roland Agret s'est tiré une balle dans le pied avant de se rendre au palais de justice de Grenoble et de finir sa journée aux urgences. Incarcéré à tort pendant sept ans dans les années 1970 puis innocenté, l'inlassable pourfendeur de l'erreur judiciaire n'avait pas obtenu gain de cause lundi dernier devant la cour d'appel de Grenoble, où il réclamait l'indemnisation de son préjudice. Alors cet homme, estimant que « la justice s'est toujours mal comportée » envers lui, a récidivé en se mutilant. En 1984, pour obtenir la révision de son procès, il s'était déjà coupé deux doigts ! « Ça fait très mal », nous confiait-il hier soir depuis sa chambre d'hôpital à l'issue de son opération. Emprisonné à tort Il s'en est pourtant fallu de peu pour que Roland Agret conserve ses deux pieds. A 9h5, son avocat, Me Chambon, recevait un appel de la chancellerie fixant un rendez-vous avec le chef de cabinet du garde des Sceaux la semaine prochaine. Trop tard... quelques minutes auparavant, Roland Agret avait déjà commis l'irréparable. « La demande de rendez-vous était parvenue la veille et nous y avons donc répondu favorablement très rapidement, argumente-t-on à la chancellerie. Il est profondément regrettable que quelqu'un en arrive à se mutiler, d'autant plus que sa demande venait d'être acceptée. » « L'Etat français est coupable, assène pour sa part son avocat, Me Chambon. Coupable de l'avoir mis sept ans et demi en prison à tort, coupable de lui avoir bousillé sa vie et sa santé, coupable de l'obliger à faire ce qu'il a commis pour être entendu. » Sur son lit d'hôpital, son client soulignait hier le « geste de justice » du garde des Sceaux sans préjuger de l'issue de ce rendez-vous. Avec ce nouvel avatar, l'histoire de Roland Agret, 62 ans, sera donc jusqu'au bout celle d'une incroyable méprise avec la justice. En 1970, il est accusé d'avoir commandité un double meurtre. Placé en détention préventive pendant dix-huit mois, il est condamné en 1973 à quinze ans de prison aux assises du Gard. Après plus d'un an de grève de la faim, il est gracié en 1977 et sort de prison. Mais il veut bien davantage : la révision de son procès. Il l'obtiendra en 1984... après s'être coupé deux doigts, qu'il portera directement au ministère. En 1985, la cour d'assises de Lyon l'innocente. Dans la foulée, il obtient 250 000 F pour l'indemnisation de sa préventive. Roland Agret s'était lancé dans un nouveau combat : l'indemnisation de sa détention ferme (entre 1973 et 1977) et la reconnaissance de la détérioration de son état de santé du fait de l'incarcération. Lundi, la cour d'appel de Grenoble a déclaré sa requête « recevable » mais elle l'a déboutée. Roland Agret a décidé d'en perdre un pied.
Le Parisien
Cet article a été publié dans la rubrique Les Faits Divers
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