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Les sources des journalistes bientôt mieux protégées
PARIS (AP) - "Chacun doit comprendre et respecter" que les journalistes puissent revendiquer de taire le nom de leurs sources, avait déclaré Nicolas Sarkozy en janvier. Mercredi, la ministre de la Justice Rachida Dati a présenté un projet de loi renforçant la protection de ce secret profesionnel.
Ce texte était réclamé depuis plusieurs années par la profession et il avait déjà été promis en 2006 par Pascal Clément, alors ministre de la Justice. Son but est de mettre la France en conformité avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, après plusieurs condamnations pour des poursuites à l'encontre de journalistes.
En effet, même si l'article 109 du Code de procédure pénale autorise les journalistes à ne pas révéler leurs sources, plusieurs ont fait l'objet de pressions, de perquisitions ou de mises en examen pour qu'ils divulguent l'origine de leurs informations. En décembre dernier, le journaliste Guillaume Dasquié a ainsi été mis en examen par un juge d'instruction antiterroriste parisien pour avoir publié des informations classées secret défense.
Le projet de loi Dati érige en principe la protection des sources. "Le secret des sources des journalistes est protégé afin de permettre l'information du public sur les questions d'intérêt général", a expliqué le porte-parole du gouvernement Laurent Wauquiez à l'issue du Conseil des ministres.
"Le principe rentre dans la loi, ce qui est une victoire exceptionnelle", a réagi Dominique Pradalié, secrétaire générale du Syndicat national des journalistes, premier syndicat de la profession. Le SNJ s'inquiète toutefois de n'avoir pas obtenu satisfaction sur plusieurs points.
Dans le détail, les perquisitions seront mieux encadrées et ne pourront se faire qu'en présence d'un magistrat et du journaliste concerné, qui pourra s'opposer à la saisie d'un document devant le juge des libertés et de la détention. Il sera autorisé à ne pas divulguer sa source, non seulement devant un juge d'instruction, comme c'est le cas aujourd'hui, mais aussi devant le tribunal correctionnel ou la cour d'assises.
Le SNJ regrette en premier lieu que le texte ne garantisse pas les mêmes droits "à tous les tenants du secret" et en particuliers aux secrétaires, aux interprètes et autres collaborateurs de presse non journalistes qui peuvent connaître l'origine des informations.
Le syndicat demandait aussi que les perquisitions soient limitées dans "tous les lieux de travail" et non pas seulement au bureau et au domicile des journalistes. "Dans le car de reportage, une cassette vidéo ne sera pas protégée", note ainsi Mme Pradalié.
Enfin, le texte prévoit des exceptions à la protection des sources "à titre exceptionnel et à condition que la nature et la particulière gravité du crime ou du délit et les nécessités des investigations le justifient". Ce pourrait être le cas "notamment" dans les affaires de terrorisme ou de crime organisé, a détaillé le porte-parole de la ministre de la Justice Guillaume Didier.
Mais il reste au juge une marge d'interprétation qui ne rassure pas Dominique Pradalié: "n'importe quel magistrat un peu rusé va d'abord parler de terrorisme pour obtenir des informations avant de dire qu'il s'était trompé et de s'excuser", prédit-elle.
Le Parlement devrait examiner ce texte au "tout début de la session parlementaire" qui débutera le 25 mars, a annoncé Laurent Wauquiez.