« Qu'en est-il actuellement de la place du père et de la mère ? | L'autorité parentale et les mutations de l'ordre familial » |
Un chiffre pour faire parler ?
Eclairages
Dévoiler, chiffrer (la maltraitance)
Bulletin Pénombre, juillet 1995, numéro 7
Par Frédéric Jesu, extrait
Un chiffre pour faire parler ?
Fidèle à sa mission, ce chiffre a fait parler et continue de faire parler. Mais il apparaît avec le recul qu'il a surtout été amené à faire parler de lui. Les pouvoirs publics, qui entendaient inciter à la juste et nécessaire prise en compte des réalités des maltraitances, semblent ainsi avoir mis le doigt dans l'engrenage d'une logique médiatique dont le développement et les finalités lui échappent.
On observe en effet que, depuis dix ans, la presse cite ce chiffre comme si sa pérennité était inéluctable. Elle s'en montre friande pour illustrer des articles consacrés aux maltraitances d'enfants: faits divers, émissions de télévision, manifestations publiques, campagnes d'affichage, publications d'ouvrage, etc. Dopée par cette accroche statistique, elle tend en général à traiter ces événements sur un ton de dramatisation des faits et de dénonciation offusquée des responsables - parents, professionnels, pouvoirs publics. On peut même se demander si, effrayés par de tels messages, certains jeunes parents n'en viennent pas à considérer que le risque de devenir maltraitants est si élevé et si proche d'eux que la meilleure façon de le prévenir consiste à ne pas avoir d'enfants.
Peu importe que la valeur de référence de ce chiffre ait fait l'objet de multiples critiques depuis 1985 et qu'elle ait été désavouée par les services ministériels. Peu importe qu'une estimation nationale, rigoureuse et méthodique, portant sur 96 départements, réalisée par l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS), communiquée à la presse le 14 janvier 1993, ait rendu compte de certitudes limitées à 9'000 enfants maltraités physiquement ou sexuellement pour l'année 1991. Le chiffre antérieur tend à fonctionner pour son propre compte, ou pour le compte de ceux qui le maintiennent en circulation
Le chiffre dit noir de l'enfance maltraitée - parfois intitulée, dans une emphase judéo-chrétienne, enfance «martyrisée» - fait l'objet de toutes sortes de surenchères: les 150'000 enfants maltraités invoqués en 1990 par l'association Enfance et partage sont devenus 300'000 dans un article du 21 janvier 1993 de l'hebdomadaire La Vie, et même 500'000 dans un article de mars 1993 du Panorama du Médecin.
Ceux qui diffusent de tels chiffres se gardent bien en général de les assortir d'une définition précise des situations recensées et de décrire la méthode et le contexte de leur production. Ils y trouvent surtout l'occasion d'épingler l'incapacité des pouvoirs et des services publics et plus généralement des professionnels de l'enfance à prévenir et à dépister les cas de maltraitances, et leur inefficacité à les prendre en charge et à les résoudre. La pérennité ou l'aggravation des chiffres ainsi livrés à l'opinion sont interprétées non pas comme des conséquences du renforcement de la vigilance et de la visibilité publiques à l'égard du phénomène, mais comme le signe de l'incapacité des dispositifs publics, quels qu'ils soient, à les réduire. Sont alors plus ou moins explicitement posées la question de la pertinence et de l'adéquation des moyens d'intervention dont disposent ces dispositifs et, partant, celle de leur comparaison avec les moyens, moins coûteux et supposés plus opérationnels parce que plus expéditifs, déployés au sein de la société civile par les groupes de pression et les initiatives privées.
Rapport d'activité 2006 GIP Enfance Maltraitée (119/ONED)
Auteurs de mauvais traitements. Le tableau ci-dessous récapitule les auteurs de mauvais traitements : il peut y avoir plusieurs auteurs de mauvais traitements par enfant. Pour certains enfants, aucune information sur la qualité de l’auteur n’a été renseignée. En effet, la relation téléphonique ne permet pas toujours d’avoir ce type d’information. Plus l’appelant est éloigné de la situation de l’enfant, plus la précision des informations fournies peut varier. En outre, certaines transmissions sont effectives au titre de demandes d’aide ou de la prévention et ne comportent pas nécessairement de mauvais traitements. Les pourcentages sont effectués à partir de la totalité des données lorsqu’elles sont renseignées.