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La « loi », il faut la respecter ?
J'ai vraiment le sentiment que quelque chose ne tourne pas très rond dans ce pays. Délibéré le 26 mars.
Justice, cour d'appel de nancy
Mireille MiIlet, la grand-mère qui aimait trop son petit-fils
Publié le 21/01/2009, Le Républicain Lorrain
Les années n’ont en rien érodé la combativité de Mireille Millet. C’est avec le même sentiment d’avoir agi au mieux de l’intérêt de son petit-fils Sébastien, revenu chez elle, qu’elle se défend pied à pied devant la cour d’appel de Nancy.
Le 1er avril dernier, le TGI de Briey a condamné Mireille Millet à trois mois de prison avec sursis et son mari Guy à un mois avec sursis pour non-représentation d’enfant. En 2003, à Tiercelet, elle avait refusé de renvoyer chez son père divorcé, qui en avait obtenu la garde, l’enfant âgé alors de 13 ans et demi. Elle l’avait confié à un ami policier en Belgique et l’avait soustrait pendant plus de trois mois aux autorités. Pour cela, la grand-mère a passé trois jours en prison. Hier elle était seule face aux juges de la cour d’appel, prête à répéter encore une fois que son action avait été légitime et guidée par la nécessité. Le président Gérard Martin lui objecte alors qu’elle a refusé de se plier à une décision de justice et que lorsque le procureur, à la fin de l’été 2003 lui a demandé de rendre l’enfant à son père qui en avait la garde, elle avait désobéi.
« La loi, il faut la respecter, fustige le président. Des affaires comme la vôtre, il y en a beaucoup. Mais vous, vous êtes allée trop loin. » La grand-mère, toute de noir vêtue, rétorque : « Aujourd’hui, je ne dis pas que j’avais raison. Mais j’avais des raisons de faire ce que j’ai fait. Sébastien ne voulait plus retourner chez son père où il était victime de maltraitance. Il me disait qu’il se suiciderait si je l’y obligeais. Il a d’ailleurs fait trois tentatives de suicide. Il a essayé de se noyer dans la baignoire, de se jeter du pont de chemin de fer, et de la voiture en marche. » Le président explique que ce qu’elle considérait comme de la maltraitance n’en n’était pas. « Vous avez eu cette impression qu’il était en danger. Il aurait fallu le prouver », dit encore le président, rappelant que de nombreux rapports d’expertise ont alimenté le dossier. L’un d’entre eux a même dit qu’elle avait manipulé l’enfant et l’avait placé au milieu d’un conflit de loyauté entre ses parents et ses grands-parents. Pour Jacques Nicolle, l’avocat général, cette affaire « illustre le cas des enfants tiraillés entre des parents défaillants et une grand-mère auprès de laquelle ils trouvent affection. Mais vous l’avez trop aimé », a-t-il déclaré en réclamant la confirmation de la peine. Mes Corbras et Bouthier sont intervenus en défense. Les deux avocats n’ont pas exclu que la justice ici ait pu se tromper. « Elle est une vieille dame qui n’aime pas qu’on la défie », a souligné l’un d’eux. Mireille Millet de toute façon a retrouvé son petit. Depuis septembre, il habite chez elle après avoir connu la vie en foyer, avoir vécu avec sa mère et « avoir traîné ». Il se reconstruit. Il fait un bac pro. « C’est un bon gosse, il a besoin d’être encadré », conclut-elle. Délibéré le 26 mars.
« On gagne à tous les coups » dans sa version « Carte judiciaire »
Le Canard n° 4604, 21 janvier 2009