« Petite note | « Mais qu'est-ce que j'ai dit ? » » |
Pour les experts et la Direction juridique de Dalloz, tout était si simple
Pour Dalloz, ce qui n’a pas dû beaucoup changer depuis, il suffirait d’une simple lettre et probablement même d’un fax, d'un email ou d’un coup de téléphone au greffe pour que le juge des enfants se remue un peu : « Dalloz, Droit de la famille, édition 2008-2009 […] (2)35.192, Forme de la saisine, P. 865, extrait • Aucune forme n'est requise pour saisir le juge des enfants […] (2)35.262, Durée, modification et renouvellement des mesures, p. 873, extrait • La vie d'un enfant étant ce qu'elle est, et les interrogations des services éducatifs étant constantes, il est rarissime que le juge ne voie le mineur et sa famille qu'à l'occasion d'un renouvellement. » En tous cas, à l'époque, Laurence BALLET, Directrice juridique des Editions DALLOZ pouvait y croire très fort.
Dans un ultime post du 26 courant sur Facebook, Me Michel Amas nous décrit encore ses projets et ses priorités pour sa réforme de la protection de l’enfance. Une première proposition de loi qui vise à pouvoir contraindre le juge de juger même s’il n’en a pas envie du tout a été déposée ce 19 novembre. Pas moins de 25 députés se sont associés pour présenter ce premier petit texte, la proposition N° 2419 : Guy TEISSIER, Valérie Boyer, Véronique LOUWAGIE, Émilie BONNIVARD, j’en passe... pour davantage de noms et détails, voir le contenu de leur proposition.
« Ce premier texte est le plus important, il rétabli l’équilibre et le contradictoire, Il est l’espoir de nombreux parent », nous explique Me Amas : « les parents peuvent saisir le juge… » puis « le juge statue sur cette demande dans un délai d’un mois. » Sans surprises, ça avait été annoncé en octobre, Me Amas et ces députés ont réinventé la sommation de juger ; une première, puis le magistrat est en difficulté ou en tous cas, doit réagir… et plus tard, les affaires et surtout les relations entre l'enfant et sa famille naturelle reprennent doucement enfin.
Des exposées des motifs de cette proposition de loi, quelques extraits : « […] l’impératif de protéger les enfants a été mis en œuvre. […] a toutefois un effet pervers qui réside dans le principe de considérer de manière quasi-systématique les parents comme l’élément pathogène qu’il faut éloigner par tout moyen. […] il existe de nombreux cas pour lesquels le placement de l’enfant n’est pas ou peu justifié et d’autres, pour lesquels la lenteur de la procédure sera excessive. Les parents doivent pouvoir agir. […] La durée même du placement initial coupe tout lien avec la famille naturelle, qui mettra d’autant plus de temps à le reconstruire et aura pour conséquence de générer la situation contre laquelle la loi est censée lutter : la souffrance de l’enfant. […] se traduit par l’absence totale de moyens donnés aux parents de pouvoir se défendre, mais surtout, par la suite, d’intervenir et d’être des acteurs de la procédure. Cela ne concerne que certains dossiers tels que ceux dans lesquels les parents contestent le motif du placement, pour lesquels la lenteur de la procédure est hors normes, ou encore ceux dans lesquels les enfants sont placés géographiquement trop loin de leurs parents, mais ce sont ceux-là même qui sont sensibles et sur lesquels il convient de légiférer. Si, dans la plupart des cas cela ne pose pas de difficulté et que les magistrats, lorsqu’ils le peuvent, répondent aux demandes des parents par le biais des ordonnances qu’ils rendent, dans de trop nombreux cas, le silence fait office d’explications.
J'ai le sentiment qu'il manque des mots dans leur article unique. J'aurai plutôt écrit : « les père et mère peuvent saisir le juge pour demander l’audition de toute personne ou la communication de tout document, fait ou élément qui leur parait utile. » Si ce projet est retenu, ce sera peut-être ajouté ou arrangé au cours des débats qui vont suivre.
Et en tous cas, Me Amas et le barreau de Marseille réclameraient bien de pouvoir faire la même chose que j'ai pu faire il y a plus de 10 ans déjà, entre 2008 et l'été 2009... forcer un juge pour enfant de juger, puis contre l'avis de celui-là et de plusieurs autres juges, contre l'avis du parquet et des travailleurs sociaux aussi, contre l'avis également des « tiers dignes de confiance », passer enfin à nouveau des vacances d'été en famille et sans personne pour faire chier. Car il ne suffit pas simplement d'obtenir enfin une date d'audience, même avec quelques éléments ; il faut ensuite tenir tête, s’y opposer aux inimitiés, ensuite encore lutter, influer sur le cours des choses, provoquer des changements...
Sinon, par ailleurs, si leurs modifications de textes finissent bientôt acceptées, si les parents auront un jour effectivement ces nouveaux droits de forcer un juge de juger, je me demande combien de temps ça va pouvoir fonctionner avant que les tribunaux ne cognent fort en retour en cas d'abus de ces mêmes nouveaux droits. Mais les avocats et ces élus ont peut être prévu d'introduire une exception ou de faire abroger tout simplement des articles du code de procédure civile, le 32-1 (agissement en justice de manière dilatoire ou abusive) et le 559 (le cas d'appel principal dilatoire ou abusif)... aujourd'hui, à chaque fois « amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés », ce qui pourrait rapidement faire jusqu'à très mal à ces nouveautés. Par le passé, il y a 10 ans, c'était moins élevé, l'amende encourue n'était que de 3 000 euros.
Des sommations de juger sur fond de couacs en série, avril 2008
Novembre 2019, proposition N° 2419, article unique
« Le juge statue sur cette demande dans un délai d’un mois. »
Une ordonnance du 20 avril 2009
2 commentaires
https://t.co/XkTzVj5taO #avocats @clarinette02 Me Amas rame encore... c'est pas près d'aller mieux ou d'avancer, son combat. Il bloque où j'avançais il y a plus de 10 ans, c'est de plus en plus limpide. A quoi sert au juste un #avocat? pic.twitter.com/d35LBmmWds
— Bruno Kant (@bkant) May 7, 2020
Tiens, je découvre que cette ordure a reçu
En même temps, Papon avait sa #médaille aussi, donc, voilà https://t.co/HT6UrNn159
— Bruno Kant (@bkant) April 19, 2020