« Le placement d’enfants, un remède pire que le mal ? | L'affaire Sébastien » |
Du bon usage des parents
Du bon usage des parents
Par Joseph ROUZEL, 08.2002
Sur psychasoc, extrait
Là où il s’agit d’accueillir chacun avec un minimum de respect et d’invitation à une parole pour rassurer chacun, enfant et parent dans la place qu’il occupe, on cherche le coupable et on plaint la victime, entérinant d’une certaine façon ce mode de relation. A partir de là très souvent les travailleurs sociaux se lancent dans la chasse à la culpabilité et à son traitement. Le parent désigné comme coupable doit se plier ou se démettre. S’il accepte de collaborer, de faire tout ce qu’on lui dit : se rendre chez le juge quand il faut, accepter sans rechigner les placements, se contenter du droit de visite qu’on lui, impose, subir un thérapie dont bien souvent il ne comprend pas le sens, améliorer son logement, se mettre au régime, cesser de boire ou de se droguer… - j’en passe et des meilleures - alors c’est un parent qui est sur la bonne voie. S’il se soumet, c’est un bon parent. S’il se récrie, veut donner son avis, conteste les mesures, réclame son enfant, et fait valoir ses droits, il est mauvais : soit on le rejette, soit il faut le dresser. En fait pour travailler un peu plus sereinement et efficacement dans ces espaces de médiation entre maltraitants et maltraités, il faut aux travailleurs sociaux faire la part des choses. Ils n’ont pas à juger du degré de culpabilité du maltraitant, ni du degré du mal fait au maltraité. Cela relève d’un autre espace, celui de la justice. Malheureusement on assiste trop souvent là aussi à des confusions entre l’exercice de la justice et le travail social. Certains juges en viennent à n’entendre que les injonctions à la protection des enfants, surtout quand les parents se montrent récalcitrants à leur projets, sans faire un minimum confiance à ce que parents et enfants maltraités pourraient en dire. Les travailleurs sociaux agissent alors comme experts en norme familiale. Cette collusion entre justice et travail social, notamment dans les services de l’ASE est néfaste. Elle déloge le juge de sa fonction : s’il est perçu comme aux ordres des travailleurs sociaux, comment ceux qui se présentent devant lui peuvent-ils entendre la justice, si ce n’est comme le bras armé des bonnes mœurs ? D’autre part une fois de plus elle dépossède les différents protagonistes d’une parole qui leur appartient. Le juge a à tenir sa position comme représentant de la loi. Dans cet exercice délicat il tire sa légitimité de la loi, rien que la loi, mais toute la loi à laquelle il s’adosse. Pour l’exercer il prend appui sur les paroles que peuvent lui apporter les différents témoins d’une affaire. La justice est aussi et avant tout une affaire de paroles échangées. Parmi ces parleurs dans les affaires de maltraitance doivent être entendus au même titre et sur un pied d’égalité, les maltraités, comme les maltraitants, et ceux dont la fonction sociale est de s’interposer, les médiateurs que sont les travailleurs sociaux, pas plus pas moins. Ensuite au juge de juger, comme on dit, au nom de la loi, et en son âme et conscience.