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Le procès Megel ou l'anti-Outreau
Enquête
Le procès Megel ou l'anti-Outreau
LE MONDE | 16.05.06 | Extrait
L'histoire aurait pu tenir en quelques lignes dans les colonnes du journal. "La cour d'assises de Paris a condamné, vendredi 12 mai, en appel, l'ancien directeur d'un centre éducatif pour mineurs en difficultés à douze ans de réclusion criminelle pour viols et agressions sexuelles sur un de ses anciens pensionnaires." Du déjà-vu, du trop souvent lu. On lit vite et on passe. Parce qu'on n'en peut plus des affaires dites de pédophilie, parce qu'il y a trop de victimes proclamées, trop de coupables désignés, trop d'Outreau, trop de doutes. Alors pourquoi s'arrêter sur cette affaire-là ?
Pédophilie - L'ex directeur des Tournelles clame son innocence
TF1/LCI, le 25/04/2006
Robert Mégel, l'ancien directeur du centre pour jeunes inadaptés des Tournelles accusé de pédophilie, a crié haut et fort son innocence. Il a défendu sa thérapie contestée du "beau", dès l'ouverture de son procès en appel mardi à la cour d'assises de Paris.
"On a étouffé cette affaire, aidez-moi !". Robert Mégel, l'ancien directeur du centre pour jeunes inadaptés des Tournelles accusé de pédophilie, a crié haut et fort son innocence mardi, dès l'ouverture de son procès en appel mardi à la cour d'assises de Paris.
Cet homme de 58 ans, instigateur d'une méthode controversée de réhabilitation par le luxe des jeunes défavorisés, est incarcéré depuis le 9 décembre 2004, date de sa condamnation par la cour d'Assises de Seine-et-Marne, à 11 ans de réclusion pour viols et agressions sexuelles sur deux pensionnaires.
Discret, les cheveux courts et le visage souvent tourné vers le sol, l'un d'entre eux est assis avec les parties civiles : Jérôme, 25 ans aujourd'hui, avait raconté en première instance les "masturbations" puis les viols de Robert Mégel alors qu'il avait 14-15 ans et qu'il montait les plateaux-repas du directeur dans son appartement de fonction.
"Le goût et le respect du beau"
"En prison, assure Mégel, des jeunes m'ont écrit pour me dire : 'j'étais avec Jérôme, pourquoi ne m'a-t-on pas interrogé ?' Ils sont venus d'eux-mêmes. Ils savent que c'était faux", dit-il en tendant le bras vers Jérôme. "Ne me montrez pas du doigt !", lance le jeune homme.
Dernier de sept enfants élevés dans un village provençal par une mère veuve, Mégel a retracé les étapes qui l'on vu commencer comme surveillant d'internat à 19 ans pour finir directeur général de ce prestigieux établissement, fonctionnaire détaché régnant sur le château des Tournelles.
Grâce au legs de 38 millions de FF d'une vieille dame, le château offre un cadre luxueux où les éducateurs tentaient d'instiller "le goût et le respect du beau" à des garçons de 7 à 18 ans souffrant de problèmes de comportement.
Une philosophie du beau, explique Robert Mégel, "pour en finir définitivement avec le misérabilisme... comme s'il fallait que le social soit quelque chose qui respire la tristesse, la bouffe de collectivités et les mauvaises odeurs". Et d'invoquer, comme en première instance, le patronnage de la pédopsychiatre Françoise Dolto qui, dit-il, "a soutenu le projet jusqu'à la mort".
Des "fessées institutionnelles"
Robert Mégel avait fort à faire pour effacer de l'esprit des jurés (six hommes et six femmes) l'effet produit par la lecture des charges pesant contre lui : des témoignages répétés d'anciens pensionnaires racontant des agressions sexuelles, prescrites aujourd'hui ; une psychologue invitée à une soirée aux Tournelles surprise d'y voir des hommes nus, la pratique des "fessées institutionnelles" données par Mégel, des photos érotiques.
Un temps portée aux nues grâce aux médias et à des visiteurs prestigieux, sa pédagogie y est aussi écornée. Les virées à Paris avec des pensionnaires mineurs dans des restaurants chics ou des boîtes de nuit, ou encore les voyages au Club Med au Maroc forment une méthode "sans véritable ligne éducative", dira l'inspection générale des services judiciaires.
Oubliés les fastes des Tournelles, Robert Mégel souffre aujourd'hui "d'une maladie chronique grave" qui nécessite des "traitements lourds et contraignants (aux) effets secondaires terribles", a expliqué sa défense, sans vouloir la nommer, pour demander, en vain, sa remise en liberté.
Pendant le long appel des 85 témoins qui défileront durant trois semaines, Robert Mégel lance des petits sourires aux membres de son comité de soutien, magistrats, journalistes, anciens éducateurs..., qui refusent de croire à sa culpabilité.