« Le procès Megel ou l'anti-Outreau | L'enfant proie » |
Les délais déraisonnables dans les contentieux prud’homaux
De source SAF, juillet 2006, extrait
« ... Attendu qu’Hervé DEBUSSCHERE qui justifie d’une attente de plus de quatre années entre le 21 novembre 1997, date de son recours, et le 9 janvier 2002, date de l’audience de plaidoirie à laquelle son affaire a été appelée pour la première fois justifie d’un préjudice moral caractérisé par la tension et la souffrance psychologique générée par l’attente anormalement longue et l’incertitude prolongée d’une décision importante pour lui car mettant en cause des créances de rémunérations et d’indemnités constituant ses revenus et nécessaires à la vie courante ; (…)».
La commission de droit social du Syndicat des Avocats de France décidait d’engager le débat sur cet arrêt.
Que convenait-il de faire pour lutter contre les délais déraisonnables dans les contentieux prud’homaux ? Or l’un des moyens soutenus par l’agent judicaire du trésor devant la Cour d’appel d’Amiens passait mal. Il avait fait plaider « Que tout professionnel de la justice sait que les reports sont exclusivement (sic) le fait des justiciables et ne peuvent être mis à la charge de l’Etat et plus généralement de l’Etat français ». Certes, les professionnels du droit savent que des avocats, de chaque côté de la barre, mais aussi des défenseurs syndicaux, sont des spécialistes des renvois abusifs. Ce sont souvent les mêmes, connus des juridictions. Mais pourquoi faire supporter à l’ensemble des citoyens les renvois de confort d’une minorité de spécialistes du « code de procédure peinarde » dont ni le Code du travail, ni le Code de procédure civile n’autorise les abus ? Pourquoi le laxisme d’une fraction des juges permet-il que l’on invoque des demandes communes de renvois au nom de la confraternité alors que la déontologie des avocats suppose le service du public en tant que partenaire de justice ?
Enquête de la section du SAF de Nanterre
Ces constats conduisirent le SAF à prendre des initiatives pour évaluer la responsabilité des uns et des autres dans les motifs de renvois. Avec l’accord des deux collèges, la section de Nanterre mena une enquête pour connaître les motifs de renvois sollicités par les parties. Le président de chaque audience du Conseil annonçait en début d’audience, à l’appel des causes, qu’un avocat, membre du SAF enregistrerait ces motifs. La bonne volonté tant des juges prud’hommes que des avocats du ressort était ainsi démontrée.
Les renvois étaient moins nombreux. L’encombrement des rôles, notamment de la section de l’encadrement, constituait une difficulté que les mesures positives prises par le conseil ne suffirent pas à suppléer.
Mais, les résultats de l’enquête menée par le SAF Nanterre permirent de retenir qu’il ne s’agissait pas simplement d’un problème ponctuel de moyens en personnel de greffe, mais bien d’une question d’application des règles de la procédure prud’homale. Le nombre de renvois, à l’initiative de l’une ou l’autre des parties -salarié ou employeur-, démontre qu’aucune mise en état sérieuse (article R 516-18 et R 516-20 du code du travail) n’avait été mise en oeuvre, au cours de l’audience initiale (bureau de conciliation). Ainsi devant le Conseil des Prud’hommes de Nanterre, entre le 14 février et le 16 mars 2005, soit sur 23 audiences, pendant un mois, seul un dossier sur deux était finalement plaidé devant le juge du fond. Les autres étaient renvoyés à la plus proche audience… souvent à un an. Hors Nanterre et Douai, bien d’autres blocages étaient signalés, tout aussi inadmissibles.