« Si, en plus, ce n'est que du vent... | Le laid, l'étrange et « un bébé sur le tard », un dossier des maternelles » |
La dialectique éristique
L'originalité de ce petit traité est d'analyser, dans la tradition d'Aristote, une forme de discours que la philosophie avait délaissée depuis l'antiquité et qui est pourtant la plus proche de l'usage que nous faisons quotidiennement du langage. Il s'agit de cet art du dialogue qu'est la controverse. Rien n'est plus habituel et même plus banal que cet échange entre deux ou plusieurs interlocuteurs et au cours duquel se décide la maitrise de l'un des deux. (...) L'exercice du discours se fait dans des conditions parfaitement étrangères à toutes préoccupations théoriques et philosophiques. (...) notre philosophe préconise cyniquement de s'installer dans les positions d'autrui, d'épouser parfois le mouvement de son raisonnement pour en exploiter les faiblesses. • Didier Raymond
L'art d'avoir toujours raison
La dialectique éristique
Schoppenhauer
Une traduction de Dominique Miermont
Suivi de Langage en état de guerre, Didier Raymond
Mille et une nuits n° 191, ed. 2000
La quatrième. S'installer sur les positions d'autrui, épouser le mouvement du raisonnement de la partie adverse pour en exploiter les faiblesses : l'art de la discussion, c'est l'art de la guerre. Schoppenhauer sait que les mots et les arguments sont des poignards dont la pointe peut tuer ; il sait aussi que la seule réalité qui vaille est notre propre victoire, même si le vrai maître du jeu reste finalement le langage et ses ressources infinies.
Les premières lignes...
La dialectique éristique est l'art de disputer, et ce de telle sorte que l'on ait toujours raison, donc per fas et nefas (c'est à dire par tous les moyens possibles). On peut en effet avoir objectivement raison quant au débat lui-même tout en ayant tort aux yeux des personnes présentes, et parfois même à ses propres yeux. En effet, quand mon adversaire réfute ma preuve et que cela équivaut à réfuter mon affirmation elle-même, qui peut cependant être étayée par d'autres preuves - auquel cas, bien entendu, le rapport est inversé en ce qui concerne mon adversaire : il a raison, bien qu'il ait objectivement tort. Donc, la vérité objective d'une proposition et la validité de celle-ci au plan de l'approbation des opposants et des auditeurs sont deux choses bien distinctes. (C'est à cette dernière que se rapporte la dialectique.)
D'où cela vient-il ? De la médiocrité naturelle de l'espèce humaine.
Une autre version, sur wikisource.org.
Une version allemande, sur http://www.rhetorik-netz.de...
Eristische Dialektik
oder Die Kunst, Recht zu behalten
Eristische Dialektik ist die Kunst zu disputiren, und zwar so zu disputiren, daß man Recht behält, also "per fas et nefas" [mit Recht wie mit Unrecht]. Man kann nämlich in der Sache selbst "objektive" Recht haben und doch in den Augen der Beisteher, ja bisweilen in seinem eigenen, Unrecht behalten. Wann nämlich der Gegner meinen Beweis widerlegt, und dies als Widerlegung der Behauptung selbst gilt, für die es jedoch andere Beweise geben kann; in welchem Fall natürlich für den Gegner das Verhältnis umgekehrt ist: er behält Recht bei objektivem Unrecht. Also die objektive Wahrheit eines Satzes und die Gültigkeit desselben in der Approbation der Streiter und Hörer sind zweierlei. (Auf letztere ist die Dialektik gerichtet.)
Woher kommt das? - Von der natürlichen Schlechtigkeit des menschlichen Geschlechts.
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