« Question d'autorité | Le language de Thomas Szasz aurait permi une prise de conscience » |
Mission civilisatrice, ingérence humanitaire, cultures et discriminations
Mission civilisatrice, ingérence humanitaire
Le Monde diplomatique, septembre 2005, extrait
« Le pays qui a proclamé les droits de l’homme, qui a contribué brillamment à l’avancement des sciences, qui a fait l’enseignement laïque, le pays qui, devant les nations, est le grand champion de la liberté (...) a la mission de répandre partout où il le peut les idées qui ont fait sa propre grandeur (...). Il faut nous considérer comme investis du mandat d’instruire, d’élever, d’émanciper, d’enrichir et de secourir les peuples qui ont besoin de notre collaboration (1). »
Ces mots, écrits en 1931 par le radical Albert Bayet lors du congrès de la Ligue des droits de l’homme consacré à la colonisation, devraient être examinés avec attention par les acteurs contemporains de l’aide internationale. Si la formulation est désuète, ils seraient en effet bien en peine d’en désavouer le contenu, tant ce programme de modernisation sociale et politique reste actuel. Le même congrès de la Ligue des droits de l’homme condamnait la « conception impérialiste de la colonisation », ne justifiant celle-ci qu’à la condition qu’elle se donne les buts « humanitaires » résumés par Albert Bayet.
Pour ce courant humaniste de la colonisation, celle-ci, telle une « charge d’aînesse », était source de bienfaisance et d’élévation des mœurs, une obligation de conscience qui se déduisait de l’évidente supériorité de la société colonisatrice sur les peuplades concernées. Quatre siècles auparavant, à l’époque de la conquête de l’Amérique, ce n’est pas au nom de la modernisation, mais de la christianisation, que le pouvoir conquérant s’exprimait...
(1) Cité par Charles-Robert Ageron, France coloniale ou parti colonial, PUF, Paris, 1978.
« Nous ne construirons rien de durable sans combattre ce poison pour la société que sont les discriminations. Nous ne construirons rien de durable si nous ne reconnaissons pas et n'assumons pas la diversité de la société française. Elle est inscrite dans notre Histoire. C'est une richesse et c'est une force », a assuré Jacques Chirac à l'occasion d'un discours aux français, le 14 novembre 2005.
28 janvier 2006 - Le Président de la République s’est enfin résigné à faire disparaître du droit français l’article 4 de la loi du 23 février 2005 qui enjoignait aux enseignants de faire état du rôle positif de la colonisation française.
Marianne2007.info - Sarkozy : «l'homme n'est pas une marchandise comme les autres» ; Extrait du meeting de Nicolas Sarkozy à Saint Etienne le 09 novembre 2006
« Les enfants volés ont l'impression d'être de vulgaires marchandises » • ADOPTION. Une journaliste française publie l'histoire vraie d'une fille volée à ses parents. Une affaire qui rappelle le scandale de L'Arche de Zoé. • Le Temps.ch, Samedi 3 novembre 2007
Des associations d'outre-mer manifestent contre la "falsification de l'histoire"
LE MONDE | 05.12.05 | Extrait
Déployée au bas d'un chapiteau encadré de deux drapeaux tricolores, la banderole du collectif des Antillais-Guyanais-Réunionnais était explicite : "Napoléon = négrier = criminel. Non à sa glorification. Non à la falsification de l'histoire."
Cent cinquante à deux cents personnes ont bravé les intempéries, samedi 3 décembre à Paris, devant les Invalides, pour "célébrer" à leur manière le bicentenaire de la bataille d'Austerlitz, commémoré officiellement la veille.
"Napoléon, c'est le code civil, le code pénal, les préfets... Mais c'est aussi celui qui a rétabli l'esclavage, reconnu crime contre l'humanité", a expliqué le président du collectif, Patrick Karam. Auteur d'un violent réquisitoire contre l'empereur, Le Crime de Napoléon (éd. Privé), Claude Ribbe a demandé la création d'un "centre national de mémoire et d'histoire de l'esclavage".
Dans la foule, un homme s'indignait qu'on puisse "souligner le rôle positif de l'esclavage". Ce raccourci vise à la fois l'article 4 de la loi du 23 février 2005, qui dispose que les programmes scolaires doivent reconnaître le "rôle positif" de la colonisation, et les célébrations officielles de Napoléon.
La multiplication récente des polémiques et initiatives qui concernent à la fois l'enseignement de l'histoire de France et la lutte contre les discriminations devient source de confusion.
"Nous ne sommes pas là pour parler d'une mémoire noire. Il n'y a qu'une histoire de France", a affirmé Patrick Karam, tout en évoquant une "histoire spécifique que l'on occulte".
Dans la foule, on déplorait les critiques adressées au CRAN. "Il faut arrêter de se diviser ! Ce qui nous rassemble, c'est une souffrance", s'emportait Marie-Pascale Mirre, originaire de Guadeloupe.
Arts premiers : Jacques Chirac rend hommage aux "peuples humiliés et méprisés"
LE MONDE | 20.06.06 | Extrait
M. Chirac a également précisé dans son discours : "Au cœur de notre démarche, il y a le refus de l'ethnocentrisme, de cette prétention déraisonnable de l'Occident à porter, en lui seul, le destin de l'humanité. Il y a le rejet de ce faux évolutionnisme qui prétend que certains peuples seraient comme figés à un stade antérieur de l'évolution humaine, que leurs cultures dites 'primitives' ne vaudraient que comme objets d'étude pour l'ethnologue ou, au mieux, sources d'inspiration pour l'artiste occidental."
"Ce sont là des préjugés absurdes et choquants. Ils doivent être combattus. Car il n'existe pas plus de hiérarchie entre les arts qu'il n'existe de hiérarchie entre les peuples. C'est d'abord cette conviction, celle de l'égale dignité des cultures du monde, qui fonde le Musée du quai Branly."
"Le beau temps des colonies" en disque
LE MONDE | 10.10.06
C'est un disque qui sent bon le sable chaud, la casbah d'Alger et ses moukères, Saïgon et ses mousmés... La jaquette reproduit le célèbre dessin d'un tirailleur sénégalais hilare, dégustant une boisson au chocolat : "Y'a bon !" Le titre de cette compilation, dans les bacs début octobre, est tout un programme : Le Beau Temps des colonies.
Les paroles de Amour en noir et blanc, 1906
« Les enfants volés ont l'impression d'être de vulgaires marchandises » • ADOPTION. Une journaliste française publie l'histoire vraie d'une fille volée à ses parents. Une affaire qui rappelle le scandale de L'Arche de Zoé.
Le Temps.ch, Samedi 3 novembre 2007, extrait
Céline Giraud, Française d'origine péruvienne, a été adoptée par des parents français à l'âge de 16 jours. Jusqu'à 24 ans, elle a cru que ses parents biologiques l'avaient abandonnée, faute de moyens pour l'élever. Mais en retrouvant sa famille d'origine au Pérou en 2004, elle découvre aussi un terrible secret: tout comme 25 autres enfants péruviens, adoptés en France, en Suisse et en Hollande au début des années 80, Céline Giraud a été volée à ses parents. C'est cette histoire que raconte la journaliste française Emilie Trevert dans son livre.*
L'association qui a permis ces adoptions en France était un organisme autorisé pour l'adoption (OAA) agréé par l'Etat, contrairement à L'Arche de Zoé. Pourtant, au Pérou, l'intermédiaire local de cet OAA, Rayon de Soleil, n'avait aucune reconnaissance officielle et encore moins d'autorisation pour adopter.
Le Temps: Quelles réflexions vous inspire l'affaire de L'Arche de Zoé au Tchad?
Emilie Trevert: C'est malheureusement souvent dans des pays en guerre ou instables que des dérives de ce genre se produisent. Quand l'anarchie règne, il est plus facile de faire venir des enfants ou d'adopter, en faisant jouer l'urgence de la situation. Les ONG et associations partent toutes d'un bon sentiment, comme les croyances religieuses ou le côté «fardeau de l'homme blanc». Elles ont envie de sauver des enfants de la misère ou de la guerre. Ce qui est louable. Mais parfois, elles en oublient les règles les plus élémentaires, comme s'assurer que l'enfant est orphelin. Pour le Tchad et le Soudan, c'est différent, puisque l'adoption y est interdite.
- Sur le terrain, avez-vous eu connaissance d'autres cas d'ONG aux pratiques floues?
- Non, mais en enquêtant sur Rayon de Soleil, j'ai découvert qu'elle était soupçonnée de deux autres «trafics» d'enfants, dont l'un s'est déroulé en Centrafrique, pays voisin du Tchad. En 2002, après un coup d'Etat, 13 enfants ont été adoptés en France. Rayon de Soleil les faisait passer pour des orphelins du sida. Certains ont ensuite révélé à leur famille d'adoption qu'ils avaient des parents, en bonne santé. Seul l'un d'entre eux aurait réellement perdu ses parents.
- Comment ces enfants ont-ils pu passer la frontière?
- L'OAA a reçu le soutien du Ministère français des affaires étrangères - dont dépend la Mission de l'adoption internationale, MAI. Les enfants sont arrivés en France avec un simple laisser-passer de la MAI, mais sans papiers. La plupart des familles ont préféré garder le silence de peur de se voir enlever leurs enfants. Une seule d'entre elles a porté plainte pour escroquerie et abus de confiance quelques mois après l'adoption. Celle-ci a été un échec, l'aîné allait même jusqu'à menacer de mort ses parents adoptifs. Aujourd'hui, les deux enfants sont placés dans un centre d'aide social à l'enfance. En plus du drame psychologique, ils sont apatrides. Cela aboutit à des crises identitaires.
- Dans le cas de Céline Giraud, à quel âge a-t-elle commencé à se préoccuper de son identité?
- Elle a eu une enfance heureuse. Elle vivait dans une famille d'adoption modeste mais attentionnée. Son père adoptif a essayé de lui inculquer la culture péruvienne, mais elle n'a montré aucun intérêt jusqu'à 20 ans, âge auquel elle a eu sa fille. Elle a commencé à apprendre la culture péruvienne avant de sortir avec un petit ami péruvien. En février 2004, elle a décidé de retrouver ses parents biologiques. Son petit ami l'a aidée à retrouver ses parents au Pérou. Il lui a appris qu'elle avait été volée.
- Comment a-t-elle réagi?
- Au début, elle a cru à une blague, tellement c'était incroyable. Puis, comme elle avait elle-même une fille, elle s'est mise à la place de sa mère et a été horrifiée. Elle s'est apaisée dès le moment où elle a revu sa famille biologique. Au Pérou, elle a découvert qu'elle avait deux sœurs et un frère, en plus d'un père, qui vivent dans un bidonville, à côté de Lima. Aujourd'hui, elle les aide financièrement. Elle a trouvé un équilibre entre ces deux pays. Suite à la découverte de ce trafic, Céline a voulu retrouver les autres enfants volés. Mais elle a rencontré beaucoup de résistance de la part des familles d'adoption. Quelques adoptés ont souhaité connaître la vérité. Le choc fut assez violent. Ils se sentaient trahis, avec l'impression d'avoir été utilisés comme de vulgaires «marchandises».
* «J'ai été volée à mes parents». Quand l'adoption tourne au trafic, Editions Flamarion, février 2007.