« La psychiatrie emportée par la tourmente sécuritaire | Aimer mal, châtier bien » |
« Il vaut mieux ne pas remuer la merde », reprend un colonel
Une opinion du colonel Pierre-Alban Thomas, sur LDH-Toulon, le préambule
Précisons d’abord que je m’exprime à titre personnel, n’étant aucunement mandaté par l’armée, au contraire ! Avant de passer aux témoignages, je réponds d’avance à trois questions qui me sont parfois posées.
Pourquoi est-ce que j’accepte de m’expliquer publiquement ?
Les témoignages doivent provenir de tous horizons et pas seulement de milieux officiels. La vérité ne peut supporter aucun tabou. Parler et écrire est une manière de libérer sa conscience, de rendre publique sa " repentance " (terme à la mode). C’est peut-être aussi une incitation pour des indécis à rompre le mur du silence.
Pourquoi avoir attendu quarante ans ?
Trop tôt, me semble-t-il, eût entaché la vérité de réactions passionnelles et entraîné des polémiques inutiles. Trop attendre, c’était risquer l’altération de la mémoire, le désintérêt des jeunes générations.
Ne serait-il pas préférable d’enfouir ce passé insupportable ?
C’était l’avis de Messmer, alors ministre des Armées, après la bataille d’Alger en 1957. C’est ce que Bigeard exprimait dans son langage imagé : " Il vaut mieux ne pas remuer la merde. " C’est ce que pensent presque tous les généraux et cadres supérieurs survivants. Ils prétendent que toute révélation sur la torture porte atteinte à l’armée. A ces arguments, Lanza del Vasto répondait, dès 1957, à ceux qui lui reprochaient " de souiller le drapeau, de déshonorer notre pays en disant ces choses " : " Ce qui souille et déshonore, c’est de les faire, non de les dire. " J’ajoute que le courage étant la vertu majeure de tout militaire, le courage aujourd’hui doit consister à dire ce que l’on a vu, ce que l’on a fait, même si c’est pénible et peu glorieux. Le cacher est un acte de lâcheté.
Sarkozy rallie les présidents Bouteflika et Ben Ali à son projet d'Union méditerranéenne
jeuneafrique.com, le 11 juillet 2007, extrait
Le président français, qui proclame volontiers son pragmatisme, a pris son parti, sans regrets, de l'enterrement discret par les Algériens du traité d'amitié, négocié par Jacques Chirac. "On peut faire l'amitié sans un traité d'amitié", a-t-il martelé tout au long de sa visite en soulignant que "ce qui importe surtout c'est de donner au partenariat un contenu concret".
Cela correspond aussi à son souci de dépassionner les relations entre la France et ses anciennes colonies du Maghreb, à commencer par l'Algérie où les plaies sont encore vives, quarante-cinq ans après l'indépendance.
Ces cris qu'on enterre
Libération, le 27 septembre 2005
Le président Bouteflika entend rayer de la mémoire collective plus d'une décennie de guerre civile. Mais beaucoup d'Algériens qu'ils soient rescapés ou proches de disparus refusent cette amnésie forcée.
Après de longues recherches, il pense que leurs corps reposent là, au fond du trou. «Pour qu'on ne sente rien, il suffit en général de jeter de la chaux.» Lorsqu'il a crié au charnier et exigé son exhumation, il a été réduit au silence. «La gendarmerie m'a harcelé. Mon autre frère a été accusé de liens avec les terroristes et emprisonné pendant trois mois. Tout ça pour m'éloigner d'ici.» Le black out était déjà décrété.
L'homme dirige Al-Soumoud, l'une des associations de victimes d'un conflit qui, durant les années 90, a ensanglanté l'Algérie, faisant 200 000 morts. Une page que le président Abdelaziz Bouteflika veut tourner, une fois pour toutes. Sa «charte pour la paix et la réconciliation nationale», qui sera soumise le 29 septembre à référendum, enterre la «sale guerre», ses cadavres, ses tueurs et ses secrets.