« Le suspect des menaces de mort libéré, aucune charge retenue | Marc Déhi, un « Madoff » d'origine ivoirienne ? » |
La haine de Wiesel pour Madoff
Madoff ayant beaucoup profité de ses relations dans la communauté juive pour recruter ses victimes, on a beaucoup évoqué une escroquerie « affinitaire ». Elie Wiesel ne veut pas entendre parler de cette grille d'analyse. Parle-t-on de catholique, de protestant ou d'italien à propos de Ponzi, l'homme qui a donné son nom à ce type de montages consistant à servir des rendements exceptionnels en utilisant tout simplement le capital versé par les épargnants et qu'ils ne reverront jamais ?
La haine de Wiesel pour Madoff
03/03/09, Les Echos
On a beau être prix Nobel de la paix, il y a des êtres à qui on pardonne difficilement. Elie Wiesel à titre personnel, ainsi que la Fondation pour l'humanité qu'il a créée ont été ruinés par Bernie Madoff. Interrogé sur un possible pardon au cours d'un débat organisé par Condé Nast Portfolio, Wiesel l'a exclu car cela supposerait que Madoff « vienne à genoux demander pardon ». Au cours de ce même débat, il a souhaité que les juges aient suffisamment d'imagination pour inventer une punition adaptée à l'escroc, qui avoue avoir détourné des dizaines de milliards de dollars. L'écrivain le verrait bien condamné à passer « cinq ans au moins » dans une cellule avec pour toute compagnie un écran de télévision lui montrant sans cesse, jour et nuit, les images de ces victimes lui disant : « Regarde ce que tu nous as fait. » James Chanos, gestionnaire de fonds, ayant qualifié Madoff de « sociopathe financier », Wiesel a récusé cette qualification qui évoque la maladie donc l'irresponsabilité : « L'homme savait ce qu'il faisait. » Elie Wiesel a confirmé que sa fondation perdrait 15,2 millions de dollars dans l'affaire et que lui et sa femme avaient confié toute leur fortune à Madoff. « Nous pensions qu'il était Dieu. » En fait, Madoff leur avait été recommandé par un ami, comme d'autres victimes ; ils ne l'ont rencontré que deux fois à des dîners et n'ont pas du tout parlé placements ou marchés mais histoire, enseignement, éthique !
Madoff ayant beaucoup profité de ses relations dans la communauté juive pour recruter ses victimes, on a beaucoup évoqué une escroquerie « affinitaire ». Elie Wiesel ne veut pas entendre parler de cette grille d'analyse. Parle-t-on de catholique, de protestant ou d'italien à propos de Ponzi, l'homme qui a donné son nom à ce type de montages consistant à servir des rendements exceptionnels en utilisant tout simplement le capital versé par les épargnants et qu'ils ne reverront jamais ?
Elie Wiesel ne se plaint pas pour lui-même mais a l'espoir que l'Etat, qui fait tant pour venir au secours des banques, voudra bien renflouer les institutions charitables. Il s'est fait piéger, estime-t-il, parce qu'il était incapable d'imaginer que quelqu'un soit capable de cela. Mais il continue de penser que l'homme, qui est capable du pire, est aussi capable du meilleur. La preuve : il assure avoir reçu des centaines de versements de 5, 10, 100 dollars de gens qui veulent l'aider alors qu'il n'a rien demandé.
J.-C. H., Les Echos