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Procès Moog : « tous les clignotants étaient au rouge »
NDLR : C'est encore une actualité qui me fait repenser à la disparition subite de la mère de ma fille aînée, en 1999, aux urgences, puis à la disparition ou la destruction de son dossier médical, vers 2008, alors que les procédures dans les tribunaux étaient encore assez loin d'un terme... Manifestement, lorsque le personnel d'astreinte a décidé de ne pas se déplacer jusqu'à la clinique ou au CHU, il peut parfois bien suivre un petit procès. Et manifestement également, que les pathologies soient assez rares, difficiles à cerner, mais graves, ou beaucoup plus banales et diagnostiquées, les chances de survie dans ces services démunis sont occasionnellement assez faibles. Méfiez vous des services d'urgences, autant que des tribunaux de ce même pays, surtout lorsque tout clignote
Procès Moog « Tous les clignotants étaient au rouge »
Aujourd'hui, 14:03, l'Alsace, par Geneviève Daune-Anglard Vu 280 fois
Alsace, Justice, A la Une, Strasbourg
Le début du procès du Dr Raphaël Moog qui comparaît devant le tribunal correctionnel de Strasbourg pour avoir involontairement causé la mort de Maxime Walter, 15 ans, en septembre 2008 a été consacré au rappel des faits et à l'interrogatoire du prévenu.
Il en ressort que le médecin d'astreinte aux urgences pédiatriques du CHU de Strasbourg Hautepierre le 21 septembre 2008 n'a pas pris les bonnes décisions au regard du tableau clinique présenté par Maxime Walter, qui est mort deux jours plus tard après avoir vécu un véritable calvaire. Au centre des débats, les décisions prises par le chirurgien, à distance et par téléphone, de ne pas opérer l'adolescent. Comme l'a résumé la présidente Sophie Thomann « la prise en charge par les pompiers et le Samu a été correcte et efficace. Le diagnostic a été porté très rapidement y compris dans sa gravité à l'arrivée aux urgence pédiatriques ». Ce diagnostic étant une fracture de la rate avec une forte hémorragie intra-abdominale. « Le traitement non opératoire privilégié par le Dr Moog pouvait être envisagé au début, reprend la présidente, même si deux collèges d'experts ont estimé qu'il n'y avait que 17% de réussite vu la gravité de l'hémorragie, le Dr Moog aurait dû se déplacer selon tous les experts, pour évaluer la situation, prendre une décision collégiale et mettre une surveillance étroite en place. Tous les clignotants étaient au rouge ».
Mais le médecin, pourtant d'astreinte, ne s'est pas déplacé avant la fin de l'après-midi, malgré des appels pressants de son interne et d'une cardio-pédiatre de garde. Cette dernière est très inquiète de l'état de Maxime Walter. Dés les résultats de l'échographie faite à l'arrivée aux urgences, la fracture de la rate est diagnostiquée. Et le bloc opératoire est prêt pour une ablation à 12 h 30. Mais le chirurgien ne veut pas enlever la rate. Il a préfère appliquer le protocole appliqué pour les enfants, celui de la conservation de la rate à tout prix, même si Maxime Walter, qui mesurait 1,70 m et pesait 50 kg était plus proche de la taille d'un adulte que celui d'un enfant. Et il veut les résultats du scanner avant de prendre une décision. Les résultats du scanner confirment ceux de l'échographie et font état d'une hémorragie importante. « Le traitement non opératoire n'était-il pas risqué ? l'interroge la procureure Morgane Robitaillie qui ajoute que les experts ont dit « qu'au vu du scanner le risque de ce traitement était élevé ? » « C'est la différence entre enfant et adulte », lui répond le chirurgien. « Mais ce n'était pas un enfant », insiste la procureure. « Il était en chirurgie pédiatrique et je suis chirurgien pédiatre ! ».
Lui n'en démord pas : il a pris « la bonne décision ». Il ne pouvait pas opérer car selon lui Maxime avait des problèmes de coagulation « peut-être d'origine génétique ». Mais interrogée par la présidente, il finit par reconnaître que cela peut aussi être du à l'hémorragie massive . Me Nicolas Fady, avocat de la famille de Maxime l'interroge : « Vous ne trouvez pas choquant de prendre une décision à propos de quelqu'un que vous n'avez pas rencontré, ni ausculté et sans avoir discuté avec l'équipe médicale ni vu les résultats des analyses et examens? » « On est d'astreinte, lui répond le médecin, on est amené à prendre des décisions par téléphone. »
S'il ne s'est pas déplacé même après les résultats du scanner c'est parce qu'il savait que Maxime était pris en charge par deux médecins seniors, une cardiopédiatre et un anesthésiste de garde en réanimation. Et il n'hésite pas à rejeter une partie de la responsabilité de ce qui est arrivé sur eux . Il a dit à l'anesthésiste de le rappeler si l'état de Maxime se dégradait dans la soirée. Et quand l'anesthésiste l'appelle dans la nuit, peu après minuit, , il prend encore une décision par téléphone, celle d'emboliser la rate pour tenter de stopper l'hémorragie. Il ne se déplacera à nouveau à l'hôpital qu'après un nouvel appel de l'anesthésiste à 3 h 30. « J'ai eu une discussion avec les deux autres médecins. On a décidé de refaire un bilan sanguin ce qui prend plus d'une heure . J'aurais pu attendre, j'ai décidé de rentrer. ». Pour Maxime, il était déjà trop tard.