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Une histoire (de la violence)
Revue Sciences Humaines,
Grands Dossiers N° 2, mars - avril - mai 2006, La moralisation du monde
Numéro spécial N° 7, septembre - octobre 2008, La grande histoire de la psychologie
Des Grands Dossiers N° 2, sur sur Sciences Humaines. L'éthique, un dilemme sociologique. Si Max Weber et Émile Durkheim ont placé la morale au cœur de leurs interrogations, la « sociologie morale » n'en est pas pour autant devenue un champ de recherches à part entière. Le sociologue qui s'intéresse à la morale est généralement confronté à une funeste alternative. Soit, en effet, il pose que la morale est une dimension essentielle de la vie sociale, coextensive de l'appartenance à une communauté ou une société donnée ; mais le constat est alors trop général pour engendrer, en tant que tel, des recherches empiriques précises. Soit il cherche à analyser les moments où dans la vie sociale se cristallisent des controverses ou des débats moraux, mais alors on a affaire à une sociologie spécialisée (sociologie de la déviance, des religions, du débat public...), où se perd la spécificité de la morale comme dimension de l'appartenance sociale.
Resterait le sacrilège secret et qui n'aurait été vu par personne, et celui-ci Frédéric le condamnerait encore et Montesquieu non. Mais ce cas là existe à peine. • La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire, par Emile Faguet (1847-1916)
Une histoire de la violence
De la fin du Moyen-Age à nos jours
de Robert Muchembled
Seuil, 2008, collection L'univers historique
Présentation de l'éditeur. L'actualité place sans cesse la violence sur le devant de la scène. Thème important pour les sociologues et les politiques, elle est aussi un objet d'histoire. À rebours du sentiment dominant, Robert Muchembled montre que la brutalité et l'homicide connaissent une baisse constante depuis le XIIIe siècle. La théorie d'une " civilisation des mœurs ", d'un apprivoisement voire d'une sublimation progressive de la violence paraît donc fondée. Comment expliquer cette incontestable régression de l'agressivité ? Quels mécanismes l'Europe a-t-elle réussi à mettre en œuvre pour juguler la violence ? Un contrôle social de plus en plus étroit des adolescents mâles et célibataires, doublé d'une éducation coercitive des mêmes classes d'âge fournissent les éléments centraux de l'explication. Progressivement, la violence masculine disparaît de l'espace public pour se concentrer dans la sphère domestique, tandis qu'une vaste littérature populaire, ancêtre des médias de masse actuels, se voit chargée d'un rôle cathartique : ce sont les duels des Trois Mousquetaires ou de Pardaillan, mais aussi, dans le genre policier inventé au XIXe siècle, les crimes extraordinaires de Fantômas qui ont désormais à charge de traduire les pulsions violentes. Les premières années du XXIe siècle semblent toutefois inaugurer une vigoureuse résurgence de la violence, notamment de la part des " jeunes de banlieues ". L'homme redeviendrait-il un loup pour l'homme ?
Biographie de l'auteur. Robert Muchembled, professeur à l'université de Paris-Nord, Visiting Professor à l'université du Michigan à Ann Arbor, ancien membre de l'lnstitute for Advanced Study de Princeton, il a écrit plus de vingt ouvrages traduits en une vingtaine de langues. Il a notamment publié, au Seuil, Une histoire du diable (2000) et L'Orgasme et l'Occident (2005).
Vers une police de la parentalité ?
L'enfant soldat - L'enfant instrumentalisé par le magistrat
Ces juges qui dérapent ou l'éthique dans le service public
Normes et déviances
Véronique Pillon, éditions Bréal, 2006
Prévoir la norme ne suffit pas. Il faut aussi en imaginer tous les dévoiements possibles... • Plaidoyer pour le mensonge, Laurent Lèguevaque, 2006
La civilisation des moeurs
de Norbert Elias
Pocket, 2003, collection Agora, reédition
Présentation de l'éditeur. Comment se tenait-on à table au Moyen Âge ? Comment se mouchait-on à la Renaissance ? De quelle époque datent les pudeurs associées au comportement sexuel ? Norbert Elias analyse les mœurs de la civilisation occidentale et étudie leur transformation de la fin du Moyen Âge à l'époque contemporaine. Des exemples amusants et inattendus, des textes peu connus et pleins de surprises émaillent ce livre savoureux. D'une chanson coquine à un manuel de savoir-vivre, d'une tirade de moraliste à un recueil de proverbes, à chaque fois brillamment commentés, Norbert Elias donne au mot " civilisation " un sens nouveau et original, basé sur l'étude concrète des mœurs. Ce livre d'un précurseur est devenu un classique de la réflexion sociologique.
Plusieurs charrettes pleines de victimes roulaient ce jour là leur charge de condamnés à l'échafaud. On la fit monter sur la dernière, à côté d'un vieillard infirme et faible nommé Lamarche, ancien directeur de la fabrication des assignats. Elle était vêtue d'une robe blanche, protestation d'innocence dont elle voulait frapper le peuple. Ses beaux cheveux noirs tombaient en ondes jusqu'à ses genoux. Son teint reposé par une longue captivité et animé par l'air âpre et glacial de novembre, avait la fraicheur de ses années d'enfance. Ses yeux parlaient. Sa physionomie rayonnait de gloire. Ses lèvres hésitaient entre la pitié et le dédain. La foule l'insultait de mots grossiers : "A la guillotine, à la guillotine ! lui criaient les femmes. J'y vais, leur dit elle, j'y serai dans un moment ; mais ceux qui m'y envoyent ne tarderont pas à m'y suivre. J'y vais innocente, ils y viendront souillés de sang ; et vous qui applaudissez aujourd'hui vous applaudirez alors !" Elle détournait quelquefois la tête de ces insultes, et se penchait avec une tendresse filiale vers son compagnon de supplice. Le vieillard pleurait. Elle lui parlait et l'encourageait à la fermeté. Elle essayait même d'égayer pour lui le funèbre trajet et parvint à le faire sourire.
Une statue colossale de la Liberté, en argile, comme la liberté du temps, s'élevait alors au milieu de la place où l'on voit aujourd'hui l'obélisque. L'échafaud se dressait à côté de cette statue. Arrivée là, madame Roland descendit. Au moment où l'exécuteur lui prenait les bras pour la faire monter la première à la guillotine, elle eut un de ces dévouements qu'un cœur de femme peut seul contenir et révéler dans une pareille heure : "Je vous demande une seule grâce, et ce n'est pas pour moi, dit-elle en résistant un peu au bras du bourreau, accordez la moi. Puis se tournant vers le vieillard : "Montez le premier, dit-elle à Lamarche, mon sang répandu sous vos yeux vous ferait sentir deux fois la mort, il ne faut pas que vous ayez la douleur de voir tomber ma tête." Le bourreau y consentit. Délicatesse d'une touchante sensibilité qui s'oublie et qui s'immole pour épargner une minute d'agonie à un viellard inconnu, et qui atteste le sang-froid du coeur dans l'héroïsme de la mort ! Qu'une telle minute doit racheter d'emportement d'opinion devant la postérité et devant Dieu !
Après l'exécution de Lamarche, qu'elle entendit sans pâlir, elle monta légèrement les degrés de l'échafaud et, s'inclinant du côté de la statue de la liberté comme pour la confesser encore en mourant par elle : "O Liberté ! s'écria-t-elle, Ô Liberté ! que de crimes on commet en ton nom !" Elle se livra à l'exécuteur, et sa tête roula dans le panier.
Histoire des Girondins, tome V, 1850, p. 117
De Alphonse Marie Louis de Lamartine
Bruxelles, société typographique Belge
De la rubrique Questions sociales, sur http://www.oodoc.com
Les nouveaux visages de la peur en Occident
Résumé. Étude sur le thème de la peur en Occident. Cette étude met en lumière les nouveaux rôles de la peur au sein des sociétés occidentales. Elle identifie les causes de la mutation de la peur-instinct pour une peur de divertissement, et la contribution des médias dans la propagation de la peur au sein de la société, et présente les conséquences à plus long terme de cette évolution. Les points à retenir sont qu'effectivement, les sensations de peur liées aux changements métaboliques sont reconnues comme positives par le cerveau et incitent l'homme à vouloir les recréer; et que le contexte médiatique fait en sorte que la peur est à la fois objet (thème fort populaire de l'actualité) et instrument (dans les consciences) de l'établissement d'un climat de peur.
Sommaire:
Introduction
I) Le plaisir de la peur
A. La physiologie de la peur
B. Des circuits à sensations
II) La peur sous influence
A. La peur exploitée
B. L'instrumentalisation de la peur
Conclusion
« La fée électricité »,
d'un manuel de formation professionnel
Colloque international,
http://www.recherches-slaves.paris4.sorbonne.fr
Sémiotique de la peur dans la civilisation et la littérature russes
27-30 mars 2001
UFR d'Etudes slaves, Centre Universitaire Malesherbes
108, boulevard Malesherbes, 75850 Paris Cedex 17, France
Le thème de la peur se situe au carrefour de plusieurs des thèmes transversaux qui, ces dernières années, ont retenu l'attention des chercheurs en sciences humaines. Objet traditionnel d'études en psychologie, il a suscité, depuis quelques dizaines d'années, des recherches tant parmi les historiens (particulièrement chez les spécialistes de l'opinion publique et de la conscience collective) que parmi des spécialistes de littérature qui se sont tournés vers l'analyse des aspects sémiotiques de la peur dans les processus culturels.
Le domaine concerné est trop vaste pour qu'on puisse en proposer une étude exhaustive. En revanche, le fait qu'il a été souvent étudié dans des secteurs et par des disciplines scientifiquement proches, autorise à envisager la confrontation et l'échange des expériences et des méthodes élaborées par les divers spécialistes dans ce même espace thématique.
En prenant l'initiative de ce colloque international sur la sémiotique de la peur, l'UFR d'Etudes slaves de Paris-Sorbonne et son Centre de Recherches proposent comme champ d'études le vaste domaine de la civilisation et de la littérature russes. C'est à dessein qu'aucun cadre n'a été imposé, d'un point de vue chronologique comme des points de vue des thèmes, des genres, etc. : il s'agit en effet de réunir et de confronter la plus grande variété de courants, de spécialités, d'approches scientifiques.
Sont invités des ethnologues, des culturologues, des spécialistes de littérature, auxquels il est proposé de centrer leur réflexion sur une analyse sémiotique des concepts et des mécanismes liés à la peur dans la culture : ses fonctions sociales aux niveaux éthique et normatif, nature des connexions diverses unissant le concept de peur à d'autres concepts (Cf. par exemple les remarques de J. LOTMAN sur le lien entre peur et honte considérées comme deux catégories antagonistes productrices de comportements culturels). Citons entre autres problèmes dignes d'intérêt: la mise en évidence de mécanismes codants générateurs de peur, de mécanismes se développant dans une société en proie à un accès de peur, les particularités de la construction sémiotique de l'objet de la peur, l'étude de la question du caractère cyclique de la peur. On souhaite que l'attention des participants soit également attirée par les possibilités créatrices, dynamiques de la peur, générant aussi bien des rituels que des genres littéraires. On propose enfin d'étudier tant la thématique que la poétique de la peur (mise à jour et description sur la base de textes littéraires, dans l'oeuvre d'écrivains ou dans des courants esthétiques).
L'ampleur du sujet conduit à ne pas retenir pour notre champ d'études le domaine proprement historique et politique qui a déjà fait l'objet de multiples recherches. L'objectif général du colloque peut être défini comme l'étude et la description de la « culture de la peur ».
Le colloque, organisé par l'UFR d'Etudes slaves et son Centre de recherches, aura lieu du 27 au 30 mars 2001 (trois journées et demie). Il doit réunir 40 spécialistes de réputation internationale, venus de onze pays (Russie, Etats-Unis, Allemagne, Italie, Pologne, Estonie, Israël, Suisse, Finlande, Grande-Bretagne et France).
Organisateurs :
- Professeur Francis CONTE, Directeur de l'UFR d'Etudes slaves, responsable de la section « civilisation »
- Professeur Nora BUHKS, responsable de la section « littérature »
Impostures intellectuelles
de Alan Sokal, Jean Bricmont
LGF, Poche, nouvelle édition, 1999
Mot de l'éditeur.
Au printemps 1996, une revue américaine fort respectée - Social Text - publiait un article au titre étrange : " Transgresser les frontières : vers une herméneutique transformative de la gravitation quantique ". Son auteur, Alan Sokal, étayait ses divagations par des citations d'intellectuels célèbres, français et américains.
Peu après, il révélait qu'il s'agissait d'une parodie. Son but était de s'attaquer, par la satire, à l'usage intempestif de terminologie scientifique et aux extrapolations abusives des sciences exactes aux sciences humaines.
Plus généralement, il voulait dénoncer le relativisme postmoderne pour lequel l'objectivité est une simple convention sociale. Ce canular a déclenché un vif débat dans les milieux intellectuels, en France et à l'étranger.
Dans ce livre, les auteurs ont rassemblé et commenté des textes illustrant les mystifications physico-mathématiques de Jacques Lacan, Julia Kristeva, Luce Irigaray, Bruno Latour, Jean Baudrillard, Gilles Deleuze, Félix Guattari et Paul Virilio, auteurs qui jouissent tous d'une grande notoriété aux Etats-Unis.
Ils montrent que, derrière un jargon imposant et une érudition scientifique apparente, le roi est nu.
Après les vives polémiques suscitées par la version initiale d'Impostures intellectuelles, cette nouvelle édition, revue et enrichie d'une préface inédite (1999), procure aux auteurs l'occasion d'une nécessaire mise au point. Ils y précisent leur point de vue. Ils écartent les idées voire les arrière-pensées qui leur ont été à tort attribuées.
Pour en finir avec l'enfer familial, ed. Chiron, 2005, sur amazon.fr
Bruno Bettelheim ou la Fabrication d'un mythe : Une biographie
de Richard Pollak, Agnès Fonbonne (traduction)
Les Empêcheurs de penser en rond, 2003
Eloge des mères
de Edwige Antier
J'ai Lu, 2003
servicevie.com, semaine du 1er mai 2000, extrait
La naissance d'un enfant trisomique et l'impact chez la mère
Imaginez-vous dans la peau d'une mère qui a désiré son enfant pendant des mois et qui se rend compte que l'enfant qu'elle tient dans ses bras n'est pas celui qu'elle avait imaginé... Ou encore Le laid, l'étrange et « un bébé sur le tard », un dossier des maternelles
De la préface du rapport 2005 du Défenseur des Enfants, sa première phrase :
« Tant qu'il existera, par le fait des lois et des moeurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers [...]; » • Victor Hugo, préface aux Misérables, 1862.
Critique de la raison juridique, t. 1 : Où va la sociologie du droit
par A.-J. Arnaud, CNRS, Paris, LGDJ, 1981
disponible sur RED&S, 2005
2.2.1.1. La France au microscope, extrait
L’existence d’un enseignement de sociologie juridique tient à l’initiative personnelle d’un professeur intéressé par ce thème. Une première constatation s’impose donc : il y a encore peu d’enseignants tentés, en France, par la sociologie juridique, et la demande, dans les U.E.R. de droit, ne paraît pas excéder l’offre. Cet état d’esprit correspond assez bien à la manière dont les étudiants conçoivent une telle discipline. Loin de se précipiter, à l’annonce d’un tel enseignement, pour en profiter, ils le boudent, pour la plupart. Où trouver l’explication ? La réponse, certainement, n’est ni simple ni univoque. Il faut évoquer, sans doute, le caractère apparemment peu pratique de la discipline. L’analyse sociologique est encore mésestimée dans la plupart des professions auxquelles se destinent les étudiants en droit privé. Plus soucieux de se préparer à une vie professionnelle où la sociologie juridique ne leur paraît pas devoir les aider substantiellement, que d’acquérir une culture qui leur semble étrangère à la mise en oeuvre quotidienne du droit, pourquoi iraient-ils perdre leur temps hors des sentiers dogmatiques ? Il faut ajouter que les candidats à l’enseignement du droit eux-même, qui connaissent bien les tendances et les lubies des membres potentiels de leurs jurys d’examen ou de concours, se gardent bien de s’engager sur la voie de la sociologie juridique, de peur de produire des travaux qu’on irait ensuite leur reprocher d’avoir réalisés, ou dont on ne tiendrait que peu de compte, comme s’il s’agissait de fruits de la pure fantaisie.
Enfants turbulents : l'enfer est-il pavé de bonnes intentions ?
Par le collectif Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans
Chez Eres, 2008
Un essai nucléaire dans l'atoll de Mururoa
Paris, entre Alesia et Denfert, janvier 2007
Introduction. Médecins, juristes et philosophes en dialogue
Thèmes: Santé, corps; Droit et justice; Philosophie-morale
ESPRIT, Article, juillet 2007, La santé, question de justice, extrait
Le recours à la justice pour obtenir la reconnaissance d’un dommage constitue le point de départ de l’article de Benoît Pigé sur le handicap. Sans revenir ici en détail sur les procédures judiciaires pour préjudice du fait de la naissance, il s’interroge sur notre incapacité à reconnaître la valeur propre de la vie d’un enfant trisomique. Des avis de justice donnés à propos des préjudices que représenterait le fait d’avoir un enfant handicapé traduisent, en effet, des conceptions du normal et du pathologique qui expriment, malgré les bonnes intentions probables des acteurs judiciaires qui veulent indemniser des « victimes », une conception étonnamment appauvrissante de notre rapport à la vie et aux autres. Il propose en regard une réflexion philosophique sur l’expérience que peut nous apprendre à partager un enfant trisomique, pour peu qu’on le regarde vivre. (...) C’est pourquoi le langage du droit apparaît tout aussi insuffisant que l’approche technique médicale à appréhender la totalité de notre rapport à la santé. En témoigne le traitement anticancéreux de person?nes en fin de vie, pour lequel les notions de « dons » et de « sacrifice » paraissent bien plus pertinentes pour rendre compte des comportements des soignants et des malades. Est-ce vraiment au nom de l’efficacité médicale que des traitements lourds sont la règle ? Ne faut-il pas voir, là où la rationalité médicale semble imposer les gestes et les attitudes, plutôt une forme de pensée sacrificielle et de mise à distance par le don, qui s’impose aux patients comme aux soignants, au nom d’une guérison bien hasardeuse pourtant à promettre ?
Du dictionnaire de l'Académie française...
ANATHÈME n. m. XIIe siècle. Emprunté, par l'intermédiaire du latin chrétien, du grec anathema, -atos, « ce qu'on place par-dessus », d'où « offrande votive, victime expiatoire », « objet de malédiction » et « acte par lequel un être est frappé de malédiction ».
1. RELIG. CATHOL. Excommunication majeure lancée contre un hérétique. Lancer l'anathème. Frapper d'anathème. Prononcer, lever un anathème. S'exposer aux anathèmes de l'Église. Par ext. Frapper d'anathème une doctrine, une proposition hérétique. Adjt. Bulle anathème, qui rejette hors de l'Église. 2. Personne ou collectivité atteinte par cette sentence. Un anathème. Adjt. Quiconque soutiendra le contraire, qu'il soit anathème ! 3. Blâme solennel, réprobation violente et absolue. Lancer l'anathème contre une nouvelle école philosophique. Faire l'objet de terribles anathèmes
Les rêveries du promeneur solitaire
Jean-Jacques Rousseau, 1782
La diffamation, la dépression, la dérision, l'opprobre dont ils m'ont couvert ne sont pas plus susceptibles d'augmentation que d'adoucissement ; nous sommes également hors d'état, eux de les aggraver et moi de m'y soustraire. Ils se sont tellement pressés de porter à son comble la mesure de ma misère que toute la puissance humaine, aidée de toutes les ruses de l'enfer, n'y saurait plus rien ajouter. La douleur physique elle-même au lieu d'augmenter mes peines y ferait diversion. En m'arrachant des cris, peut-être, elle m'épargnerait des gémissements, et les déchirements de mon corps suspendraient ceux de mon coeur.
Qu'ai-je encore à craindre d'eux puisque tout est fait ? Ne pouvant plus empirer mon état, ils ne sauraient plus m'inspirer d'alarmes. L'inquiétude et l'effroi sont des maux dont ils m'ont pour jamais délivré : c'est toujours un soulagement. Les maux réels ont sur moi peu de prise ; je prends aisément mon parti sur ceux que j'éprouve, mais non pas sur ceux que je crains.
Mon imagination effarouchée les combine, les retourne, les étend et les augmente. Leur attente me tourmente cent fois plus que leur présence, et la menace m'est plus terrible que le coup. Sitôt qu'ils arrivent, l'événement, leur ôtant tout ce qu'ils avaient d'imaginaire, les réduit à leur juste valeur. Je les trouve alors beaucoup moindres que je ne me les étais figurés, et même au milieu de ma souffrance je ne laisse pas de me sentir soulagé. Dans cet état, affranchi de toute nouvelle crainte et délivré de l'inquiétude de l'espérance, la seule habitude suffira pour me rendre de jour en jour plus supportable une situation que rien ne peut empirer, et à mesure que le sentiment s'en émousse par la durée ils n'ont plus de moyens pour le ranimer. Voilà le bien que m'ont fait mes persécuteurs en épuisant sans mesure tous les traits de leur animosité. Ils se sont ôté sur moi tout empire, et je puis désormais me moquer d'eux.
Il n'y a pas deux mois encore qu'un plein calme est rétabli dans mon coeur. Depuis longtemps je ne craignais plus rien, mais j'espérais encore, et cet espoir tantôt bercé tantôt frustré était une prise par laquelle mille passions diverses ne cessaient de m'agiter. Un événement aussi triste qu'imprévu vient enfin d'effacer de mon coeur ce faible rayon d'espérance et m'a fait voir ma destinée fixée à jamais sans retour ici-bas. Dès lors je me suis résigné sans réserve et j'ai retrouvé la paix.
La société parano, page 113, chez Payot
par Véronique Campion-Vincent
Le bon côté des choses, par Charb
Les possibilités presque infinies de la peur comme stimulis dictant le comportement des hommes étaient connues bien avant la révolution d'Octobre. Jean Delumeau défini la peur chez l'individu comme un choc émotif, souvent précédé d'un évènement imprévu et provoqué par la conscience d'un danger latent et écrasant, qui nous semble menacer notre sécurité. Gustave Le Bon découvre, lui, que la peur démesurée des foules complique et transforme considérablement l'individu. • La machine et les rouages, Gallimard, 1994, p111-112
Généralement, la population - américaine - est pacifiste, tout comme elle l'était au moment de la Première Guerre mondiale. Le peuple n'a aucune raison de s'engager dans des interventions militaires à l'étranger, des tueries et des tortures. Il faut donc le mobiliser et pour le mobiliser, il faut l'effrayer. • Propagande, médias et démocratie, Echosociété, 2006, p35
Sans cesse stimulé, ce mouvement de criminalisation perturbe l'assise libérale de la démocratie. Un impératif moral de punir (les agresseurs) et de sauver (les victimes) tend à devenir notre horizon d'attente. • Les nouvelles sorcières de Salem ; leçons d'Outreau, Seuil, p40