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En Suisse, disparaître est un droit
L'incroyable disparition volontaire de l'Anglais John Darwin, la mystérieuse absence du Genevois Pascal Henry et la mort énigmatique du milliardaire Steve Fossett rappellent que chaque année des milliers de personnes cherchent à disparaître. En Suisse aussi, ils sont plusieurs centaines à partir sans laisser le moindre indice derrière eux
Le Matin Dimanche, le 02 août 2008, extrait
Disparaître est un droit
«Très récemment, nous avons eu le cas d'un homme qui a disparu du jour au lendemain, raconte le porte-parole genevois. Et de poursuivre: apprenant que les siens le recherchaient, il s'est spontanément présenté à l'Hôtel de police en disant qu'il était en bonne santé, mais qu'il avait choisi de changer de vie, qu'il fallait cesser de le chercher. L'avis de disparition a donc été révoqué.»
Détectives privés efficaces mais chers
Il n'y a en effet rien d'illégal dans le fait de tourner les talons sans prévenir. D'ailleurs, la police ne va pas entreprendre de démarches particulières pour ramener un individu signalé disparu par ses proches. «Si la personne est majeure et saine d'esprit, qu'elle ne représente pas de danger pour elle-même ou que les circonstances de sa disparition ne sont pas suspectes, la police ne va pas déployer de gros moyens, re-lève Philippe Jaton porte-parole de la police vaudoise. Chacun est libre d'aller où bon lui semble.»
Notons que disparaître sans laisser de traces reste un droit, aussi longtemps que l'on ne cherche pas par là à se soustraire à une condamnation ou encore à l'obligation de payer une pension alimentaire. «Mais ce n'est que sur ordre de la justice qu'une recherche sera lancée», précise encore Philippe Jaton.
Alors lorsque la police ne peut plus rien faire, les familles se tournent régulièrement vers des détectives privés. Patron de l'agence Pro'fil, David Fragnoli confirme ainsi que la recherche de personnes occupe une bonne partie du temps de ses équipes.
Ce dernier avoue toutefois qu'en cas de disparition volontaire, «les proches renoncent souvent à cause des montants à engager pour les recherches». L'agent privé explique en effet que «cela peut prendre des semaines d'enquête pour retrouver la trace d'une personne qui fait tout pour ne pas en laisser derrière elle. Et c'est souvent sans garantie de réussite.»
Ainsi, pour David Fragnoli, l'essentiel de ce genre de mandats, «dont une grande partie aboutit», concerne des fugues de jeunes ou d'adultes qui ont malheureusement décidé de mettre fin à leurs jours dans des lieux à l'abri des regards.
Quand est-on déclaré mort?
Mais que se passe-t-il si toutes les recherches restent vaines? Selon le Code civil suisse, le juge peut «déclarer l'absence» du disparu, à la requête de ceux qui auraient des droits subordonnés à son décès. Le délai pour qu'une telle mesure soit prononcée varie de cinq à quinze ans selon les probabilités de la mort.
Reste que si aucune démarche n'est entreprise auprès de la justice, la personne manquante sera théoriquement considérée comme vivante. Même si elle a 150 ans. Mais en Suisse ces cas se comptent sur les doigts d'une main.
Partis sans laisser d'adresse
Hubert Prolongeau
Chez Seuil, avril 2001 (disponible chez Poche)
Quatrième de couverture : Qui n'a jamais rêvé de refaire sa vie, d'être un autre, de tout abandonner ? Bien sûr, la plupart d'entre nous y renoncent. Le sens des responsabilités, la peur de l'inconnu, de rompre définitivement avec ceux que nous aimons, nous en dissuadent... dans la majorité des cas.
Certains passent à l'acte. En France, chaque année, 15 000 disparitions sont déclarées à la police, et elles s'avèrent volontaires dans leur immense majorité. Malgré le désarroi dans lequel ils plongent leurs proches, ces absents ne sont passibles d'aucun délit, la loi française n'interdisant à personne de disparaître. Mais ils n'en sont pas moins déconsidérés par la société, qui les accable plutôt que de tenter de les comprendre.
Hubert Prolongeau a décidé de leur donner la parole. En un an d'enquête, il en a interrogé plusieurs, qui lui ont raconté leurs raisons, leurs découragements, leurs désillusions...