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Point de vue : les chiens ont aussi des droits
Point de vue
Un nouveau contrat entre homme et chien, par Claude Beata
LE MONDE | 07.08.08 | Extraits
Il n'y a souvent que deux façons de parler des animaux : d'un côté les passionnés de la cause animale, dont les comportements excessifs sont parfois contre-productifs, de l'autre les politiques, qui pensent en tonnes de crottes sur les trottoirs et en catégories de chiens dangereux. Il est nécessaire et urgent d'ouvrir une troisième voie.
... Nous avons en France plus de 8 millions de chiens, qui ont causé en dix-neuf ans 30 morts ? Cette prévalence est trop faible pour pouvoir être diminuée par la loi. En revanche, le nombre de morsures par an, mal connu et sujet à controverses est, en tous les cas, suffisant pour donner envie d'agir. La loi récente de mars 2007 et la nouvelle loi de juin 2008 peuvent-elles être efficaces pour diminuer le danger ?
... Renforcer la discrimination est une faute scientifique, un mensonge politique et une erreur philosophique. Les enquêtes, les études menées dans différents pays du monde n'ont jamais réussi à démontrer qu'une race était plus impliquée qu'une autre dans les accidents, et le génome canin, aujourd'hui entièrement décodé, n'a bien sûr pas livré le secret d'un quelconque gène de l'agressivité. Continuer de corréler le risque agressif à la race, c'est aussi dire que les chiens et les humains sont différents par nature, et nous ne le croyons pas. Sinon, il faudrait croire que certaines races humaines sont plus agressives, plus voleuses, plus fainéantes, et qui aujourd'hui pourrait encore soutenir cela ?
Le mensonge politique réside dans la description d'un risque limité aux races incriminées, et dans la promesse du contrôle du danger. L'Etat ne porte-t-il pas alors la responsabilité du risque aggravé encouru par tous ceux qui, ayant opté pour une autre race de chien, peuvent croire qu'ils ne sont pas en danger, et qui pourraient s'indigner d'apprendre les chiffres pourtant connus : 80 % des accidents se passent dans la sphère privée et 98 % sont le fait de chiens non catégorisés.
... Il est temps d'établir un nouveau contrat entre les chiens et nous. Reconnaissons-les comme des sujets, avec des devoirs et des droits. Parce que, dans une société occidentale, la sécurité est une valeur majeure, leur premier devoir est de ne pas nous mettre en danger. Pour diminuer l'incidence des accidents, des solutions techniques existent : la création d'un Observatoire du comportement du chien et l'évaluation comportementale de tous les chiens mordeurs sont deux mesures allant dans le bon sens et instituées par la nouvelle loi. Encore faut-il que les décrets ne les vident pas de leur sens !
Mais les chiens ont aussi des droits, et parmi ceux-là, celui de ne pas subir de discrimination a priori. Ceci est inscrit pour les humains dans la Déclaration universelle des droits de l'homme. La première Déclaration des droits des animaux a aussi été élaborée en France, en 1978. Les Rencontres animal et société, Grenelle de l'animal en quelque sorte, auraient pu être l'occasion d'établir ce nouveau contrat. Cela passait d'abord par la reconnaissance de l'injustice faite au chien. ...