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Une famille kosovare expulsée en minicharter
Société
Une famille kosovare expulsée en minicharter
MATTHIEU ÉCOIFFIER
Libé, samedi 9 août 2008
Arrêtée jeudi à 6 h 30 à Pau, la famille Sylejmani a atterri dès 14 h 30 à Pristina au Kosovo. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques a eu recours à un petit avion d’une dizaine de places pour «reconduire à la frontière» Kirimane la mère, Afrim, le père, Alma, 10 ans, et Drenusha, 8 ans, leurs filles, et Albin, 5 ans, le petit dernier.
Albanais du Kosovo, les Sylejmani ont fui leur pays au printemps 2007 par crainte d’être inquiétés : le père avait refusé de s’engager dans la guerre civile aux côtés de l’UCK, actuellement au pouvoir. C’est devant le centre de rétention de Hendaye, où ils les croyaient retenus, que leurs amis de RESF 64 et une poignée d’élus qui les ont parrainés le 4 juillet ont appris leur expulsion. Par un coup de fil de la mère, dont le témoignage faisait la une vendredi de la République des Pyrénées : «Ici, j’ai peur. Nous ne sommes pas en sécurité avec nos enfants. Dans deux ou trois jours, nous devons partir du Kosovo.»
«On ne s’attendait pas à ce qu’ils soient directement renvoyés à Pristina ! C’est une famille bien intégrée. Le père a une promesse d’embauche dans le bâtiment et les trois gamins sont scolarisés. Albin, dont je suis le parrain, a vu son père menotté pendant tout le vol», s’indigne Olivier Dartigolles, élu palois et porte-parole du PCF. Et il dénonce «une opération commando et une débauche de moyens. Deux parents, trois enfants et cinq policiers dans un avion c’est la France, ça ?» «C’est un minicharter, spécialement affrété pour eux, une honte», dénonce Fred Espagnac, conseillère municipale socialiste à Pau et collaboratrice de François Hollande.
Ce «coup d’éclat» fait suite à un bras de fer entre les élus de gauche, le Réseau éducation sans frontières (RESF) et le nouveau préfet Philippe Rey (1). Réputé «sarkozyste de choc», selon un élu, il «vient d’être nommé dans les Pyrénées-Atlantiques après avoir suscité une levée de boucliers des élus de tout bord en Bretagne. C’est sa deuxième expulsion en un mois. Il a été vexé parce que la première a échoué. On a fait libérer les Kuka pour non-respect des procédures» , explique un élu. Cette fois, le préfet a décidé de les prendre de vitesse en zappant l’escale dans le centre de rétention.
Leur demande d’asile ayant été rejetée en appel, les Sylejmani devaient se présenter le 25 septembre pour un réexamen de leur cas devant l’Office français des réfugiés et apatrides (Ofpra). «Ce recours n’est pas suspensif de la mesure d’éloignement, précisait-on à la préfecture. La règle c’est le départ tout de suite. Et le placement en rétention l’exception.»
(1) En vacances depuis début août, le préfet a refusé de répondre à nos questions.