« EDF lance son plan d'action post-Fukushima | Nicolas Sarkozy, l'improvisation en prime » |
WikiLeaks : Bradley Manning, le détenu qui embarrasse les Etats-Unis
NDLR : Comme Libé, FDN et RSF, j'ai toujours ce miroir en ligne, http://wikileaks.cloppy.net. Il existe encore plus de 1 000 miroirs, selon une mise à jour du 6 mars dernier ; leur nombre a un peu fondu depuis janvier. Je constate que depuis l'an dernier, « officiellement », seul le soldat Manning a été « inquiété »... et que ses soutiens maitrisent le « terrorisme non-violent ».
De source Wired... « Dear Mr. President we honor you today sir... But at another location in this country, Alone in a 6×12 cell sits Bradley ». As White House aides escorted the woman from the room, she said, « Free Bradley Manning. I’m leaving. I hope I don’t get tortured in jail. » « That was a nice song, » Obama said as she finished singing. « You guys have much better voices than I. Thank you very much. » Then he turned back to his speech. « Where was I ? »
Plus d'infos sur Wired
A la Une > Amériques
WikiLeaks : Bradley Manning, le détenu qui embarrasse les Etats-Unis
LEMONDE.FR | 21.04.11 | 20h23 • Mis à jour le 21.04.11 | 20h48, extraits
Pour le cofondateur de WikiLeaks, Julian Assange, il est "un héros sans pareil" et "le prisonnier politique américain le plus important". Pour ses détracteurs, c'est un traître. Pour la plupart des observateurs, il est surtout un féru d'informatique mal dans sa peau qui a atterri dans l'armée par hasard et a fini par faire trembler l'administration américaine. Incarcéré depuis le 29 juillet 2010, Bradley Manning, le soldat américain de 23 ans soupçonné d'avoir transmis des milliers de câbles diplomatiques américains au site WikiLeaks, est la seule personne officiellement inquiétée par la justice dans cette affaire.
Depuis des mois, la question de ses conditions de détention, jugées inacceptables par ses défenseurs, intéresse les Américains. Mercredi, Manning a été transféré du centre de détention militaire de Quantico, en Virginie, vers celui, "plus approprié", de Fort Leavenworth, au Kansas. Infléchissement de l'administration américaine ou volonté d'accentuer son isolement ? Ce transfèrement n'est que le nouvel épisode d'un feuilleton qui divise l'opinion américaine et embarrasse le pouvoir.
[...] Au fil des semaines, Bradley Manning s'est mis à incarner, sans forcément le vouloir, la résistance face aux guerres menées par son pays et la liberté d'information, celle que WikiLeaks brandit comme un étendard. Dans les manifestations de soutien à Manning, on croise aussi bien des soldats déçus par leur expérience en Irak que des personnalités du Web.
[...] La personnalité de Manning a toujours intrigué l'armée et décuple la motivation de ses défenseurs : abandonné par son père (qui le défend aujourd'hui) lorsqu'il lui révéla son homosexualité, progressiste dans un milieu qui ne l'est pas, rongé par ses états d'âme, Bradley Manning n'est pas un soldat comme les autres. Depuis le début de son incarcération, il s'est attiré le soutien d'un certain nombre de figures au poids médiatique certain, comme le réalisateur Michael Moore, l'ancien analyste de l'armée au Vietnam Daniel Ellsberg ou la colonelle à la retraite Mary Ann Wright. Tous ont rejoint son comité de soutien, financé en partie par WikiLeaks, qui organise régulièrement des manifestations. Un texte de soutien, rédigé par deux professeurs de droit de Yale et Harvard, a été signé par près de 300 universitaires.
[...] Le 18 décembre, dans une note de blog, David Coombs décrit la journée-type de Manning : "Les gardiens lui demandent toutes les cinq minutes s'il va bien et il se doit de répondre par l'affirmative... Il a le droit de n'avoir qu'un livre ou magazine à la fois, qu'on lui retire à la fin de la journée." Les soutiens de Bradley Manning, qui a porté plainte contre ses conditions de détention, parlent de "torture psychologique" et pensent que les autorités américaines cherchent à le contraindre à l'isolement le plus profond et à mettre en danger son équilibre psychologique, déjà fragile, pour qu'il collabore et communique, en particulier, des informations sur Julian Assange. Ce dernier est poursuivi dans une double affaire d'agressions sexuelles, mais pas pour l'affaire WikiLeaks.
Depuis onze mois, l'administration Obama est contrainte de se défendre face à ces accusations. Début mars, Geoff Morrell, le porte-parole du ministère de la défense, a réfuté les critiques, après une visite à Quantico. "Il y a trente personnes dans un couloir en U, il n'est pas dans un trou, il n'est pas isolé des autres, il a le droit de parler avec les autres dans ce couloir."
Surtout, depuis le début de l'incarcération de Bradley Manning, les autorités agitent le même argument en permanence : si l'enfermement du soldat est si "spécifique", c'est pour le protéger de lui-même, pour prévenir tout risque de suicide.
[...] L'administration américaine commence à être sérieusement embarrassée par l'affaire. Pour avoir déclaré que le traitement infligé à Manning était "ridicule, contre-productif et stupide", le porte-parole du département d'Etat, Philip Crowley, a dû démissionner le 13 mars. Pour l'heure, le président Obama n'infléchit pas sa position : "Les conditions de détention sont appropriées et répondent aux règles habituelles." Parmi les soutiens du soldat incarcéré, beaucoup s'étonnent de voir le président américain, ancien professeur de droit constitutionnel, laisser l'affaire prendre une telle ampleur, maintenant qu'il est devenu chef des armées.
Mercredi 20 avril, Bradley Manning a quitté la prison militaire de Quantico pour rejoindre celle de Fort Leavenworth, au Kansas. Pour le Washington Post, cette décision est le signe d'une prise en considération des critiques. "Leavenworth est une prison plus appropriée et Manning devrait pouvoir bénéficier de trois heures de récréation quotidiennes et interagir avec les autres détenus." Le journal cite les propos du sous-secrétaire à l'armée, Joe Westphal : "Nous voulions juste lui trouver un endroit où son bien-être durant l'incarcération qui précède son procès serait le meilleur que l'on puisse lui offrir. C'est un soldat. C'est notre soldat. Et nous devons prendre en compte cet aspect."
[...] Dans les jours qui viennent, le soldat devrait subir "une évaluation en profondeur" de son état psychique. Ces examens pourraient se révéler déterminants car de l'avis de tous, Bradley Manning est une personne extrêmement fragile. Début février, le Washington Post avait révélé que le soldat avait été envoyé en Irak en dépit d'un avis défavorable rendu par un expert psychiatre, qui assurait qu'il souffrait de "problèmes de comportement". Et selon David Coombs, la santé mentale fragile du jeune homme avait inquiété ses supérieurs au point qu'ils décidèrent de désactiver son arme de service.
Le procès, dont la date n'est pas encore connue, ne devrait pas intervenir avant de longs mois. A ce moment-là, c'est un tout autre débat qui succèdera à la polémique actuelle : celui de la culpabilité ou non du soldat-hacker et, plus généralement, de WikiLeaks.
Pages: 1 · 2