Mot(s) clef: fureur
Furie, fureur
La furie de Mulhouse, Fury, de Lang, furie et fureur, par François Guizot, Le lynchage de précaution, etc...
Sur google books
Cinq mois de guerre
NDLR : Cinq mois de guerre, un ouvrage paru en 1916 ou 17, pour des discours politiques très divers, de tous bords, dont des prêches ou propos de pasteurs. Je vais passer commande d'ouvrages de Jean-Claude Farcy et de Emanuel Filhol, Les camps de concentration de la Première Guerre mondiale et Camp de concentration français : Crest 1915/1919. La feuille du Canard du 8 juillet, je l'ai trouvée ce 9, peu après l'audience, aux abords du tribunal de Nanterre, sur le trottoir ; un article pourra me servir de marque page.
Cinq mois de guerre
Février, mars, avril, mai, juin 1916
Ouvrage couronné par l'Académie Française
De Gaston Jollivet
Hachette & Cie
Page 104, lisible
Page 138, lisible
Collaboration
Voir aussi Le devoir de mémoire et La Cour : « les résultats d'une psychothérapie se font attendre »
Pour un peu d'histoire, voir également Après Kapo, Nuit et Brouillard
COLLABORATION, subst. fém., de source CNRTL extraits
A.− Participation à l'élaboration d'une œuvre commune. ...
B.− Spéc. [En France sous l'occupation allemande] Politique de coopération avec l'ennemi. La collaboration de Vichy avec l'Allemagne (De Gaulle, Mémoires de guerre, 1954, p. 472). Collaboration, résistance... l'embrouillamini habituel (A. Arnoux, Double chance, 1958, p. 150) :
Aymé, Uranus, 1948, p. 25.
− P. ext. L'ensemble des partisans de cette politique.
DESTRUCTION, subst. fém., de même source, extrait
Action de détruire; résultat de cette action. Destruction rapide, totale. Anton. construction.
SYNT. Destruction aveugle, massive, progressive, systématique; ferment de destruction; culte de la destruction; désir, fureur, instinct, rage, soit de destruction; avoir le goût de la destruction. ...
B.− Au fig.
1. Désorganisation d'un ensemble cohérent et organisé selon une structure déterminée (cf. renversement). Destruction de la famille, de la société; destruction d'un parti, d'un régime, d'un système...
2. P. ext. Action de faire disparaître totalement et résultat de cette action (cf. abolition, anéantissement, suppression). Être voué à la destruction; destruction des routines, des usages; destruction d'une théorie; destruction de la science. Consacrer l'art d'écrire à la destruction de la pensée (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 425)...
INJONCTION, subst. fém., de même source, extrait
Ordre, commandement précis, non discutable, qui doit être obligatoirement exécuté et qui est souvent accompagné de menaces de sanctions. ...
KAPO, subst. masc., extrait de même source...
[Dans les camps de concentration nazis] Détenu de droit commun qui était chargé de commander énergiquement les déportés, résistants ou raciaux, pour les services du camp ou pour les travaux extérieurs. Les maquereaux et les racketters de Varsovie et de Lodz étaient devenus policiers juifs dans les ghettos et kapos dans les camps (Le Nouvel Observateur, 26 oct. 1966, p. 39, col. 2). Innocents kapos de camps de concentration (Les Lettres fr., 23 févr. 1967, p. 16, col. 2)
Vacheries en toutes lettres
NDLR : Quoi faire d'un tel livre ?, Je prends le temps de la reflexion avant de passer commande. De nos jours, « casse toi », « salope » et « pauv'con », ça permet de prendre l'ascenseur ; traiter quelqu'un de « nain » suffit pour renvoyer l'ascenseur à la cave... 20 euro, ce sont plusieurs p'tits rouges au comptoir du coin. A entreposer pas loin du Petit musée des horreurs ? Voir aussi Grimm, le renard et le chat.
Une histoire des haines d'écrivains
de Boquel Anne, Kern Etienne
Flammarion, janvier 2009
Vacheries en toutes lettres
Article paru dans l'édition du Monde du 16.01.09, extrait
Entre eux, les écrivains pratiquent volontiers le renvoi d'ascenseur. Formule simple : A dit du bien de B, et B se répand en compliments sur A. Formule moins grossière : A dit du bien de B, qui se répand en compliments sur C, lequel n'arrête pas de s'extasier sur A... Cet échange de bons procédés n'a pas attendu l'invention de l'ascenseur : on le connaissait du temps où les gens de plume gravissaient encore à pied les chemins de la notoriété. Mais se pratiquait surtout l'envoi de vacheries en tout genre. Deux jeunes normaliens, Anne Boquel et Etienne Kern, enseignant respectivement à Paris-IV et à Paris-X, nous le racontent dans un livre délicieux, qui en dit long sur l'orgueil, la vanité et l'ego démesuré de nombreux littérateurs.
Chateaubriand ? C'est « un matamore de tragédie », selon Lamartine. Zola ? « Un incomestible pourceau », dit Léon Bloy. George Sand ? « Elle est bête, elle est lourde, elle est bavarde », assure Baudelaire, qui se demande « comment quelques hommes ont pu s'amouracher de cette latrine ».
Pourquoi tant de haine ? Parce que la haine « fait partie intégrant e de la condition de l'homme de lettres », affirment les auteurs. C'est, paraît-il, une loi intangible : « Les écrivains se construisent les uns contre les autres, et ce depuis que l'auteur de l'Odyssée, quel que soit son nom, a voulu faire mieux que celui de l'Iliade. » Appelez-la comme vous voulez : émulation, envie, jalousie... « La haine, quelque forme qu'elle revête, est au fondement de la création littéraire. Il n'est pas de confrère qui ne soit un adversaire potentiel. »
Attention, nous ne parlons pas d'aujourd'hui, où tout le monde s'aime...
Publié le 08/01/2009 - Modifié le 09/01/2009 - N°1895, Le Point, extrait
Je te hais, donc je suis...
Une édifiante histoire des médisances et de la cruauté en usage parmi les écrivains vient de paraître. De Hugo jusqu’à Proust-et au-delà...
C’est un principe paradoxal et infaillible : on ne hait bien, jusqu’à la fureur, que ce dont on se sent proche. C’est dire que les familles, les cénacles, les tribus sont meilleurs conducteurs de bile et de médisance que les ensembles disparates. Deux jeunes normaliens (50 ans à eux deux) viennent d’en administrer la preuve en déclinant cette hypothèse sur tous les registres du monde littéraire. Le résultat n’est pas triste : chez les écrivains-géniaux ou médiocres-, on se hait mieux qu’ailleurs. Et l’on y dispose à foison de l’éloquence, des théories, des lieux, des stratégies, des perfidies, qui aident-qui encouragent ?-les uns à vomir sur les autres.
23 juil. 2007, 7h00, Libé, extrait
Et si le gouvernement avait oublié de penser ?
Dans l'édition de lundi du journal «International Herald tribune», Bernard-Henry Lévy et Alain Finkielkraut raillent les propos de la ministre des Finances Christine Lagarde et les slogans du chef de l'Etat.
Péan contre les puissants
Bibliographie
Les livres polémiques de Pierre Péan
L'Express, publié le 04/02/2009 17:45 - mis à jour le 04/02/2009 19:12, extrait
Journaliste d'investigation et auteur à succès, Pierre Péan a signé une trentaine d'enquêtes et de biographies depuis les années 1970, toujours très fournies, souvent encensées, parfois polémiques.
Péan contre les puissants
L'Express, publié le 12/02/2009 14:39 - mis à jour le 13/02/2009 14:51, extraits
L'auteur du livre sur Bernard Kouchner est à nouveau au coeur d'une controverse. Chevalier blanc ou ange noir ? Portrait d'un enquêteur à part.
A 70 ans, Pierre Péan n'en finit pas de désobéir à sa mère. Toute sa jeunesse, le fils du coiffeur de Sablé-sur-Sarthe a enduré la rengaine d'un amour éteignoir : "Ne fais pas ton intéressant, Pierre !" C'est donc raté. Son dernier opus, Le Monde selon K. (Fayard), déchaîne un raffut de tous les diables. Les lecteurs s'arrachent ce brûlot où Péan reproche à Bernard Kouchner d'avoir bafoué son éthique.
A la télévision, François Fillon et Nicolas Sarkozy se posent en témoins de moralité du ministre des Affaires étrangères. Et voilà que le journaliste écrivain, accusé d'antisémitisme, se retrouve précipité dans les flammes du bûcher qu'il a lui-même dressé. Vieux lion de l'édition, le patron de Fayard, Claude Durand, jure n'avoir jamais vécu un tel safari : "Antisémite, Pierre ? Et pourquoi pas pédophile!"
Les animaux malades de la peste
La peste noire ou médiévale semble d'origine asiatique, partie des steppes russes et de la mer Caspienne. Elle touche la quasi-totalité de l'Europe et près des deux tiers de la population disparaissent. Son apogée se situe au milieu du XIVème siècle, mais elle se prolonge en poussées épidémiques dont celle de Marseille en 1720.
1894 - découverte du microbe.
1898 - découverte du mode de transmission.
1933 - invention du vaccin.
Pacush blues Paru en avril 1989 |
Mal que le ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre,
La peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom),
Capable d'enrichir en un jour l'Achéron,
Faisait aux animaux la guerre.
Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés :
On n'en voyait point d'occupés
A chercher le soutien d'une mourante vie ;
Nul mets n'excitait leur envie,
Ni loups ni renards n'épiaient
La douce et l'innocente proie ;
Les tourterelles se fuyaient :
Plus d'amour, partant plus de joie.
Le lion tint conseil, et dit : « Mes chers amis,
Je crois que le Ciel a permis
Pour nos péchés cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux ;
Peut-être il obtiendra la guérison commune.
Extrait de la première promenade
Sentiment des citoyens, 1764, extraits de source www.voltaire-integral.com...
Après les Lettres de la campagne sont venues celles de la montagne. Voici les sentiments de la ville: on a pitié d’un fou; mais quand la démence devient fureur, on le lie. La tolérance, qui est une vertu, serait alors un vice.
[...] Est-il permis à un homme né dans notre ville d’offenser à ce point nos pasteurs, dont la plupart sont nos parents et nos amis, et qui sont quelquefois nos consolateurs? Considérons qui les traite ainsi: est-ce un savant qui dispute contre des savants? Non, c’est l’auteur d’un opéra et de deux comédies sifflées. Est-ce un homme de bien qui, trompé par un faux zèle, fait des reproches indiscrets à des hommes vertueux? Nous avouons avec douleur et en rougissant que c’est un homme qui porte encore les marques funestes de ses débauches, et qui, déguisé en saltimbanque, traîne avec lui de village en village, et de montagne en montagne, la malheureuse dont il fit mourir la mère, et dont il a exposé les enfants à la porte d’un hôpital en rejetant les soins qu’une personne charitable voulait avoir d’eux, et en abjurant tous les sentiments de la nature comme il dépouille ceux de l’honneur et de la religion.
Extrait de la première promenade
LES REVERIES DU PROMENEUR SOLITAIRE, 1782
Jean-Jacques Rousseau
La diffamation, la dépression, la dérision, l'opprobre dont ils m'ont couvert ne sont pas plus susceptibles d'augmentation que d'adoucissement; nous sommes également hors d'état, eux de les aggraver et moi de m'y soustraire. Ils se sont tellement pressés de porter à son comble la mesure de ma misère que toute la puissance humaine, aidée de toutes les ruses de l'enfer, n'y saurait plus rien ajouter. La douleur physique elle-même au lieu d'augmenter mes peines y ferait diversion. En m'arrachant des cris, peut-être, elle m'épargnerait des gémissements, et les déchirements de mon corps suspendraient ceux de mon coeur.
Qu'ai-je encore à craindre d'eux puisque tout est fait? Ne pouvant plus empirer mon état, ils ne sauraient plus m'inspirer d'alarmes. L'inquiétude et l'effroi sont des maux dont ils m'ont pour jamais délivré: c'est toujours un soulagement. Les maux réels ont sur moi peu de prise; je prends aisément mon parti sur ceux que j'éprouve, mais non pas sur ceux que je crains.
Mon imagination effarouchée les combine, les retourne, les étend et les augmente. Leur attente me tourmente cent fois plus que leur présence, et la menace m'est plus terrible que le coup. Sitôt qu'ils arrivent, l'événement, leur ôtant tout ce qu'ils avaient d'imaginaire, les réduit à leur juste valeur. Je les trouve alors beaucoup moindres que je ne me les étais figurés, et même au milieu de ma souffrance je ne laisse pas de me sentir soulagé. Dans cet état, affranchi de toute nouvelle crainte et délivré de l'inquiétude de l'espérance, la seule habitude suffira pour me rendre de jour en jour plus supportable une situation que rien ne peut empirer, et à mesure que le sentiment s'en émousse par la durée ils n'ont plus de moyens pour le ranimer. Voilà le bien que m'ont fait mes persécuteurs en épuisant sans mesure tous les traits de leur animosité. Ils se sont ôté sur moi tout empire, et je puis désormais me moquer d'eux.
Il n'y a pas deux mois encore qu'un plein calme est rétabli dans mon coeur. Depuis longtemps je ne craignais plus rien, mais j'espérais encore, et cet espoir tantôt bercé tantôt frustré était une prise par laquelle mille passions diverses ne cessaient de m'agiter. Un événement aussi triste qu'imprévu vient enfin d'effacer de mon coeur ce faible rayon d'espérance et m'a fait voir ma destinée fixée à jamais sans retour ici-bas. Dès lors je me suis résigné sans réserve et j'ai retrouvé la paix.
« Publicité » et une nouvelle injonction : « Réagissez ! »
Le Livre noir de la pub : Quand la communication va trop loin
de Florence Amalou, chez Stock, 2001
Violences faites aux femmes : réagissez !
Créé le 02/10/08 - Dernière mise à jour à 9h28 - Europe 1 - Extraits
Les violences conjugales ont causé en 2007 la mort de 166 femmes en France. Soit près d'une victime tous les deux jours. Des chiffres en augmentation qui justifient le lancement d’une nouvelle campagne choc décliné dans les journaux sous formes de dessins. Objectif : inciter les victimes ou les témoins, directs ou indirects, de ces violences à réagir et à les dénoncer. ...
Un nouveau site internet est aussi lancé www.stop-violences-femmes.gouv.fr.
Publicité Il fait si bon dans la cuisine Ma femme est extraordinaire |
Quelques discours, le bon docteur et la naissance du récit noir
Deux dessins animés de Tex Avery sont des adaptations du conte. Notamment le fameux Red Hot Riding Hood. [...] En 2006, le groupe Evanescence sort un clip vidéo : Call me when you're sober (Appelle-moi quand tu seras dessaoûlé) dans lequel Amy Lee évoque une rupture. Le clip raconte l'histoire d'une jeune femme (le Petit Chaperon rouge) qui essaye d'échapper aux griffes du grand méchant loup. De source Wikipedia
Professeur Totem et Docteur Tabou, Nicole Claveloux, éditions Etre, 2006, page 15
Le diable assurément...
Naissance du récit noir
En 1558, Pierre Boaistuau publie Le Théatre du monde, premier manifeste français d'un humaniste angoissé qui rompt avec la vision optimiste des générations précédentes : « Mais, bon Dieu ! le diable s'est si bien emparé des corps et des esprits des hommes pour le jourd'hui et les a rendu si industrieux et ingénieux à mal faire... » [...] De fréquentes rééditions, des traductions en anglais ou en flamand, des adaptations et divers plagiats témoignent d'un succès immédiat. [...] Le monde représenté est un univers de cauchemar, envahi par la violence et le monstrueux, inversé par rapport aux codes alors en usage. L'individu est tout autant soumis aux « prodiges de satan » qu'à la terrible vengeance de Dieu. Faible, emporté par la fureur de ses passions, il se trouve dévoyé de sa nature divine.
Une histoire de la violence, Robert Muchembled, Seuil, 2008, p. 379
Le placement familial ; ses secrets et ses paradoxes,
Pierre Sans, L'Harmattan, 2006, p. 230
Septembre 2005 : un mois de prison avec sursis pour « Linlin »
Un mois de prison avec sursis pour « Linlin »
Libération, 16 septembre 2005, extrait
Il était poursuivi pour des nuisances sonores. L'interdiction de paraître dans la commune, requise par la procureure, n'a pas été prononcée. Alain Billault ignore toutefois encore s'il pourra remettre les pieds dans son village. En attendant, il est toujours à l'hôpital.
Société
L'agresseur d'un simplet de village sans remords au tribunal
En juillet 2005, Antoine De Souza avait frappé Alain Billaut, dit «Linlin», le laissant entre la vie et la mort. Seize mois avec sursis ont été requis.
QUOTIDIEN : Mardi 3 octobre 2006, extrait
C'est comme si tout le village avait cogné le simplet. Dans la nuit du 27 au 28 juillet 2005, une seule main a serré le manche de pioche qui se brise sur le crâne ensanglanté d'Alain Billaut, dit «Linlin», 39 ans. Mais à Maillé (Vendée), la majorité des 750 âmes approuve ce tabassage de sang-froid. Le maire a même organisé le soutien à l'agresseur, Antoine De Souza, et fait signer une pétition en mairie (Libération du 12 septembre 2005).
Biquette. Soudeur à carrure de rugbyman, Antoine De Souza, 42 ans, a échappé aux assises. Jeudi dernier, il s'est défendu sans exprimer de remords devant le tribunal correctionnel. D'un ton agacé plutôt, se disant victime de harcèlement, d'insupportables feux de paille humide et de chiffons trop près de la haie mitoyenne, excédé par la chaîne de la biquette qui claque ou les bruits de moteur la nuit. Ce soir-là, c'est la fumée et sa haie bousculée par une charrue qui l'ont mis hors de lui. La préméditation saute pourtant aux yeux des magistrats : De Souza a disséminé dans son jardin «trois ou quatre manches de pioche, pour se défendre». Contre son voisin, qui ne l'a jamais touché. «J'ai tapé dans la masse, a-t-il dit froidement au tribunal. Et, chaque fois qu'il voulait se relever, je l'ai frappé pour qu'il parte pas avant que les gendarmes le prennent. Oui, j'avais le pied dessus. Pas pour m'essuyer les pieds, juste pour pas qu'il s'en aille.»
La victime s'est vidée de son sang. Les pompiers l'ont récupérée de justesse. Les coups «extrêmement violents» ont provoqué un traumatisme crânien, deux incisives, une vertèbre et une côte cassées, la rate éclatée, des hématomes et contusions au ventre, aux jambes, dans le dos. Un médecin a repéré l'usage de plusieurs objets contondants. Une barre de fer, peut-être, mais on ne l'a pas retrouvée. Aux premiers cris, un autre voisin est sorti. Avec une fourche, pas pour appeler des secours.
Les jours suivants, quand Linlin était entre la vie et la mort, la famille De Souza est partie en vacances sans s'inquiéter. Aujourd'hui encore, le handicapé entend mal, souffre de vertiges, de problèmes d'équilibre et de vision, et porte de méchantes cicatrices en étoile sur le cuir chevelu. Après quatre mois avec un déambulateur, il a toujours besoin de soins. Une quinzaine de paroissiens trouvent encore de quoi se déchaîner, signant des attestations en justice qui minimisent les séquelles, disant que Linlin en rajoute, ne boite pas vraiment et n'a jamais les lunettes qu'il doit porter depuis sa sortie d'hôpital.
Sous tutelle. Linlin, dans le pays, on le connaît depuis seize ans. Il vit avec sa mère adoptive, qui l'a recueilli bébé. Avec son 1,80 m et ses 110 kilos, Alain Billaut a l'âge mental d'un gamin de 8 ans. Il est reconnu handicapé à 80 %, déficient mental et sous tutelle d'Etat. Au début, il a été bien accueilli. «C'était le "beda" du village, il jouait avec les enfants de "son âge", dit Anne Bayle, son avocate. Jusqu'au jour où, en se baignant avec eux, il a poussé un enfant qui ne savait pas nager, qu'on a pu repêcher aussitôt, mais la rumeur a démarré, prétendant qu'il avait voulu noyer sciemment un gamin. Il est devenu la bête noire du village.» ...
Enfant de l'assistance, Alain est sous tutelle, invalide à 80 %. A 38 ans, il ne sait pas vraiment lire, ni compter. Cela fait maintenant quinze ans qu'il habite le village avec Marinette Belloeil, qu'il appelle «maman». Marinette n'est pas administrativement sa mère adoptive, elle l'a recueilli à 3 mois. Devant la haine exacerbée du village, elle a lancé la procédure d'adoption.
Au village, c'est devenu un jeu. Quand ils le voient, les gens se moquent de lui, l'excitent. «Il a pourtant juste besoin d'être un peu considéré, qu'on lui parle d'humain à humain. Il ne connaît pas les codes sociaux, tempère Lionel Julien, seul conseiller municipal d'opposition. Ce n'est pas un demeuré, mais il n'a pas l'intelligence des situations. Il est naïf et ne comprend pas que la scierie puisse faire du feu et pas lui.»
Libération, le 12 septembre 2005, extraits
Dans la nuit du 26 juillet, à Maillé (Vendée), un petit village en plein Marais poitevin, un habitant a copieusement assaisonné à coups de barre de fer puis frappé au sol Alain Billault, dit Linlin, jusqu'à ce que les gyrophares des gendarmes arrêtent sa fureur. Tout cela devant deux voisins qui regardaient, la fourche à la main. Après ce passage à tabac entre voisins, l'ambulance a emporté une victime, la rate éclatée, le bras en hématome, les dents cassées, une cheville tuméfiée.
Pétitions. Linlin, c'est un peu le «simplet du village». Mais un «simplet» que le village déteste. Car, aussitôt l'affaire connue, un comité de soutien à l'agresseur s'est créé. Mené par le maire, Laurent Joyeux, contrôleur laitier à la retraite. Sans états d'âme, celui-ci défend l'agresseur : «Débordé par l'exaspération, il a fini par disjoncter.» Puis ajoute : «Il faut le protéger, lui et sa famille, tant que Billault ne respecte pas les règles de vie. Il rôde tous les soirs, à observer les étoiles qu'il dit. S'il continue avec son petit côté provocateur, je ne réponds de rien. Pensez il a même attaché son cheval aux portes de l'église et au monument aux morts.»
La pierre rejetée par les bâtisseurs
La culture c'est le choix de l'anachronisme, c'est décider que la visée suprême de l'humain ce n'est pas de vivre avec son temps • Alain Finkielkraut, « Répliques », 14 décembre 2002, sur France-culture
Finkielkraut: «L'enfant gâté a succédé à l'homme cultivé» • Alain Finkielkraut juge que des menaces pèsent sur la civilisation et s'inquiète de l'appauvrissement de la langue, donc de l'être. • Libé, samedi 26 janvier 2008
D'un interview d'Alain Bentolila publié en septembre 2005, sur le site du Défenseur des Enfants : « En 1980, le Premier Ministre répondait à l'OCDE : il n'y a pas d'illettrés en France, puisque l'enseignement est obligatoire dans notre pays. (...) Par la suite, une confirmation a été donnée avec le taux d'illettrisme parmi les allocataires du RMI - autour de 33% - et parmi les détenus en maison d'arrêt - autour de 3%. »
La pierre rejetée par les bâtisseurs
René Girard
Théologiques, vol. 13, n° 2, 2005, p. 165-179.
Sur , extrait
1. La signification de « bouc émissaire »
1.1 La polysémie de l’expression
L’expression « bouc émissaire » a trois significations qu’il importe de ne pas confondre. La première, la plus ancienne, traduit le terme hébreu qui, dans le chapitre 16 du Lévitique, désigne la victime d’un rite très ancien, le rite du bouc émissaire. Tous les ans, à Yom Kippour, le grand-prêtre posait les mains sur la tête d’un bouc. Ce geste était censé transférer à celui-ci tous les péchés de la communauté. Pour se débarrasser de ceux-ci, il ne restait plus qu’à chasser l’animal dans le désert, à faire de lui le bouc émissaire.
La seconde signification désigne tous les rites analogues à celui du Lévitique dans toutes les communautés humaines. Ce sont partout les mêmes efforts pour se défaire des désordres et des violences à l’intérieur de ces communautés, par l’intermédiaire de victimes animales ou humaines violemment expulsées ou massacrées. L’anthropologue qui le premier a repéré l’universalité de ces rites, c’est Frazer, dans Le rameau d’or (1890). Il leur a donné à tous la même étiquette : rites de bouc émissaire. Cette généralisation du rite hébreu est légitime dans la mesure où l’on n’en conclut pas, comme on le fait parfois, que ces rites ont quelque chose de spécifiquement biblique. Puisqu’ils se ressemblent tous, on peut recourir pour les désigner à n’importe lequel d’entre eux, et Frazer a choisi le plus connu. On pourrait aussi bien dire « rites de pharmakos », c’est-à-dire recourir au bouc émissaire grec plutôt qu’à l’hébreu. Si on ne le fait pas, c’est sans doute parce que le terme évoque quelque chose de plus sinistre que le bouc chassé dans le désert : le pharmakos était un être humain que les cités grecques massacraient rituellement lors des fêtes de Dionysos.
La troisième signification de « bouc émissaire » apparaît dans les langues occidentales au début de l’ère moderne. En français, comme en anglais, en italien, etc., on entend le plus souvent par « bouc émissaire » la victime d’une hostilité qui affecte une communauté entière contre un individu ou un groupe d’individus innocents, non-pertinents. Plus une communauté est perturbée, plus elle tend à décharger son angoisse contre des boucs émissaires dans ce troisième sens.
Société
Outreau : une sanction entre les lignes pour le procureur
Libé mercredi 30 juillet 2008, extraits
Barbe à l’index. Des boulettes judiciaires, Gérald Lesigne en a commis un paquet dans l’affaire Outreau. (...) Sauf que le procureur Gérald Lesigne n’était pas seul. (...) «On recherche une responsabilité individuelle à une défaillance collective», dénonce Me Léon-Lef Forster, avocat de Gérald Lesigne. (...) Devant le CSM, comprenant à retardement l’émotion générale, il avait humblement confié : «Je pensais avoir des certitudes raisonnables, elles se sont effondrées. Je me suis planté.» C’est quand même pas compliqué à dire.
Reportage
Les jumeaux maudits de Mananjary
LE MONDE | 05.09.08 | Extrait
Dina et Diari, 5 mois, entrelacent leurs doigts délicats. Allongés sur le dos, côte à côte, au centre d'un vieux lit à barreaux à la peinture écaillée, ces deux frères jumeaux fixent les visiteurs de leurs grands yeux noirs et brillants. Ils ont été recueillis par le Centre d'accueil et de transit des jumeaux abandonnés (Catja), à Mananjary, ville froide et humide de la côte sud-est de Madagascar, à 450 kilomètres de la capitale, Antananarivo. Il y a un siècle, leur crâne aurait été fracassé sous les sabots des zébus. Aujourd'hui encore, Dina et Diari sont jumeaux, donc maudits.
Petite digression
Voir aussi les actes du colloque L'évènement dans l'espace euroméditerranéen, Mémoire, Identité et Communication, septembre 2006, dans le cadre des 1ères journées scientifiques euroméditerranéennes.
Petite digression
un texte de Voltaire, probablement publié en 1766
Dans les commencements de la fondation des Quinze-Vingts, on sait qu’ils étaient tous égaux, et que leurs petites affaires se décidaient à la pluralité des voix. Ils distinguaient parfaitement au toucher la monnaie de cuivre de celle d’argent; aucun d’eux ne prit jamais du vin de Brie pour du vin de Bourgogne. Leur odorat était plus fin que celui de leurs voisins, qui avaient deux yeux. Ils raisonnèrent parfaitement sur leurs quatre sens, c’est-à-dire qu’ils en connurent tout ce qu’il est permis d’en savoir; et ils vécurent paisibles et fortunés autant que des Quinze-Vingts peuvent l’être. Malheureusement un de leurs professeurs prétendit avoir des notions claires sur le sens de la vue; il se fit écouter, il intrigua, il forma des enthousiastes: enfin on le reconnut pour le chef de la communauté. Il se mit à juger souverainement des couleurs, et tout fut perdu.
Resterait le sacrilège secret et qui n'aurait été vu par personne
La politique comparée
de Montesquieu, Rousseau et Voltaire
Par Emile Faguet (1847-1916)
Dans l'extrait qui suit, Emile Faguet se réfère à une lettre de Frédéric II, roi de Prusse, aux oeuvres complètes de Voltaire.