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Pédophilie : Caracas autorise l'extradition vers la France du fondateur de « L'école en bateau »
PARIS (AFP) - Le responsable d'un bateau-école qui proposait à des adolescents des croisières éducatives pour favoriser l'"épanouissement de l'enfant" et dont la justice vénézuélienne vient d'autoriser l'extradition vers la France, devra répondre d'accusations de pédophilie sur une quinzaine de mineurs.
Le tribunal suprême de justice (TSJ) du Venezuela a autorisé jeudi l'extradition de Leonid Kameneff, capitaine de l'ancien thonier "Karrek Ven" et fondateur de l'association "L'école en bateau" à l'origine de ces croisières. Les aventures des adolescents du "Karrek Ven" avaient fait l'objet d'émissions sur une chaîne publique dans les années 80.
Cet homme de 72 ans est soupçonné, selon la France, de "viols de mineurs de 15 ans avec abus d'autorité entre août 1979 et 1992", indique le TSJ dans un communiqué.
Fondateur de l'association, il prônait "l'épanouissement intellectuel, psychologique et social de l'enfant", a expliqué une source proche du dossier. "Il aurait encouragé les adolescents à vivre nu et à avoir des relations sexuelles entre eux ou avec des adultes", a-t-elle ajouté. Plus d'une centaine de jeunes ayant navigué sur le bateau-école alors qu'ils avaient entre 9 et 16 ans ont été entendus par les enquêteurs de la brigade des mineurs chargés de l'enquête.
Si une majorité d'enfants ont rapporté à la justice avoir "passé un séjour formidable" à bord du thonier, d'autres ont dénoncé l'aspect sectaire et ambigu de l'éducation pratiquée, selon une source proche du dossier. Ils ont notamment décrit des séances d'autocritique et d'accusation publique, des séances de massage ou de masturbation collective.
Une trentaine d'entre eux ont dénoncé des abus sexuels et 14 se sont constitués partie civile, les faits dénoncés par les autres étant prescrits. Les viols et agressions sexuelles auraient été commis lors de croisières de six mois à deux ans en Méditerranée, aux Antilles et au large du Venezuela.
Une première plainte visant le capitaine et son second avait été déposée en janvier 2003 au parquet de Fort-de-France (Martinique) qui avait désigné un juge d'instruction. D'autres victimes présumées se sont alors fait connaître.
En février 2006, la Cour de cassation a rapatrié le dossier à Paris à la suite d'une requête en suspicion légitime des parties civiles qui dénonçaient l'immobilisme du juge de Fort-de-France dans cette affaire.
La juge d'instruction Nathalie Dutartre, qui a repris le dossier, a émis le 25 mai 2007 un mandat d'arrêt international à l'encontre de Leonid Kameneff. Le second du bateau-école, Bernard Poggi, sous le coup d'un mandat d'arrêt délivré en décembre 2007, a été interpellé en janvier dans l'Est de la France, mis en examen "pour viols et agressions sexuelles sur mineurs de moins de 15 ans" par la magistrate et placé en détention provisoire.
M. Kameneff, dont l'avocat n'a pu être joint vendredi matin, a quant à lui été interpellé courant janvier à bord de son bateau dans le port de Cumana au Venezuela et placé sous écrou extraditionnel.
Pour Me Eric Morain, avocat des parties civiles, son extradition prochaine "est un immense soulagement" et "l'aboutissement d'un long combat". "On va pouvoir s'expliquer avec Kameneff, qui dit qu'il n'a jamais fui la justice mais qui refusait son extradition", a ajouté Me Morain.