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Le sort du procureur d’Outreau confié à la garde des Sceaux
Le sort du procureur d’Outreau confié à la garde des Sceaux • Le représentant du garde des Sceaux a requis hier le «retrait de fonction» accompagné d’un «déplacement d’office» de Gérald Lesigne.
QUOTIDIEN : vendredi 23 mai 2008, extraits
... S’agissant de poursuites disciplinaires contre un membre du parquet, l’avis du CSM est facultatif, la décision finale revenant à la chancelerie. Qui aura donc toute latitude pour prononcer la sanction qu’elle a requise hier. Toutefois, l’avis du CSM, qu’il transmettra le 18 juillet, pourrait entraver symboliquement ses plans.
... une procédure disciplinaire n’a pas vocation à sanctionner un magistrat pour avoir mal jugé - les contestations relèvent des juridictions habituelles. Lesigne n’est donc poursuivi que pour des «griefs» administratifs.
... Le président de la chambre de l’instruction a indiqué qu’il y «avait communauté de vues» entre tous les magistrats ayant eu à se pencher sur l’affaire. Mais le représentant de la chancellerie souhaite faire un exemple : «Je ne veux pas laisser dire qu’après Outreau, rien ne se serait passé.» Naïma Rudloff, magistrate et avocate de son collègue devant le CSM, dénonce une «collusion entre politique et justice».
Bémols. Reste ce rappel des notations de Lesigne au cours de sa carrière. Entre un florilège d’avis élogieux, deux présidents d’assises avaient émis des bémols dans les années 80. «En arrive à présenter comme certain ce qui n’est que probabilité, au risque de convaincre l’accusé lui-même» ; «tendance à solliciter la réalité des choses pour les faire coller». Et de prophétiser, vingt ans avant Outreau : avec Lesigne, «l’audience peut révéler des surprises».
Extrait de prdchroniques.blog.lemonde.fr :
“Le rapport administratif a une utilité essentielle. Il est LA source d’information du parquet général. Gérald Lesigne est un homme d’expérience. Il sait ce qu’est un rapport administratif. Or les siens ne sont pas d’une fiabilité totale, ils ne suivent pas au plus près les évolutions de la procédure (…) Ils continuent sur leur lancée (le réseau de pédophilie, le négoce de cassettes pornographiques) et selon la même méthode. Mais comme leur auteur est dans une relation de complète confiance avec son procureur général, c’est vrai, le regard critique de celui-ci s’éloigne. Mais le premier regard critique, c’est au procureur de le poser! (…)
A partir du moment où la piste du réseau belge s’écroule, où celle du meurtre de la fillette s’écroule aussi, je dis qu’il était temps de se poser des questions, de marquer un temps de pause, de tout remettre à plat. Ce temps de pause nécessaire n’a pas eu lieu. Instiller le doute dans la chaîne hiérarchique pouvait changer quelque chose. (…)
Alors oui, Gérald Lesigne a failli. En s’abstenant de suivre, avec un regard critique et soucieux de la manifestation de la vérité, une information judiciaire dans laquelle la manière de procéder du juge d’instruction - notamment dans les interrogatoires et les confrontations - était de nature à compromettre le rassemblement d’éléments à charge, mais aussi à décharge.
En transmettant au parquet général des rapports contenant des informations qui dénaturaient la réalité des faits de la procédure, montrant ainsi qu’à aucun moment, il ne s’était livré au travail d’analyse que requéraient l’importance du dossier et la gravité des charges pesant sur des justiciables dont 14 sur 18 clamaient leur innocence et allaient être finalement acquittés.
En manifestant son incapacité à se détacher d’une conviction ne reposant sur aucun élément objectif.
En n’établissant aucun rapport administratif pendant une période de plus de huit mois alors que la procédure avait connu des développements susceptibles de permettre une lecture reconsidérée des charges pesant sur la plupart des mis en examen”.
En conséquence, le Directeur des services judiciaires a demandé le “retrait des fonctions de procureur de la République et le déplacement d’office” de Gérald Lesigne.