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Chirurgie : éviter les « erreurs évitables »
Par Destination Santé
Destination Sante - Jeudi 26 juin, 11h30
Sécuriser les interventions chirurgicales, qui sont aujourd'hui à l'origine d'un à deux millions de morts chaque année dans le monde. Voilà le nouveau défi de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), qui publie une « check-list » à l'intention des équipes de blocs opératoires. Ce protocole fixe des normes de sécurité à respecter impérativement. Pour la première fois dans une forme écrite et officiellement promulguée…
Cette check-list définit trois phases, toutes applicables aux millions d'interventions chirurgicales pratiquées chaque année : avant l'induction de l'anesthésie, avant l'incision et enfin, avant la sortie du bloc. « Au cours de chacune de ces phases, un coordonateur devra confirmer que l'équipe a bien effectué toutes les tâches nécessaires avant de pouvoir continuer » précise l'OMS.
Ainsi au moment de l'anesthésie, devra-t-il vérifier que le site de l'intervention a bien été marqué et que les allergies connues du patient, notées et prises en compte. Il vérifiera aussi que les instruments, éponges et autres aiguilles ont été comptés avant la sortie du bloc opératoire. Ces points de contrôle, qui paraissent somme toute assez élémentaires, servent un objectif clair : réduire les erreurs chirurgicales, véritable plaie d'une médecine de plus en plus complexe. Aussi bien dans les pays développés que dans les pays les plus démunis, même si ces derniers ne concentrent que 3,5% des 234 millions d'interventions chirurgicales pratiquées chaque année dans le monde.
Les rares données épidémiologiques disponibles nous viennent des Etats-Unis. Et elles sont loin d'être rassurantes. Un rapport de l'Institut de Médecine (IOM) publié en 1999, révélait ainsi qu'entre 44 000 et 98 000 Américains perdaient la vie chaque année en milieu hospitalier, suite à des « erreurs évitables »… C'est dire l'ampleur du phénomène !
« Il faut une évolution des mentalités »
Mais pour le Pr Jean-Jacques Guilbert, qui fut responsable à l'OMS de la formation des personnels de santé (1966-01988), la check-list de l'Organisation n'est pas encore vraiment à la hauteur de l'enjeu : « Renforcer les contrôles en salle d'opération c'est bien, mais c'est bien avant l'entrée en salle d'opération qu'il faudrait vérifier les compétences professionnelles. Un processus ayant un plus haut niveau de validité de certification des médecins reste à mettre en œuvre avant de leur donner le droit d'exercice. Il permettra ainsi de réduire efficacement les décès évitables. Pour cela il faut une évolution des mentalités ».
C'est donc bien en amont que les efforts devraient être concentrés. « C'est une des priorités absolues. Il faut être sûr que tous les praticiens soient performants, ce dont l'on peut douter puisque l'OMS parle d'erreurs évitables ! Aujourd'hui, seules les connaissances théoriques des praticiens sont contrôlées. Ce n'est évidemment pas suffisant. Leurs compétences professionnelles (intellectuelles, pratiques et de communication avec les patients) doivent aussi être évaluées » poursuit Jean-Jacques Guilbert. « En revanche le fait que l'OMS s'intéresse à ce fléau est une bonne chose. Il faut en parler car notre silence tue chaque année des millions de victimes ». Il s'agit d'un sujet d'importance, sur lequel Destination Santé sera évidemment amenée à revenir.
Source : OMS, Lancet, 25 juin 2008, interview du Pr Jean-Jacques Guilbert, 24 juin 2008