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Italie : Berlusconi veut remettre les magistrats au pas
ROME (AFP) - Fort de son immunité pénale, qui a été votée mardi soir définitivement par le Sénat, le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi paraît bien décidé à remettre les magistrats au pas avec une grande réforme de la justice annoncée pour l'automne.
Le projet de loi a été voté par 171 sénateurs, 128 ont voté contre et six se sont abstenus, un résultat qui rend son adoption définitive après le vote des députés intervenu le 10 juillet dernier.
Cette loi permettra à Berlusconi, poursuivi une dizaine de fois mais jamais condamné définitivement, de ne plus être inquiété par les juges pendant la durée de son mandat de 5 ans.
Son procès actuellement en cours à Milan (nord) pour corruption de témoin sera suspendu.
"Aux critiques qui ont mis en cause la rapidité avec laquelle ce projet a été présenté", peu après le retour au pouvoir à la mi-mai du Cavaliere, "je réponds que ce texte n'est ni trop prématuré, ni trop tardif, il est juste", avait argumenté le ministre de la Justice Angelino Alfano plus tôt dans la journée lors du débat qui a précédé le vote.
L'opposition a dénoncé comme un "privilège" un texte qui suspend les poursuites judiciaires contre les quatre plus hauts responsables de l'Etat - président de la République, chef du gouvernement, les présidents des deux chambres - mais qui intéresse avant tout Silvio Berlusconi.
L'immunité s'appliquera pendant la durée d'un seul mandat, excluant par exemple le cas où le chef du gouvernement deviendrait président de la République, une ambition que la presse prête régulièrement à Silvio Berlusconi (71 ans).
Fort de cette protection qu'il n'avait pas réussi à obtenir au cours de ses deux précédents gouvernements, le Cavaliere a annoncé une réforme en profondeur de la Justice à la rentrée.
L'objectif est d'accélérer le cours des procès, parmi les plus longs en Europe, mais aussi de s'attaquer aux pouvoirs des magistrats, jugés excessifs par une classe politique, traumatisée par l'opération anti-corruption "Mani Pulite" qui a vu la mise en cause de dizaines d'élus au début des années 90.
"Cette fois, Berlusconi est absolument décidé à aller jusqu'au bout. C'est une priorité personnelle, après il passera aux autres dossiers. Il veut aller vite en profitant de l'état de grâce dont il bénéficie encore et de la décomposition de l'opposition", estime le politologue Marc Lazar, spécialiste de l'Italie.
Une réforme de la composition du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), l'organe suprême de la profession inquiète plus particulièrement les juges qui n'y seraient plus majoritaires, leur nombre étant réduit au profit des personnalités élues par le Parlement.
"Le CSM nomme les juges et gère leurs carrières. Modifier sa composition est dangereux et déboucherait sur une perte d'indépendance", déclare à l'AFP Edmondo Brutti Liberati, l'ancien président de l'Association nationale des magistrats (ANM), principal syndicat de la profession.
Pour la droite au pouvoir, le CSM est avant tout un organe corporatiste axé sur la seule protection de la profession.
Récemment traité de "cloaque" par le sénateur de droite Maurizio Gasparri, il est présidé par le chef de l'Etat.
Alors que les magistrats italiens jouissent d'une indépendance totale, y compris au parquet, un héritage de l'après-guerre qui a voulu prévenir les dérives de l'époque fasciste, le gouvernement a également l'intention d'établir des priorités dans les infractions devant être poursuivies pour unifier la politique pénale.
"Il y a incontestablement un désir de reprise en mains", conclut l'ancien président de l'ANM, une situation favorisée par la propagande de Berlusconi contre les juges "rouges" mais aussi par "la crise d'efficacité" de la justice, reconnaît-il.