« Le sujet était le suivant : « Racontez une histoire heureuse ou triste » | Il pensait avoir des certitudes raisonnables, elles se sont effondrées » |
Les avocats de Kerviel annoncent une enquête au long cours
PARIS (Reuters) - Les avocats de l'ex-trader de la Société générale Jérôme Kerviel entendent demander de nombreuses investigations afin d'éclaircir le rôle de la banque dans les opérations ayant conduit à une perte de 4,9 milliards.
"Jérôme Kerviel avait le sentiment que tout n'avait pas été dit. L'affaire Société générale n'a pas encore commencé", a dit Me Bernard Benaiem, l'un de ses nouveaux avocats, à la presse.
"La recherche de la vérité n'est pas de l'agressivité", a-t-il ajouté, précisant que ses interrogations concernaient bien la banque et non seulement ses cadres.
"Il faut savoir s'il y a eu complaisance, ignorance fautive, complicité par fourniture d'instructions et de moyens", a-t-il dit. La stratégie sera conduite par quatre avocats, Francis Tissot, Bernard Benaiem, Caroline Wassermann, et Eric Dupond-Moretti. Depuis la semaine dernière, un cinquième, Eric Hemmerdinger, a quitté le dossier. Le sixième, Guillaume Selnet, est en discussion avec son client, dit Me Benaiem.
Les avocats pouvant demander des investigations aux deux juges d'instruction et faire appel en cas de refus, et l'instruction devrait donc se prolonger durant des mois, voire des années. Les juges Renaud Van Ruymbeke et Françoise Desset envisageaient de terminer cet été la procédure.
Lundi prochain, un nouvel interrogatoire de Jérôme Kerviel est programmé chez les juges, ont dit les avocats.
Libéré le 18 mars dernier de prison après 38 jours de détention, Jérôme Kerviel est le seul mis en examen de cette affaire pour "faux, abus de confiance" et intrusion informatique.
Il a reconnu lors de l'instruction avoir pris des engagements de 50 milliards d'euros, donc bien au-dessus des 125 millions d'euros théoriquement autorisés, tout en les dissimulant par des faux, mais a assuré que cette pratique était courante et que sa hiérarchie fermait les yeux.
Des investigations à la banque et des témoignages, notamment d'employés du "gendarme" financier du marché de produits dérivés Eurex, ont montré que les procédures de contrôles avaient été défaillantes.
Le 4 juillet, la Commission bancaire a infligé une amende de 4 millions d'euros à la Société générale pour défaut de contrôle, mais cet élément n'entraine pas nécessairement de poursuites pénales.
Les enquêteurs doivent mettre au jour un acte positif pour constituer une complicité. Selon un haut magistrat qui n'a pas souhaité être nommé, les enquêteurs entendent cependant s'intéresser à certains cadres proches du service où travaillait le trader, qui font l'objet de procédures de licenciement.
La nouvelle équipe d'avocats insiste sur le fait que c'est la banque qui a provoqué la perte de 4,9 milliards d'euros en liquidant entre le 21 et 23 janvier, en plein "krach" boursier mondial, les engagements du trader. "Nous voulons connaitre le périmètre et les conditions de ce débouclage", a déclaré Me Wassermann.