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Familles recomposées : vers un statut du beau-parent
Familles recomposées : vers un statut du beau-parent
Le Figaro, 28/11/2008 | Mise à jour : 19:52
Les associations s'inquiètent de l'avant-projet de loi qui devrait être présenté rapidement en Conseil des ministres.
Plus d'un an après le lancement du projet, à l'été 2007, le statut du beau-parent continue à créer la polémique. L'avant-projet consolidé sur «l'autorité parentale et le statut du tiers», préambule au texte qui devrait être présenté en Conseil des ministres fin décembre ou courant janvier, est encore loin de faire l'unanimité.
En novembre, plusieurs associations reçues par les cabinets du ministre de la Justice, Rachida Dati, et du secrétaire d'État à la Famille, Nadine Morano, ont commenté le texte. Tous les acteurs concernés - associations familiales, homoparentales, de beaux-parents - ont en outre transmis leurs observations par écrit. Il faut dire que ce sujet qui touche à la famille a mis les sensibilités à vif. Institution qu'il convient de protéger pour les uns ou qu'il est urgent de moderniser pour les associations de couples homoparentaux : les visions s'affrontent.
Dominique Versini, défenseure des enfants, qui avait proposé d'instaurer un statut du beau-parent, se dit satisfaite de voir ses propositions reprises. Le premier article du projet consacre le droit de l'enfant à entretenir des relations avec le tiers qui a résidé avec lui et l'un de ses parents et avec lequel il a noué des liens affectifs étroits. Un alignement sur le droit qui lui est déjà reconnu à entretenir des relations avec ses ascendants dans le Code civil. «Le tiers est mis au même rang que les ascendants», critique Chantal Lebatard, responsable du droit de la famille à l'Unaf (Union nationale des associations familiales). À l'inverse, l'APGL (Association des parents gays et lesbiens) approuve cet article et salue «une définition suffisamment large pour englober le partenaire de même sexe». Cependant, l'APGL regrette que l'exposé des motifs - «note d'intention» de la loi - «ne mentionne que les “beaux-parents”, renvoyant ainsi au régime juridique du mariage - et donc seulement aux hétérosexuels».
Nicolas Sarkozy, à l'origine du projet, avait clairement indiqué dans ses promesses de campagne qu'il s'agissait d'un statut destiné «aux couples de même sexe» et «aux familles recomposées», rappelle-t-on à l'Inter-LGBT (Inter associative lesbienne, gaie, bi et trans). L'association n'est donc pas inquiète. «La notion d'homoparents devra de toute façon être explicitée lors des débats parlementaires», prévoit l'association.
«Effets pervers»
De leur côté, les associations de défense des droits des pères et de la coparentalité soutiennent également le principe du projet mais craignent des «effets pervers». «Cette mouture n'envisage un statut que pour des personnes ayant partagé la vie de l'enfant, s'inquiète Gérard Révérend, président de l'association LPLM (Les papas les mamans). Les mères étant beaucoup plus nombreuses à obtenir la garde des enfants et à vivre avec eux, cela équivaut à créer un droit du beau-père.»
Le troisième article du texte a cependant pour objet de rassurer les parents inquiets de voir leur enfant leur échapper en instaurant la possibilité pour les juges aux affaires familiales d'infliger une astreinte à la charge du parent qui ne respecte pas les modalités de résidence de l'enfant.
Enfin, le texte élargit les possibilités de partage de l'autorité parentale. Si certaines dispositions pratiques, comme l'autorisation d'un tiers à effectuer des actes de la vie usuelle, ne semblent froisser personne, d'autres sont vilipendées par l'Unaf. Ainsi une des dispositions centrales du texte qui concerne les «conventions de partage de l'exercice de l'autorité parentale».
Les parents pourraient en effet saisir le juge aux affaires familiales, afin de faire homologuer la convention par laquelle ils organisent la délégation et le partage de tout ou partie de l'exercice de cette autorité avec un tiers. Aujourd'hui, seul un jugement permet le partage de cette autorité. «C'est un début de transformation en profondeur de l'idée même de famille», selon l'Unaf, qui redoute l'avènement d'une nouvelle «filiation sociale».