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Charlie hebdo sort "Charia hebdo"… et brûle
OLJ/Agences | 02/11/2011
France. Incendie criminel au siège parisien de l'hebdomadaire satirique.
Le siège de l'hebdomadaire satirique Charlie hebdo a été détruit mercredi par un incendie criminel. Cet incendie, accompagné d'un piratage du site internet du journal, survient alors que Charlie hebdo publie aujourd’hui un numéro spécial rebaptisé "Charia hebdo" avec, à la Une, une caricature de Mohammad hilare. Le Prophète de l'islam qui est, en outre, fait "rédacteur en chef" de ce numéro afin de "fêter la victoire" du parti islamiste Ennahda en Tunisie.
L'incendie, que le journal attribue à des activistes islamistes, s'est déclenché "aux alentours de 01H00" au 62 boulevard Davout (XXe arrondissement), est "maîtrisé et n'a fait aucun blessé", a-t-on indiqué de source policière. "Il n'y a pas d'interpellation", a-t-on ajouté, tout en évoquant la piste d'un jet de "cocktail molotov" pour expliquer l'origine de l'incendie. "L'enquête devra le confirmer", a-t-on souligné.
Evoquant un "attentat", le ministre de l'Intérieur Claude Guéant a estimé qu'il ne fallait "pas négliger" la piste de musulmans intégristes.
Selon un journaliste de l'AFP, le rez-de-chaussée et le premier étage du bâtiment sont brûlés et noircis. L'incendie a "tout détruit, tout le rez-de-chaussée, où la rédaction est installée, a brûlé", a témoigné le médecin urgentiste et chroniqueur Patrick Pelloux. "C'est dramatique, tout est foutu", a-t-il ajouté.
"Si on devait faire un journal aujourd'hui, je ne sais pas si on pourrait le faire. Le poste de maquette a brûlé, il n'est plus du tout fonctionnel, il y a de la suie partout, les ordinateurs sont à mon avis morts, le système électrique a fondu", a précisé le directeur de la publication, le dessinateur Charb. "Un tiers du journal ne ressemble plus à rien".
Patrick Pelloux a dit sur place à l'AFP que le cocktail molotov aurait été lancé "sur la devanture et mis le feu au système informatique". "La police nous dit que deux personnes ont été vues en train de partir peu de temps avant le déclenchement de l'incendie", a précisé le directeur de la publication, le dessinateur Charb.
Malgré l'incendie, l'édition de ce mercredi sera bien dans les kiosques, a confirmé Charb. Pour lui, le sinistre est directement "lié" à la publication de ce mercredi. "Sur Twitter, sur Facebook, on a reçu pas mal de lettres de protestation, de menaces, d'insultes", que la direction du journal s'apprêtait à transmettre à la police, a-t-il expliqué. Et sur internet, peu avant 07H30, la page d'accueil du site du journal laissait apparaître une photo de la mosquée de La Mecque en plein pèlerinage, avec ce slogan : "Not god but Allah" ("Pas d'autre Dieu qu'Allah"), a constaté l'AFP. "Les islamistes ont pris notre site internet", a réagi M. Pelloux.
Le journal avait déjà reçu des menaces lors de la publication des caricatures de Mohammad en 2006, mais le numéro de ce mercredi "n'a pas la même portée, c'est plus déconnant qu'autre chose", et seule la couverture avait été diffusée au moment de l'incendie, "pas le contenu" du journal, a souligné Charb.
En Une du journal, un dessin représente Mohammad hilare, avec ces mots : "100 coups de fouet, si vous n'êtes pas morts de rire!". Le journal avait expliqué son choix lundi par sa volonté de "fêter dignement la victoire d’ Ennahda en Tunisie et la promesse du président du CNT (Conseil National de Transition libyen, ndlr)) que la charia serait la principale source de législation de la Libye".
"La provocation, on la fait toutes les semaines. On a fait notre boulot. On est aussi un journal d'actualité (...). On a décidé de traiter ce qui se passait en Tunisie et en Libye. On a fait de l'humour à la Charlie hebdo. Il n'y a aucun dessin avec le prophète avec une bombe dans le turban", il est simplement présenté comme "un mec rigolard", a argué Charb sur la radio Europe 1.
Dans une déclaration à l'AFP, la rédaction de Charlie hebdo a assuré "être contre tous les intégrismes religieux, mais pas contre les musulmans pratiquants". "Nous sommes pour le printemps arabe, contre l'hiver des fanatiques", a-t-elle ajouté.
Cet acte a été unanimement condamné en France.
Le Premier ministre François Fillon a fait part de son "indignation" et demandé que "toute la lumière soit faite". Le candidat socialiste à la présidentielle de 2012 François Hollande a déclaré qu'"aucune atteinte à la liberté de la presse ne peut être acceptée".
Le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui, a "condamné fermement" cet acte, s'il est confirmé qu'il est criminel.
Le quotidien de gauche Libération a invité les journalistes de Charlie hebdo a venir s'installer dans ses locaux pour préparer leur prochaine édition.