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Agnès inhumée, Le Chambon-sur-Lignon tente de tourner la page
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HAUTE-LOIRE. Agnès inhumée, Le Chambon-sur-Lignon tente de tourner la page
Publié le 27/11/2011 à 06:00, le Progrès
Alors que les obsèques d’Agnès assassinée la semaine dernière ont eu lieu hier, Le Chambon-sur-Lignon veut regarder l’avenir. Sans oublier.
Ils n’oublient pas, mais veulent tourner la page de cette affaire douloureuse. Trop lourde à porter pour un si petit village.
Au Chambon-sur-Lignon, une semaine après « l’affaire Agnès », les villageois aspirent à retrouver leur sérénité. À passer à autre chose. Ils ne veulent plus parler de ce crime, tellement sordide que personne n’aurait jamais imaginé que cela puisse un jour se produire ici, au pays des Justes. Une terre qui a construit toute son image autour de l’accueil et de la tolérance. Autour de l’ouverture. Autant de symboles aujourd’hui mis à mal par une affaire qui n’appartient plus au village mais qui est devenue affaire d’État.
Alors, au Chambon, on fait en sorte que la vie reprenne ses droits. Hier matin, c’était jour de marché. Comme tous les samedis. Une vingtaine de forains étiraient leurs étals sur la place centrale, le long de la route de Saint-Agrève. Le ciel était bas, le fond de l’air était froid. Et les esprits étaient encore en berne. Dans les conversations, on parle de tout. Et de rien. D’Agnès, mais pas seulement. Parce qu’ici, les habitants ne veulent plus remuer ces mauvais souvenirs. « Vous vous rendez compte ? », demande Thérèse, 78 ans. « Ce qui s’est passé, c’est vraiment épouvantable. Il n’y avait pas besoin d’en rajouter. De créer des polémiques, d’étaler tout ça… ». Un discours sur lequel s’accorde le libraire de la route de Tence. « Ouh là là ! Cette affaire-là, c’est terrible ! Les gens, maintenant, veulent tourner la page. Ils essaient de ne plus parler de ça, de discuter d’autre chose ». Comme pour sortir de la chape de plomb qui s’est abattue sur le village vendredi dernier. C’était le soir de la découverte du corps d’Agnès dans les bois près du lieu-dit « Beaujeu ». Juste au-dessus de la route qui conduit à Tence par l’itinéraire touristique. Ce soir-là, tous les espoirs se sont éteints. Le Chambon est tombé dans la tristesse.
« Aujourd’hui, les habitants demandent le silence et le recueillement. Mais aussi le respect. Il y en a assez ! Tout a été dit », s’écrie Éliane Wauquiez-Motte, maire de la petite commune de 2 800 habitants. La semaine dernière, pour épargner la famille et les enquêteurs, elle acceptait toutes les interviews. Elle en a donné des dizaines, a répété cent fois la torpeur dans laquelle ce drame avait fait basculer sa commune. Reste qu’au Chambon, sur les devantures des dépositaires de presse, les unes et affichettes de tous les magazines rappellent le drame qui, une semaine auparavant, s’est joué dans les bois, à la sortie du village. Chacun reprend les témoignages des habitants du plateau.
En fond, il y a cette image qui servait à illustrer les avis de recherche jusqu’à vendredi dernier, et qui, depuis, hante toutes les mémoires : Agnès, adolescente de 13 ans, cheveux ondulés, tenant le guidon d’une trottinette à la main. L’image d’une jeune fille innocente dont la vie s’est arrêtée cruellement, à l’aube de son anniversaire, dans cet internat de Haute-Loire. Agnès aurait eu 14 ans hier.
Rémi Barbe
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