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La justice déballe les cadeaux faits à des magistrats
Annecy
Des juges très gâtés
Par Gilles Gaetner, publié le 09/10/2008, l'Express, extrait
Pendant des années, des magistrats du tribunal ont reçu argent et cadeaux. La justice ne s'est pas pressée pour enquêter. Elle va enfin instruire l'affaire.
Quelques voyages d'agrément à l'étranger. Un vélo à 19 000 francs. Un chèque de 22 000 francs. Deux autres de 4 000. Un Caméscope. Certains juges du tribunal d'Annecy (Haute-Savoie) ont été sacrément choyés entre 1995 et 2001. Pendant des années, la justice a mollement enquêté sur ces dérives. Aujourd'hui, elle décide de tout reprendre à zéro. Deux juges d'instruction de Lyon, Jean-Pierre Berthet et Thierry Soulard, viennent d'être désignés.
L'homme à l'origine de la dénonciation de ce scandale, dévoilé par Marianne, est un ancien agent d'assurances, Fernand Vogne, jadis installé à Annemasse (Haute-Savoie). Depuis plus de trente ans, il affronte les magistrats. En 1977, il écope de sa première condamnation : six mois de prison avec sursis pour abus de confiance. En août 1980, le voici accusé d'avoir pillé et déménagé tout seul un coffre-fort qui se trouve dans une maison de son village. « Impossible, plaide-t-il, ledit coffre-fort pèse 152 kilos. » On ne le croit pas. Il part pour cinq mois en prison, avant d'être blanchi.
25/02/2009, www.libelyon.fr, extrait
La justice déballe les cadeaux faits à des magistrats
JUSTICE - Depuis quelques mois, des magistrats lyonnais enquêtent sur certains de leurs collègues de Haute-Savoie, accusés de corruption. Fernand Vogne (63 ans), victime d’une erreur judiciaire dans les années 80, les accuse d’avoir touché des cadeaux et de l’argent d’un mandataire judiciaire qui l’aurait «spolié» (Libération du 9 septembre 2008). Une première enquête préliminaire avait été soigneusement étouffée en 2004. Mais une plainte avec constitution de partie a imposé une instruction, et l’on n’en finit plus de découvrir les largesses que s’octroyait la justice haut-savoyarde dans les années 90...
[...] Lorsqu’une information judiciaire a enfin été ouverte, en 2007, un juge déclare prescrit l’essentiel des faits reprochés à ses collègues. Cela ulcère François Saint-Pierre, avocat de Fernand Vogne. «En matière financière, rappelle-t-il, le délai de prescription ne court qu’à partir du moment où la justice a connaissance des faits. C’est du moins ce que l’on applique pour les affaires concernant des élus.» A Annecy, la justice a considéré que les faits, remontant plus de trois ans avant la plainte de Fernand Vogne, étaient prescrits. Et il a fait appel un jour trop tard.
Quelques faits restent cependant instruits.
Corruption: des magistrats sauvés par la prescription
Par Gilles Gaetner, publié le 21/01/2009 11:17 - mis à jour le 21/01/2009 12:04, l'Express, extrait
Un chef d'entreprise a réussi à mettre au jour une affaire de corruption impliquant des magistrats dans les années 90. Ceux-ci auraient bénéficié de cadeaux offerts par les tribunaux de Haute-Savoie.
Ils sont une quinzaine de magistrats en poste dans les années 95-97 aux Tribunaux d'Annecy, Bonneville et Thonon-Les-Bains (Haute-Savoie) à avoir eu chaud. Très chaud. Grâce à la lenteur de la justice et la prescription, ils ont échappé à des poursuites pour corruption. Une de leurs collègues, désormais conseillère à la Cour d'appel de Douai n'a pas eu cette chance: elle a été entendue le 11 décembre dernier comme témoin assistée par deux juges de Lyon. Il lui est reproché d'avoir reçu deux chèques de 500 francs d'un administrateur provisoire très influent de la Haute-Savoie, Robert Meynet. Un petit "cadeau" non prescrit...
Cette affaire, symptomatique d'une pratique faisant fi de la déontologie, qui a secoué la magistrature locale, n'aurait sans doute jamais été ébruitée sans la ténacité d'un chef d'entreprise, ex-agent d'assurances installé à Annemasse, Fernand Vogne. Depuis plus de trente ans, il affronte la justice avec des fortunes diverses.
[...] Estimant, à juste titre, qu'il est malsain qu'un juge enquête sur les collègues de son tribunal, le procureur général de Chambéry demande à la cour de cassation la délocalisation du dossier. Le 18 juin 2008, le tribunal de Lyon est chargé d'instruire cette affaire pour corruption, escroqueries, faux, obstacle à la manifestation de la vérité et déni de justice. Si, sur les trois premiers points, Mes François Saint-Pierre et Gilles -William Goldnadel, les conseils de Fernand Vogne, ne se font guère d'illusion en raison d'un dossier vidé de sa substance pour cause de prescription, ils espèrent que sur le déni de justice, ils parviendront à convaincre les magistrats instructeurs...