« Monsieur le président, par Eva Joly | Hormones de croissance : « des donneurs de mort impunis » » |
Objection, monsieur le président Sarkozy !
NDLR : Cette lettre ouverte serait parvenue à la chancellerie à la fin 2006, « pour un examen approprié auprès des services judiciaires compétents »... réponse à la noix : « débrouillez vous avec Nanterre et Versailles. »
14/01/2009, Libé Orléans, extraits
Sarkozy à Orléans: président protecteur et chantre de l'autopromotion
Pour Nicolas Sarkozy, «l’insécurité est la première des inégalités». Il l’a dit et répété. Et lui est là pour «protéger» les Français des affres de l’insécurité, tout comme il les protège «contre les méfaits de la crise financière» et «contre la crise économique et sociale qui en a découlé». Il protège également «leur santé avec la loi sur l’hôpital», mais aussi leurs «libertés individuelles en lançant une réforme de la procédure pénale». Et enfin, le président ne peut s’exonérer de «protéger la paix» dans le monde en proposant aux belligérants Proche orientaux un plan «équilibré».
[...] Obligé par l’actualité récente, le président est revenu sur le placement en garde à vue et l’incarcération des deux policiers de la brigade des stups d’Orléans soupçonnés de trafic de stups (LibéOrléans du 11 janvier 2009). «Ces actes sont d’une gravité extrême et ils doivent être sanctionnés. Il ne s’agit pas que de problèmes individuels. Ces actes salissent vos uniformes !», a-t-il lancé au parterre de policiers et gendarmes massés entre les huiles essentielles (députés, élus locaux, cadres UMP...), dans l’antre du gymnase surchauffé de l’unité de gendarmerie d’Orléans.
Objection, monsieur le président !
LE MONDE | 14.01.09 | 14h21 • Mis à jour le 14.01.09 | 20h09, extraits
Trois juges. Trois magistrats chargés d'instruire des dossiers, de débusquer la vérité. Ils n'ont pas les mêmes affectations. Deux se heurtent, dans leurs enquêtes, à la raison d'Etat. Le 7 janvier, ils ont écouté le président de la République, Nicolas Sarkozy, et sa réforme de la justice visant à supprimer les juges d'instruction - inamovibles et indépendants - pour donner au parquet - dépendant du ministère de la justice - les pleins pouvoirs. Ils n'ont pas aimé. Ils s'inquiètent pour le justiciable, assurent que si le parquet détient seul l'opportunité des poursuites, il n'ira jamais défier le pouvoir. "L'indépendance du parquet est un faux problème, répond le procureur de Paris, Jean-Claude Marin. La loi permet aux procureurs d'être indépendants, s'ils le sont dans leur tête. En revanche, il faut un contre-pouvoir à l'opportunité des poursuites." Cette réforme n'est qu'un projet, mais elle vient bousculer le corporatisme d'une magistrature peu encline à évoluer. Les juges d'instruction ne sont pas exempts de reproches. Ils commettent aussi des erreurs, s'endorment parfois sur leurs dossiers, ou abusent de leurs pouvoirs. On veut les supprimer ? Ils s'expriment.
[...] Sophie Clément gère une quarantaine de dossiers dans son cabinet, au pôle financier parisien. Juge d'instruction depuis quatorze ans, elle a failli mettre en péril les relations diplomatiques de la France avec Djibouti, dans le cadre de l'affaire Borrel - un magistrat retrouvé mort à Djibouti en 1995 -, qu'elle instruit. Elle s'inquiète, et le dit : "Museler les juges, c'est un fantasme d'homme politique."
[...] Et elle ne croit pas en un parquet volontariste, qui irait défier les pouvoirs publics. "Avec le système préconisé par Nicolas Sarkozy, l'affaire du sang contaminé n'aurait pas existé, l'affaire Elf non plus. Il n'y aurait plus de constitution de partie civile, cette procédure qui a donné naissance à la plupart des affaires politico-financières. Il faudrait que le parquet soit masochiste et schizophrène pour lancer des poursuites qui pourraient nuire à la raison d'Etat, estime la juge Clément. On ne peut demander à un procureur de se suicider professionnellement. Prenez l'Angolagate ou l'affaire Borrel, un procureur irait-il gâter des relations diplomatiques importantes pour la France ? Il ira demander l'avis de son chef, qui n'est autre que le ministre de la justice. Mais comment voulez-vous que les procureurs se battent sur des dossiers sensibles, à moins de vouloir être exilés dans un tribunal de second ordre ?"