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Jérôme Kerviel, mauvais joueur ?
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Jérôme Kerviel, mauvais joueur
LE MONDE | 14.02.09 | 14h36 • Mis à jour le 14.02.09 | 21h01, extrait
Ne pas se fier à son allure de bon garçon et à ses costumes chic. Jérôme Kerviel, 32 ans, est du genre teigneux. "Je vais faire passer la Société générale pour des débiles, s'il le faut, mais je vais me battre", écrit-il à sa petite amie, Hanane M., dès le 24 janvier 2008, alors qu'il est déjà suspecté d'avoir fait perdre 4,9 milliards d'euros à son employeur, la Société générale. Un peu plus tard, il ajoute : "Ça va tourner à la bagarre entre moi et SG (Société générale), je pense pas faire le poids, mais ils ont fait une erreur qui fait que j'ai la rage et je vais me battre, ils ont touché à ma famille." Il n'en menait pourtant pas large, à l'époque. La banque venait de découvrir les risques extravagants qu'il avait pris, faisant courir un péril majeur à l'établissement : 50 milliards d'euros d'exposition, pas moins.
Un an plus tard, l'enquête est terminée. Les juges d'instruction attendent les réquisitions du parquet avant, probablement, de renvoyer l'ex-trader devant le tribunal correctionnel. Il a tenu ses promesses. Il s'est battu. Le Jérôme Kerviel du début, qui confesse ses fautes, admet ses complexes, s'est transformé au fil du temps en un suspect combatif, jusqu'à congédier ses premiers avocats pour mieux s'en prendre à la Société générale. Le Monde n'a jamais pu rencontrer Jérôme Kerviel. Celui-ci ne l'a pas souhaité. Mais les documents amassés par les juges Renaud Van Ruymbeke et Françoise Desset - SMS, extraits de chats, ou déclarations sur procès-verbal - permettent de reconstituer sa dérive.
[...] Et si, mieux que ses bravades devant les juges, ou ses multiples tentatives d'impliquer pénalement ses supérieurs, ces chats et autres SMS saisis par les policiers décrivaient le vrai Jérôme Kerviel, un trader conscient de ses dérives, seul jouet de ses ambitions inassouvies ? Les juges ont estimé, dans une récente ordonnance, que les "services de contrôle" de la banque, quoique clairement défaillants, avaient été "abusés" par le trader.
Confronté à Jean-Pierre Mustier, son supérieur, qui lui demandait pourquoi il "n'avait jamais exprimé de regrets", Jérôme Kerviel eut cette répartie : "Je le ferai en temps voulu."