September 25, 2005

Les classiques des sciences sociales


« Ecartant de la recherche l'interrogation au sujet de la pertinence de la séparation enfant/parents, j'ai essayé de repérer comment, à partir d'un état de fait, en l'occurrence la séparation enfant/parents, peut s'ouvrir un espace qui favorise la construction de l'enfant. »

« Contribution au travail de séparation en internat »
Richard Josefsberg,
Directeur de l'établissement de Taverny


L’éducation, la chose nous semble aller de soi, a partie liée, et même doublement, avec la culture. Nous la concevons, d’une part, comme un processus d’acculturation, c'est-à-dire d’intégration de l’enfant dans la vie sociale ; de l’autre, comme une introduction aux grandes œuvres intellectuelles et artistiques de l’humanité.

Culture et dénaturation
Rousseau, ou l’éducation naturelle


Dans le champ de la psychologie, Fritz Redl a introduit le concept d’« ego resilience » en 1969 ; puis a été décrit le phénomène appelé « invulnerable children ». Enfin, au milieu des années 1980, plusieurs ouvrages consacrés à la « résilience » ont été publiés, analysant le destin réussi d’individus que leur enfance catastrophique semblait pourtant promettre à un sombre avenir.

Aux Etats-Unis, cependant, rien de comparable à l’extraordinaire engouement que connaît aujourd’hui la France pour ce concept. Pourquoi ? D’abord grâce à un génial tour de passe-passe... La résilience, qui est en Amérique une vertu sociale associée à la réussite, est devenue en France une forme de richesse intérieure... Il ne s’agit plus, comme dans la version américaine, d’orienter sa vie pour connaître le succès, mais de « chercher la merveille » ou encore de « cultiver l’art de rebondir ». Pourtant, sous cette séduisante parure, le produit reste le même.

Le mot « résilience » est d’abord ambigu, car il masque le caractère toujours extrêmement fragile des défenses développées pour faire face aux traumatismes. La résistance psychique s’apparente dans son évolution à la résistance physique face à un cancer connu. Le patient est aidé, traité au mieux, mais nul ne maîtrise ses rechutes possibles. Et c’est seulement lorsque le malade est mort que l’on peut dire, selon les cas, s’il a bien résisté ou non !

Extraits du Monde Diplomatique d'août 2003
« Résilience » ou la lutte pour la vie


L'enfant confié à une famille d'accueil va-t-il changer ? La question de l'acculturation des enfants placés en familles d'accueil interroge toujours le sens du projet de vie du jeune concerné. Les modèles proposés à l'enfant en souffrance n'offrent pas la garantie qu'ils vont être suivis par ce dernier. Cet article rend compte de la construction de l'identité de l'enfant ou de l'adolescent confronté au choc des cultures dans le cadre d'un placement familial.

INIST-CNRS 002B30A11,
Le Colporteur, CREAHI Champagne-Ardenne


Émile ou De l'éducation (1762)

« Tout est bien sortant de l'auteur des choses ; tout dégénère entre les mains de l'homme »


Livre second, L’âge de nature : de 2 à 12 ans (puer)

[203:] C’est ici le second terme de la vie, et celui auquel proprement finit l’enfance; car les mots infans et puer ne sont pas synonymes. Le premier est compris dans l’autre, et signifie qui ne peut parler: d’où vient que dans Valère Maxime on trouve puerum infantem. Mais je continue à me servir de ce mot selon l’usage de notre langue, jusqu’à l’âge pour lequel elle a d’autres noms.

[204:] Quand les enfants commencent à parler, ils pleurent moins. Ce progrès est naturel: un langage est substitué à l’autre. Sitôt qu’ils peuvent dire qu’ils souffrent avec des paroles, pourquoi le diraient—ils avec des cris, si ce n' est quand la douleur est trop vive pour que la parole puisse l’exprimer? S’ils continuent alors à pleurer, c’est la faute des gens qui sont autour d’eux. Dès qu’une fois Emile aura dit: J’ai mal, il faudra des douleurs bien vives pour le forcer de pleurer.

[205:] Si l’enfant est délicat, sensible, que naturellement il se mette à crier pour rien, en rendant ces cris inutiles et sans effet, j’en taris bientôt la source. Tant qu’il pleure, je ne vais point à lui; j’y cours sitôt qu’il s’est tu. Bientôt sa manière de m’appeler sera de se taire, ou tout au plus de jeter un seul cri. C’est par l’effet sensible des signes que les enfants jugent de leur sens, il n’y a point d’autre convention pour eux: quelque mal qu’un enfant se fasse, il est très rare qu’il pleure quand il est seul, à moins qu’il n’ait l’espoir d’être entendu.

[206:] S’il tombe, s’il se fait une bosse à la tête, s’il saigne du nez, s’il se coupe les doigts, au lieu de m’empresser autour de lui d’un air alarmé, je resterai tranquille, au moins pour un peu de temps. Le mal est fait, c’est une nécessité qu’il l’endure; tout mon empressement ne servirait qu’à l’effrayer davantage et augmenter sa sensibilité. Au fond, c’est moins le coup que la crainte qui tourmente, quand on s’est blessé. Je lui épargnerai du moins cette dernière angoisse; car très sûrement il jugera de son mal comme il verra que j’en juge: s’il me voit accourir avec inquiétude, le consoler, le plaindre, il s’estimera perdu; s’il me voit garder mon sang-froid, il reprendra bientôt le sien, et croira le mal guéri quand il ne le sentira plus. C’est à cet âge qu’on prend les premières leçons de courage, et que, souffrant sans effroi de légères douleurs, on apprend par degrés à supporter les grandes.

[207:] Loin d’être attentif à éviter qu’Emile ne se blesse, je serais fort fâché qu’il ne se blessât jamais, et qu’il grandît sans connaître la douleur. Souffrir est la première chose qu’il doit apprendre, et celle qu’il aura le plus grand besoin de savoir. Il semble que les enfants ne soient petits et faibles que pour prendre ces importantes leçons sans danger. Si l’enfant tombe de son haut, il ne se cassera pas la jambe; s’il se frappe avec un bâton, il ne se cassera pas le bras; s’il saisit un fer tranchant, il ne serrera guère, et ne se coupera pas bien avant. Je ne sache pas qu’on ait jamais vu d’enfant en liberté se tuer, s’estropier, ni se faire un mal considérable, à moins qu’on ne l’ait indiscrètement exposé sur des lieux élevés, ou seul autour du feu, ou qu’on n’ait laissé des instruments dangereux à sa portée. Que dire de ces magasins de machines qu’on rassemble autour d’un enfant pour l’armer de toutes pièces contre la douleur, jusqu a ce que, devenu grand, il reste à sa merci, sans courage et sans expérience, qu’il se croie mort à la première piqûre et s'évanouisse en voyant la première goutte de son sang?

Posted 20 years, 5 months ago on September 25, 2005
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