December 10, 2005

Il fallait faire les choses dans les règles


Le sort des autres enfants placés
Le Monde, 11/12/05, extrait :
Les quatre enfants de Franck et Sandrine Lavier, tous deux acquittés par la cour d'assises d'appel de Paris, le 1er décembre, ont été placés pendant l'instruction. Les deux petits — un garçon et une fille — sont revenus chez leurs parents après l'acquittement. Les deux aînées, issues des premières unions de Sandrine, sont toujours en famille d'accueil, car elles maintiennent leurs accusations. Pour elles, le couple a demandé un droit de visite élargi et un suivi psychologique avant d'envisager un retour au domicile.

Vivre et parler avec son enfant après Outreau
LE MONDE, article paru dans l'édition du 11.12.05
Par Anne Chemin, extrait :

Il a oublié la date du premier procès d'Outreau et cherche en vain celle de son acquittement par la cour d'assises du Pas-de-Calais, à Saint-Omer. Mais il en est trois qu'il cite sans aucune hésitation. "J'ai été arrêté le 16 mai 2002, le placement d'Anthony dans sa famille d'accueil a été levé par le juge des enfants le 2 décembre 2004 et il est rentré à la maison le 6 décembre, juste avant Noël."

Le jour de son arrestation, David Brunet était à Valenciennes (Nord), chez la mère de sa compagne Audrey : "Il était 7 heures 30. Les policiers m'ont ordonné de m'habiller et de les suivre. J'ai dit à Anthony, qui allait avoir 6 ans, que je serais là dans deux heures." Accusé de pédophilie sur la foi du témoignage mensonger de Myriam Badaoui, son ancienne voisine, il est incarcéré le soir même à la maison d'arrêt de Maubeuge (Nord). Il y restera 743 jours.

Pendant les premières semaines, David Brunet, qui ne comprend rien à ce qui lui arrive, ignore où se trouve son fils. "Je demandais aux surveillants, mais personne ne savait. Là-bas, en prison, je pouvais pas téléphoner, j'avais pas encore de visites, alors j'ai écrit aux services sociaux d'Outreau et à Paris, dans un endroit où ils s'occupent du placement des enfants. Et un jour, au parloir, mon frère m'a dit qu'Anthony avait été placé dans une famille d'accueil. Ça, ça fait vraiment très mal. Je ne connaissais même pas le nom de la ville où il était."

En deux ans et treize jours de détention à Maubeuge, David Brunet ne voit pas son fils une seule fois. Anthony n'a jamais subi d'attouchements et est totalement étranger au dossier. Le juge d'instruction interdit pourtant tout contact entre le père et le fils. Anthony n'a pas non plus le droit de voir sa mère, Karine Duchochois, mise en examen dans le dossier. "Lorsque j'ai rencontré David Brunet pour la première fois, à la maison d'arrêt, il ne voulait même pas parler du dossier, il me disait qu'il s'en fichait, raconte son avocat, Stéphane Dhonte. Il voulait seulement savoir quand il verrait son fils. Ça l'obsédait."

Le 2 juin 2004, au dix-neuvième jour du procès devant la cour d'assises de Saint-Omer, David Brunet revoit enfin son fils. "Je l'ai aperçu de loin, il avait au moins une tête de plus que quand je l'avais quitté. Là, on le mesure, le temps perdu, ça blesse, ça fait vraiment très mal. Il nous cherchait des yeux et, tout à coup, il y a eu sa tête en gros plan sur l'écran de la salle. J'ai pensé : "Punaise, t'as changé !" Et là, j'étais vraiment en colère, j'avais les tripes qui remontaient, j'avais envie de faire mal à tous ceux qui m'avaient fait mal."

Le président de la cour autorise un court échange. "Je me suis levé, j'ai dit : "Bonjour, mon fils, comment vas-tu ?" Mais je me suis effondré : c'était bloqué, je ne pouvais plus du tout parler. Ça me prenait à la gorge, au ventre, j'étais encore plus triste que si j'avais perdu quelqu'un de cher." A la demande des avocats, la cour accepte de suspendre la séance pour qu'Anthony puisse embrasser ses parents : "Il s'est jeté dans nos bras, à Karine et à moi. Il a pris nos têtes entre ses mains, il les serrait, et il les collait contre la sienne. Ça faisait vraiment du bien de sentir son enfant, sa douceur."

Le 2 juillet 2004, David Brunet est acquitté. La juge des enfants de Boulogne-sur-Mer estime que les liens familiaux doivent être rétablis "progressivement" : elle impose le maintien d'Anthony dans la famille d'accueil, avec une rencontre d'une heure par semaine avec son père, dans un lieu neutre, sous la surveillance d'un travailleur social. David Brunet n'a pas le droit d'aller voir son fils sur les lieux de son placement. "C'était fou, j'étais acquitté ! Je voulais prendre une voiture et aller le chercher à la sortie de l'école pour le ramener à la maison, mais on m'a dit qu'il fallait faire les choses dans les règles."
Posted 19 years, 11 months ago on December 10, 2005
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