December 22, 2005

« je voulais me barrer, quitter ces bouffons »

PARIS (AFP), le 22 décembre 2005 - Quatre "murs" de carton dressés sur un trottoir parisien pour se protéger des regards et du froid. Enfant de la Dass, Manu, 16 ans, vit depuis six mois dans la rue. Comme des milliers de jeunes en errance, il passera Noël dehors avec son "seul ami", son chien Hector.

L'adolescent émergeant des cartons sur un trottoir du 3ème arrondissement de Paris, a des yeux bleus d'enfant noyés dans un visage rougi, marqué par les épreuves et un mode de vie "qui fait vieillir très vite".


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"Je zone depuis des mois", avoue-t-il en grelottant. "Je m'enfonce, j'ai de moins en moins la pêche chaque jour pour aller chercher à manger, trouver des couvertures, mendier mais je n'irai pas en foyer, plus jamais", dit-il avec force. "Je préfère crever sur place et puis en plus ils n'acceptent pas les chiens".

Manu montre tout ce qui lui reste: un sac de 10 kilos, une photo d'une "ex", des couvertures et son chien, un petit berger allemand, qui le "réchauffe la nuit".

Il raconte au fil des phrases une vie décousue dont les seuls fils conducteurs sont la souffrance et l'abandon. Victime de maltraitances chez sa mère, dont il ne se souvient pas, il a été placé à la Dass (devenue Aide sociale à l'enfance, ASE) dans le Nord à l'âge de 3 ans. Sa mère n'a jamais donné signe de vie. Ses deux frères ainés non plus. Il est né de père inconnu.

"Je suis passé de familles d'accueil en foyers. J'étais mal à chaque fois, je voulais me barrer, quitter ces bouffons", murmure-t-il. "J'ai atterri dans des squats mais là, on me forçait à dealer, donc je suis allé dans la rue, pour être tranquille".

Mauvais traitements, rupture familiale, échec scolaire, démêlés avec la justice pour de petits larcins : Manu a connu "le parcours classique de beaucoup de mineurs à la dérive qui deviennent SDF avant même d'être adultes", comme l'explique le sociologue Jacques Guillou.

Selon le ministère de la cohésion sociale, de 30.000 à 50.000 jeunes de 18 à 24 ans se trouvent en situation de très grande précarité ou d'errance. Certains chercheurs évoquent le chiffre de 100.000.

Un tiers des jeunes en errance serait des enfants de la Dass et la moitié n'aurait aucun diplôme, d'après plusieurs études.

"Quand ils approchent de la majorité, l'ASE évite de se mobiliser pour certains jeunes à la dérive, fugueurs récidivistes, en se contentant d'attendre qu'ils aient 18 ans, date à laquelle l'administration n'a plus à s'occuper de leur cas. De toutes façons, nous manquons de structures adaptées", relève une assistante sociale qui préfère garder l'anonymat.

En quelques mois, Manu a fait l'expérience de "l'univers impitoyable" de la rue: racket, menaces, coups. "On m'a volé mes chaussures la deuxième nuit", lâche-t-il.

Il passe ses journées dans des foyers de jour, où il peut se réchauffer, somnoler sur des chaises et demander de la nourriture pour lui et Hector. Il va aussi voir les médecins de ces centres pour ses crises d'épilepsie et de schizophrénie.

Le jeune homme mendie plusieurs heures par jour. La nuit, l'angoisse du lendemain le saisit tout autant que le froid. Et il frissonne parfois en croisant dans la rue de vieux clochards, incarnant pour lui "un avenir effrayant".

LES JEUNES SANS DOMICILE FIXE ET LA RUE
ou " AU BOUT D'ÊTRE ENERVÉ "
Jacques Guillou
Préface de Louis Moreau de Bellaing
Logiques sociales
SOCIOLOGIE

Que font tous ces jeunes errants que nous croisons dans la rue ? Comment en sont-ils arrivés là? Ont-ils des familles ? Comment ces familles contribuent-elles à " rendre SDF " leurs propres enfants ? Comment les jeunes SDP utilisent-ils la rue, l'espace public, les services qui y sont consacrés ? Quelles sont leurs portes de sortie de ce mode de vie atypique ?
C'est à ces questions que ce livre tente d'apporter des réponses en s'appuyant sur de nombreux témoignages de jeunes sans domicile fixe rencontrés lors de l'enquête menée par l'auteur.

ISBN : 2-7384-6467-X • avril 1998


Imagine les glandes, de ne pouvoir voir les tiens foutre de rien,
Parce qu'à partir de maintenant c'est à eux qu't'appartiens,
Trimbaler comme une vieille grôle
Ils te diront quoi dire, quoi faire, quoi becter,
Les chiotes turcs sont excellents, pas d'excédents ma gueule,
C'est un luxe, et les jours d'fêtes pas d'quoi grimper aux lustres,
Juchés sur ses dossiers, juger et puis caser,
Parce que tes vioques n'arrivent plus à s'blairer,
Et si parce qu'il mouille, t'as des frangines et des frelons, alors franc-jeu
Tu n'risques pas de grandir avec eux, on t'separait comme les boeufs,
J'baratine pas sur mes aïeux, si t'as d'la famille:
C'est bandant, dans mon cas contradictoire orphelin, mon pater' à Melun
Cette tafiole d'assassin a changé mon destin,
Stoppé celui d'ma mère et son conjoint,
Le cocon explosé t'inquiète y'a de l'amende de c'coté, svp 11 11,
Famille d'accueil en manque de freche, comment veux tu etre conciliant
Quand des tocards s'prennent pour tes parents ?
Et c'est vexant pas d'suivi chez les psys,
Et si tu debloques on t'dira qu'tes aigri,
Et si on t'largue chez les dingues, y'a plus d'credit,
Comme quoi l'amour de l'oseille est plus forte que celle de l'être,
Et dans cette chianlie, tu dois apprendre et grandir vite,
Un enfant ça devient adulte que si tu lui laisses le temps et c'est navrant

Refrain :
Enfant d'la ddass, plus de paix que d'allégresse,
Enfants d'la masse, enfants d'la dass, tant d'haine
Enfants d'la ddass, plus de paix que d'allégresse,
Enfants d'la ddass enfants d'la masse, tant d'haine!

Enfants d'la dass, enfants d'la masse, encore une mission etrentable,
Bénis celui qui la remplira: sans façon,
Et maudit celui qui echouera sauvageon,
On était des numeros plus un coup, et l'entretien coute cher,
Mais tu vois pas les sous, etant soit disant soumis a leur micro sys',
La detention reste une exeption, la liberté une règle:
C'qui commence deja a avoir le choix pour ton orientation, modelé, façonné
Comme un pantin tu t'croirais livré chez toys'r'us et sans les paillettes,
Ici t'as qu'un droit: fermer ta gueule ou tu serviras de casse-dalles,
Encadrés par des educateurs pas censés s'eduquer eux memes,
Qui t'emboucanent en t'apprenant que le boul'prime sur l'biscoto
Et t'en decalquent 3-4 quand c'est chaud,
Recueillir c'est beau, a condition de respecter qu'il soit morico ou noiraud,
Tout n'est pas sombre, mais la vie n'est pas rose,
Abriter fait legiter l'couvert qu'on porte à Saint-Airvers
Et sans vergogne scotchés à la besogne,
Les differences existent, on t'apprends le masochisme
Pour t'inculquer l'civisme, aux chiottes le libéralisme !

Refrain

On arrete les palabres, mon sejour a l'étable aurait pu etre execrable,
Le rififi entre mouflets ca n'allait pas plus loin qu'un pet,
Mais les jeunes pousses deviendront des glands,
La bas c'est les ciseaux et la rage aux dents,
Bisutages violents à moins que tu débarques adolescent,
Pour les plus vieux tu d'viens interressants, et y'a pas d'sentiment,
La-bas tout l'monde a ses problemes mais personne pour t'apprendre à saouler,
Les separations sont mals vecues pas grave on finira tous tondu,
Comment veux-tu decider de ton avenir à 14 ans, pauv' cloches,
Ils s'prennent pour Nostradamus, et finir avec un métier de buse,
Trop de soucis en meme temps, ta chance d'avenir fou l'camps,
Tu chies sur la campagne et tous ses paysans,
Quand t'arrives a Paris c'est bandant,
Mioche de la ddass en passant par Armace
Baguette et cuisto mais n'aime pas les négros a Mont Melian ,
A la Arlequin ils nous prennaient pour des clowns,
A force de faire cuire des moules sinon a grand coup de boules
Pour nous laver les reins, encerclés par des branlos
Bons qu'a lutter ou faire du karaté pour mieux te peter le nez ma gueule,
J'ai tapé la cooperative à St-Père del Bigny parce que cette bandes d'albinos
Ils nous faisaient crapahuter le galibi jusqu'a l'os,
Et en pleine nuit fallait me voir
Faire du stop, j'aurais été une bonne proie du coté du mississipi,
J'ai eu du bol j'ai atteri à Annecy, 3 barbak par jour et ca change de la baraque,
Argent de poche et pecul' pour chier des frustres moins vetuste'.
Imagine le père gabin, un citadin en train de glander à Grivieux la Bareine,
J'pourrais l'écrire en fermant les yeux,
J'encule tous les lapins de garenne et les fachos de ta sale à mi-lune
Quelques uns m'ont mis des prunes et en prime des mandales
J'etais pas un vandal mais javais la dalle, des kilometres de c'patelin,
J'en ai fait de long en large, du nord au sud, venant pas tous des memes chemins
Chacun a pris le vice de l'autre et comme des apôtres,
Sans oublier que ton meilleur ami est ta fourchette,
Tu peux t'gratteur coco pour que j'rebecte des grattons,
Et faire le guignol du coté de Lyon,
Brassement d'races, brassement d'huiles et de culture,
Fait de la majorité d'entre nous, un passe pour les ordures,
Enfants d'la masse, enfants d'la ddass, tant d'haine
Enfants d'la ddass enfant d'la masse....

Refrain

Mc Jean Gab'1

Point de vue d'mcm :

Origines : MC Jean Gab'1, ex-enfant de la DDASS, "ex-voyou", ex-taulard, débarque enfin dans le paysage du rap français. La danse, la violence, le rock, le rap, Paris, les embrouilles... ça ressemble à un cliché. Ce n'en est pas un. C'est la vie de MC Jean Gab'1, titi parisien de 36 ans qui a fait ses armes non pas sous les "spot-lights" mais sur le bitume. Le single J't'emmerde, véritable brûlot de 5'30'' qui aligne en bonne et due forme tout le rap français, a précédé Ma vie, 1er album de MC Jean Gab'1.

Ingrédients : on aurait pu en rester là. Excitant, bien écrit, polémique, violent, J't'emmerde avait tout pour plaire... Mais la partie immergée de l'iceberg cachait bien plus qu'un simple pamphlet. Une réalité dure et assumée... Sur d'excellentes instrus de DJ Ol' Tenzano, MC Jean Gab'1 frappe là où ça fait mal, gratte là où c'est sale. Dur, drôle, sincère, émouvant, son flow simple et incisif devrait faire gamberger la crème du rap français... MC Jean Gab'1 est passé de l'ombre (la prison) à la lumière. Un disque brillant.

Posted 19 years, 11 months ago on December 22, 2005
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