May 27, 2006

Deux témoins évoquent un climat «d'intimidation»

Le Monde, 25 mars 2005
Marchés publics d'Ile-de-France : deux témoins évoquent un climat «d'intimidation»

Des gêneurs, des empêcheurs de s'entendre en rond, que ces deux hommes venus témoigner, mercredi 23 mars, au procès des marchés publics d'Ile-de-France. Le premier, Didier Selles, est un magistrat de la Cour des comptes, qui a exercé les fonctions de directeur des affaires financières du conseil régional. Le second, Bernard Geneste, ancien conseiller du tribunal administratif, était son adjoint, chargé des questions juridiques.

Tous deux avaient la responsabilité de veiller au respect de la légalité dans l'attribution des marchés publics, via la commission d'appel d'offres. L'un et l'autre ont démissionné, après avoir constaté de graves et multiples irrégularités dans ces procédures.

Les mots de Didier Selles sont encore empreints de colère quand il évoque le climat «d'intimidation» auquel il a été confronté pendant les trois années, de 1993 à 1996, passées dans la collectivité territoriale. «Lorsque mon service a commencé à émettre des critiques, les incidents prenaient une ampleur démesurée, ce qui me laissait penser qu'il y avait des raisons autres que de simples divergences juridiques sur ces sujets», raconte-t-il.

«ÉTONNANT»

Avec la direction des affaires scolaires, qui a en charge le programme de rénovation des lycées - 471 projets entre 1990 et 1995, pour un montant de travaux de 12 milliards de francs -, et dont M. Selles relève le fonctionnement «opaque et autarcique», les relations tournent rapidement à l'aigre. On lui oppose la nécessité d' «aller vite» pour assurer la mise en sécurité des établissements scolaires, lorsqu'il dénonce, dans des notes adressées au président (RPR) de la région, Michel Giraud, et à sa direction des services la trop grande délégation de pouvoir accordée au bureau d'études Patrimoine Ingénierie de Bernard Sananès. Celui-ci obtient 80 % des marchés d'assistance à la maîtrise d'ouvrage (AMO), ce qui revient de fait à lui laisser la responsabilité de sélectionner en amont et sans contrôle possible les entreprises autorisées à concourir.

Lorsque ses notes deviennent plus alarmantes encore sur les détournements de procédures, on lui reproche un «juridisme pointilleux et excessif». La fièvre monte, il devient urgent de casser le thermomètre. Le service de Didier Selles fait l'objet d'une mission d'inspection confiée à un proche de Michel Giraud, qui conclut, d'une part, que «les marchés passés l'ont été dans une parfaite régularité», et recommande, d'autre part, de transférer la direction juridique hors de l'autorité du directeur financier.

«Ce qui est tout de même étonnant, c'est que le président de la région ait jugé plus nécessaire de faire une inspection sur le service juridique que sur la direction des affaires scolaires», note avec acidité Didier Selles, que cet épisode avait convaincu de démissionner.

Quelques mois plus tard, c'était au tour de son adjoint Bernard Geneste de rendre son tablier. Après une année passée au service juridique, où il avait fait part au président de la région de ses soupçons concernant une entente entre les entreprises, il avait, lui aussi, fait l'objet de tentatives d'intimidation.

Avant de démissionner, il s'était livré à un petit exercice devant la présidente de la commission d'appel d'offres, Claude-Annick Tissot - qui quittera, elle aussi, avec fracas ses fonctions en mai 1996 -, à propos d'une série de marchés à venir. «Si mes déductions sont exactes, voici les offres qui vont vous être présentées», lui avait-il annoncé. «Et c'est exactement ce qui s'est passé», dit-il aujourd'hui.

Pascale Robert-Diard


Condamné le 26 octobre 2005 à de la prison avec sursis et à 50 000 euros d'amende, le député n'avait pas fait appel
LE MONDE | 26.05.06

Guy Drut n'avait pas jugé utile de se déplacer au Palais de justice de Paris, mercredi 26 octobre 2005, pour entendre sa condamnation à quinze mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d'amende par la 11e chambre du tribunal correctionnel devant laquelle il comparaissait aux côtés de quarante-six prévenus, dont trois autres anciens ministres - Michel Giraud, Gérard Longuet et Michel Roussin - dans l'affaire des marchés publics d'Ile-de-France.

Une désinvolture conforme à celle dont il avait fait preuve tout au long des débats, au printemps 2005, et tout particulièrement lorsqu'il avait dû répondre, devant le tribunal, de l'emploi fictif dont il a bénéficié de la part de la société Sicra, une entreprise de bâtiment et de travaux publics, de 1990 à 1993 pour un montant de 774 047 francs (118 000 euros).

... Quatre mois plus tard, et en dépit des recommandations de son avocat Me Jean-Yves Le Borgne, qui avait obtenu de son client qu'il adopte une attitude plus modeste le jour de sa plaidoirie, Guy Drut était condamné. Dans les attendus de son jugement, le tribunal relevait qu'il avait été "dans l'incapacité de justifier d'un acte positif expliquant son salaire", alors même qu'il disposait "à la date des faits de moyens matériels et de revenus considérables".

L'ancien champion olympique n'avait pas fait appel de sa condamnation. Sans doute faisait-il plus confiance à la mansuétude du président de la République qu'à celle de la justice.

... Au président Jean-Louis Kantor qui s'étonnait de ses exigences financières avec la Sicra, alors que Guy Drut était à l'époque député et conseiller régional et déclarait 13 millions de francs de revenus en 1994 - dont 2,5 millions de versements de dividendes de la part d'une autre entreprise du BTP, la SAR, dirigée par un proche de M. Chirac -, il avait répondu : "L'ascenseur social, vous savez, ça existe. Je suis d'origine modeste, moi. Et toute peine mérite salaire. Ce n'est pas du de Gaulle, ça, c'est Marx qui l'a dit !"

Quatre mois plus tard, et en dépit des recommandations de son avocat Me Jean-Yves Le Borgne, qui avait obtenu de son client qu'il adopte une attitude plus modeste le jour de sa plaidoirie, Guy Drut était condamné. Dans les attendus de son jugement, le tribunal relevait qu'il avait été "dans l'incapacité de justifier d'un acte positif expliquant son salaire", alors même qu'il disposait "à la date des faits de moyens matériels et de revenus considérables".

L'ancien champion olympique n'avait pas fait appel de sa condamnation. Sans doute faisait-il plus confiance à la mansuétude du président de la République qu'à celle de la justice.


Tempête politico-judiciaire après l'amnistie de Guy Drut
LEMONDE.FR | 26.05.06

"MÉPRIS DE LA JUSTICE"

Cette décision a également suscité l'indignation dans le monde judiciaire : le Syndicat de la magistrature (gauche) a estimé que "le président de la République méprise la justice", tandis que l'Union syndicale des magistrats (majoritaire) dénonçait "un retour des privilèges". Cela constitue "une rupture de l'égalité" avec les autres condamnés dans l'affaire des marchés publics d'Ile-de-France, a estimé de son côté Me Jean-Yves Dupeux, avocat de la région dans ce dossier.

Le Monde, Embarras à droite...

Une loi pour les personnes qui se sont distinguées dans le domaine sportif

L'amnistie "par mesure individuelle" du président de la République est prévue par le chapitre II des lois d'amnistie successives et énumère la liste des personnes susceptibles d'en bénéficier.

Il faudra attendre sa réélection pour que soit ajouté le domaine "sportif" à la loi d'amnistie du 6 août 2002, votée par le Parlement, dont est membre... le député (UMP) de Seine-et-Marne, Guy Drut.

Posted 19 years, 4 months ago on May 27, 2006
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