March 12, 2007

L'euthanasie reste largement illégale en Europe


VALENCE (AFP) - Le beau-père de Julien s'est suicidé le 31 janvier après plus de 12 heures en garde à vue dans le cadre de la disparition de Julien. Il avait laissé une lettre dans laquelle il clamait son innocence.

MADRID (AFP) - Le suicide d'un internaute allemand, résidant à Bremerhaven (nord), a été évité grâce à l'intervention à distance d'internautes et de la police espagnole, a annoncé cette dernière dimanche dans un communiqué.

L'Allemand, connecté à un forum de discussions, expliquait qu'il allait se suicider après le départ de sa femme et se montrait sur l'écran, via sa webcam, avec un pistolet pointé sur la tête.

Connectés sur le même forum, des internautes espagnols ont alerté la police espagnole laquelle a immédiatement prévenu son homologue allemande et s'est mise en contact avec l'internaute déprimé pour le dissuader de passer à l'acte.

La police allemande a pu arriver à temps au domicile de l'internaute, confisquer son arme et l'emmener au commissariat le plus proche, selon le communiqué de la direction générale de la police espagnole.

PARIS (AP) - L'euthanasie ou le suicide assisté sont illégaux dans la plupart des pays d'Europe mais à chaque nouvelle affaire le débat refait surface, avec rage, pour faire évoluer les législations. Et c'est souvent au cas par cas que les justices tranchent dans un sens ou dans l'autre.

Le 21 décembre dernier, un médecin romain avait débranché le respirateur qui maintenait en vie Piergiorgio Welby, un sexagénaire paralysé qui réclamait le droit de mourir. Son cas a divisé l'Italie où le poids de l'Eglise catholique reste important.

Le Vatican a d'ailleurs refusé un enterrement religieux à M. Welby auquel la justice avait dénié le droit de mourir. Le lendemain de sa mort, le parquet de Rome a ouvert une enquête.

L'Italien avait notamment demandé au président Giorgio Napolitano la légalisation en Italie de l'euthanasie. "Mon rêve (...) mon désir, ma requête, que je souhaite présenter à toutes les autorités, politiques ou judiciaires, est aujourd'hui plus clair et précis que jamais dans mon esprit: pouvoir obtenir l'euthanasie", expliquait-il dans son appel au chef de l'Etat.

L'interdit reste aussi total en Grande-Bretagne où le suicide est autorisé, mais l'assistance réprimée. Une pétition pour obtenir la légalisation du suicide assisté avait été signée par 50.000 personnes en 2002 à l'initiative de Brian Pretty.

Sa femme Diane, lourdement handicapée, s'était vu refuser en mars 2002 par la Cour européenne des droits de l'Homme le droit de se faire assister par son mari pour mettre fin à ses jours. Cette décision confirmait celle rendue plus tôt par la justice britannique.

En revanche, en 2005, la justice britannique a autorisé les médecins à laisser mourir la petite Charlotte, grande prématurée et handicapée. Le bébé, sur respirateur artificiel, n'avait pas quitté l'hôpital depuis sa naissance.

En France, c'est le cas de Vincent Humbert, un jeune homme tétraplégique suite à un accident, qui a ému l'opinion publique avant de pousser le législateur à mieux encadrer la fin de vie. Sans pour autant franchir le cap de l'euthanasie. La loi votée en 2004 crée un "droit à laisser mourir", et non à "faire mourir". Une solution médiane unique en Europe.

D'autres pays, comme la Belgique, les Pays-Bas ou la Suisse vont plus loin en autorisant l'euthanasie ou un suicide assisté, le patient s'administrant lui-même un produit prescrit. La Suède est également tolérante dans la plupart des cas.

Et si certains en Suisse se sont émus de l'apparition d'un "tourisme de la mort", le gouvernement helvétique a refusé de légiférer sur l'euthanasie qui n'est pas réglementée expressément par le code pénal suisse.

Ce sont comme souvent, les Pays-Bas qui ont été précurseurs en Europe, en adoptant dès 2001 une loi autorisant l'euthanasie. Ils ont été suivis en mai 2002 par leur voisin belge, qui a autorisé un acte pratiqué par un tiers, dans l'intention de mettre fin à la vie d'une personne à sa demande. Les médecins peuvent pratiquer cet acte sur des patients majeurs (18 ans), qui doivent formuler leur requête par écrit.

Selon la loi belge, un patient souhaitant mourir doit être dans un état de santé irréversible et être en proie à des souffrances tant physiques que psychologiques de façon constante. S'il ne s'agit pas d'un malade en phase terminale, le médecin auquel la demande est soumise doit consulter un confrère, soit un psychiatre soit un médecin spécialisé. Au moins un mois doit s'écouler entre la demande écrite et la pratique de l'acte.

Malgré la légalisation de l'euthanasie, elle reste marginale dans ces pays, selon une enquête sur la fin de vie, rendue publique fin janvier 2007 par l'Institut national d'études démographiques (Ined). Cela concerne 3% des décès aux Pays-Bas et 200 personnes en Belgique en 2003. AP


- Une solution médiane unique en Europe -


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Re: L'euthanasie reste largement illégale en Europe
Procès critiqué en Dordogne dans une affaire d'euthanasie
12.03.07 | 14h07

PERIGUEUX, Dordogne (Reuters) - Le procès d'une infirmière et d'un médecin accusées d'avoir aidé à mourir en 2003 une malade du cancer en phase terminale s'est ouvert lundi à Périgueux sous les protestations des partisans comme des adversaires d'une légalisation de l'euthanasie.

Chantal Chanel, 40 ans, et le docteur Laurence Tramois, 35 ans, comparaissent devant les assises de la Dordogne pour "empoisonnement", crime en théorie passible de trente ans de réclusion. La défense va demander leur acquittement.

Pendant que dans le box des accusés elles assistaient, blêmes et même en larmes pour Chantal Chanel, aux formalités d'ouverture d'audience, plusieurs dizaines de personnes formaient devant le palais de justice une "chaîne de solidarité" en leur faveur, en se tenant la main.

L'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), qui milite pour une légalisation totale de l'euthanasie, et les associations "Faut qu'on s'active !" et "Mouvement national pour une loi Vincent Humbert", favorables à une dépénalisation exceptionnelle de certains actes, se sont dites scandalisées de voir les deux femmes jugées comme des criminelles.

"Il faut une loi modérée, entre le statu quo actuel et la solution prônée par ceux qui demandent le droit au suicide assisté", a dit lors d'une conférence de presse Vincent Léna, président de "Faut qu'on s'active!".

Marie Humbert et le docteur Frédéric Chaussoy, qui furent mis en examen pour avoir aidé à mourir en 2003 le jeune tétraplégique Vincent Humbert dans le Pas-de-Calais, étaient présents, en solidarité avec les accusés.

"Je ne comprends pas pourquoi ce procès a lieu", a dit marie Humbert aux journalistes.

LES ANTI-EUTHANASIE ECRIVENT

La semaine dernière, les accusées avaient reçu le soutien sans précédent de 2.134 soignants, qui revendiquaient dans un manifeste publié dans la presse avoir pratiqué l'euthanasie active et ont aussi demandé une réforme.

Les adversaires de la légalisation de l'euthanasie, un groupe de médecins et d'intellectuels, ont répliqué en écrivant au président de la cour d'assises pour lui demander le renvoi du procès, malvenu selon eux en pleine campagne présidentielle.

"(L'appel des 2.134) est ni plus ni moins une tentative de prise en otage de la justice par des militants qui croient avoir trouvé le cas emblématique servant leur idéologie", disent-ils dans cette lettre. La demande de renvoi est restée sans suite.


Au contraire de la Belgique et des Pays-Bas, la loi française ne permet pas l'aide active à mourir mais seulement l'arrêt des traitements, depuis la loi dite "Leonetti" votée en avril 2005 par le parlement après l'affaire Humbert.

Dans l'affaire de Périgueux, le victime, Paulette Druais, 65 ans, qui se trouvait dans un coma douloureux et vivait une agonie particulièrement difficile, est morte le 23 août 2003 à l'hôpital rural de Saint-Astier d'une injection de chlorure de potassium mortelle, prescrite par écrit par le docteur Tramois et administrée par Chantal Chanel.

Sa famille n'a pas porté plainte. Dénoncées par des soignants, les accusées ont reconnu les faits, expliquant à l'instruction qu'elles ne se revendiquaient pas comme militantes de l'euthanasie mais estimaient avoir fait un geste "humain".

Devant la cour, le docteur Tramois, fille d'un père cuisinier et d'une mère au foyer, a raconté avoir eu sa vocation de médecin à l'âge de cinq ans et ressenti une immense fierté de travailler à l'hôpital de Saint-Astier, sa ville natale.

"J'avais été victime d'une attaque de polio à cinq ans. On avait pris soin de moi, j'ai voulu prendre soin des autres", a-t-elle dit.

Depuis l'affaire, elle continue a exercer en libéral dans un cabinet. L'Ordre des médecins lui a infligé une suspension d'un mois. L'hôpital lui a officiellement demandé de partir mais, officieusement, la sollicite toujours pour des gardes de nuit et de week-end, a-t-elle précisé.


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Re: L\'euthanasie reste largement illégale en Europe
Euthanasie : la médecin condamnée à un an avec sursis, l'infirmière acquittée
LEMONDE.FR avec AFP | Mis à jour le 16.03.07 | 08h53

Le jury des assises de la Dordogne a condamné, jeudi 15 mars, le docteur Laurence Tramois à un an de prison avec sursis, et acquitté l'infirmière Chantal Chanel. Les deux femmes étaient accusées d'empoisonnement pour avoir aidé à mourir une malade agonisante en 2003. Laurence Tramois avait prescrit et Chantal Chanel administré une injection létale de potassium à Mme Druais, 65 ans, atteinte d'un cancer du pancréas en phase terminale.

Après deux heures de délibération, les juges et les jurés n'ont pas totalement suivi l'avocat général Yves Squercioni, qui demandait des peines de principe de deux ans de prison avec sursis contre le médecin et d'un an de prison avec sursis contre l'infirmière. La défense avait plaidé l'acquittement en demandant aux jurés de mettre fin à "l'hypocrisie" entourant, selon elle, ce débat de société.

Le ministère public souhaitait des peines symboliques pour que soit rappelé le principe de droit qui interdit à un médecin de donner la mort. Yves Squercioni avait demandé que la sanction contre l'infirmière ne soit pas inscrite à son casier pour qu'elle puisse continuer à exercer. Ayant déjà été suspendue un mois, la médecin, elle, pourra continuer d'exercer son métier.

Il s'agissait, selon le ministère public, d'appliquer la loi qui interdit aux soignants de provoquer directement la mort de leurs patients. Le second avocat général, Frédéric Bernardo, a déclaré : "C'est un interdit fondamental de notre société, sans lequel notre société n'aurait pas d'organisation. La blouse blanche et la seringue ne sont pas des causes d'immunité."

"C'EST LA MÉDECINE QUI A ÉTÉ CONDAMNÉE"

Je suis "contente pour Chantal, pour moi, c'était un poids énorme", a lancé Laurence Tramois en sortant du tribunal, alors que Chantal Chanel, affichant un large sourire, s'est dit "soulagée", bien que "triste pour Laurence".

Présente tout au long du procès, Marie Humbert a profité de l'énoncé du verdict pour lancer un dernier appel aux politiques à "modifier la loi" sur l'euthanasie. "La loi Leonetti ne protège rien du tout. Un an avec sursis, j'aurais préféré qu'elle n'ait rien. Elle n'aurait jamais dû avoir cette condamnation", a déclaré Mme Humbert.

Le docteur Frédéric Chaussoy, qui avait été poursuivi avec Marie Humbert pour avoir donné la mort au fils de cette dernière, Vincent, a de son côté estimé que "c'est la médecine qui a été condamnée". Il a également annoncé son souhait de "passer le témoin à d'autres", pour qu'ils fassent "évoluer peut-être" la législation sur la fin de vie, et fait état de son intention de "retourner auprès de [ses] malades", désirant retrouver "de la sérénité" et ne plus être sollicité sur l'euthanasie.



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Re: L'euthanasie reste largement illégale en Europe
vendredi 16 mars 2007, 16h55
Le verdict de Périgueux relance le débat sur l'euthanasie

PERIGUEUX, Dordogne (Reuters) - Le procès d'un médecin et d'une infirmière accusées d'"empoisonnement" pour avoir aidé à mourir en 2003 une malade agonisante a relancé par un verdict très clément le débat sur l'euthanasie "active".

Alors que trente ans de réclusion étaient encourus, la cour d'assises de la Dordogne a sanctionné le docteur Laurence Tramois, 35 ans, d'un an de prison avec sursis sans inscription au casier judiciaire, ce qui lui permet de continuer d'exercer.

Elle a relaxé l'infirmière Chantal Chanel, 40 ans. Même si, comme le demandait le ministère public, l'interdit fondamental de donner la mort est confirmé, le caractère symbolique de la sanction ne fait qu'attiser les demandes d'une légalisation encadrée de l'euthanasie active.

Tout au long du procès, précédé par un appel public de 2.134 soignants en ce sens, les partisans d'une telle réforme ont affronté sur fond de campagne présidentielle les adversaires de l'euthanasie.

Le docteur Frédéric Chaussoy et Marie Humbert, qui avaient aidé à mourir en 2003 le jeune tétraplégique Vincent Humbert, ont lancé un appel pour une légalisation de l'aide à mourir "sous de strictes conditions et dans certains cas extrêmes".

Au procès, l'Ordre des médecins et le parquet général, représenté par Frédéric Bernardo et Yves Squercioni, ont réaffirmé la position officielle actuelle, selon laquelle la loi Leonetti, votée en avril 2005, est suffisante.

Cette loi a légalisé l'arrêt des traitements pour éviter l'acharnement thérapeutique et permet l'administration de médicaments anti-douleur aux mourants en doses massives, même si elles sont susceptibles d'entraîner la mort.

"COCKTAILS LYTIQUES"

"Notre droit est très en avance sur beaucoup de pays européens", a dit dans son réquisitoire Frédéric Bernardo. De telles dispositions n'existent pas dans le sud de l'Europe, a-t-il rappelé. Les unités de soins palliatifs, visant à mieux gérer la mort à l'hôpital, se sont développées, a-t-il ajouté.

"Est-ce que la dignité ne réside pas dans l'accompagnement du malade, plutôt que dans l'accélération de sa mort ?", a demandé l'avocat général.

En face, la défense des deux accusées et les associations telles que l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) ont souligné que cette loi ne réglait pas les cas tels que celui qui était examiné au procès.

Laurence Tramois a prescrit par écrit une dose de potassium mortelle à Paulette Druais, atteint d'un cancer en phase terminale, qui vivait, malgré des doses maximales de médicaments anti-douleur, une agonie cruelle avec tremblements, fièvre, escarres, incontinence urinaire, douleur et vomissement fécaux.

La vieille dame demandait à mourir, selon plusieurs témoins. Cette situation n'est pas rare en France où, fait plutôt spécifique en Europe, 75% des décès surviennent à l'hôpital.

"On a beaucoup de personnes très âgées en fin de vie, des personnes démentes atteintes de polypathologies, des corps très dégradés. On vit des situations horribles, épouvantables, où les familles peuvent même plus entrer dans les chambres", a raconté Chantal Chanel.

Elle a rappelé un fait connu mais encore tabou : les pratiques d'aide à mourir actives pour les cas extrêmes sont répandues de longue date dans les hôpitaux français.

Quand Chantal Chanel a commencé sa carrière au début des années 90, trois recettes de "cocktails lytiques" de médicaments - des mélanges ayant pour effet de provoquer la mort - étaient affichés dans le local des infirmières de l'hôpital de Saint-Astier, ont raconté à la barre plusieurs témoins.

Deux pays européens, la Belgique et les Pays-Bas, ont légalisé l'euthanasie active dans un cadre très rigoureux, a rappelé Frédéric Bernardo. La loi ne s'applique que dans les cas extrêmes : environ 350 euthanasies légales en 2004 et 2005 en Belgique, soit seulement 0,36% des décès.

Dans la campagne présidentielle française, seule Ségolène Royal s'est prononcée clairement en faveur d'une nouvelle législation sur l'euthanasie active.

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Re: L'euthanasie reste largement illégale en Europe
Au Japon, la détresse des mères infanticides
Elles veulent tout donner à leur enfant, mais craquent face à la pression sociale.
Par Michel TEMMAN
QUOTIDIEN : Samedi 29 juillet 2006 - 06:00
Tokyo de notre correspondant

Le 15 juillet, Yuka, 8 ans, tenait la main de sa mère quand toutes deux s'engagèrent sur un pont blafard enjambant un affluent de la rivière Nohara. Non loin de là, s'étalait Toyota City, ville et siège du premier constructeur automobile japonais. La chaleur moite et humide de juillet collait à la peau. Aucun passant n'était visible à la ronde. Quelques secondes plus tard, ce fut le drame. Yuka tomba du pont. Une chute de cinq mètres. Le corps de la petite fille, sans vie, fut retrouvé en contrebas, sur une berge. A son tour, sa mère tenta de sauter. Pour sauver sa fille ? Mettre fin à ses jours ? Elle n'en eut pas le temps. Cette fois, un témoin l'en empêcha. Naoko Hatanaka, âgée de 39 ans, expliqua aux policiers que sa fille avait voulu observer la rivière. Qu'elle s'était penchée. Et était tombée.
Yuka était une fillette comme les autres. Adorée et couvée par sa mère. Les voisins et les voisines, les commerçants de Kariya, la petite ville où elle vivait, non loin de Toyota City, ses copains et copines du secondaire, disaient tous qu'elle était kawaï ! («mignonne»).
Mais les enquêteurs ne furent pas dupes. Les circonstances de «l'accident» étaient étranges. Ils interrogèrent aussitôt la maman. Sous le choc, elle reconnut, le lendemain, avoir poussé sa fille vers la mort. Pour expliquer son geste, elle affirma aux policiers qu'elle était «devenue psychologiquement instable après avoir donné naissance à Yuka».
«Un poids». Le syndrome est bien connu au Japon, une société trop couveuse. Celui de la mère protectrice et responsable, qui se donne à fond dans l'éducation de son enfant unique, et qui, déstabilisée par un divorce, stressée par les contraintes sociales et familiales, surmenée, isolée et manquant bientôt d'argent, retourne la situation contre son enfant en le tuant. «La mère de Yuka était victime d'un désordre de la personnalité, constate Mafumi Usui, professeur à l'université Seiryo de Niigata, expert en psychologie sociale et criminelle. Elle lui achetait de jolis vêtements, cuisinait de bonnes choses. Mais Yuka était devenue un poids pour elle. Sa mère fut incapable de lui offrir les choses les plus simples. Un peu de tendresse.»
Aujourd'hui, le Japon s'inquiète pour ces mères sur le fil du rasoir. Car tandis que les meurtres et crimes violents sont en baisse, les infanticides maternels se multiplient. Les abandons aussi. Dans son film Nobody Knows (2004), le cinéaste Hirokazu Kore-Eda décrit la douce descente aux enfers de quatre frères et soeurs nés d'un père différent, abandonnés un matin par une mère partie refaire sa vie avec un autre homme. En 1988, ce fait divers avait ébranlé et choqué le Japon.
«L'amour parental n'est pas en question, affirme Mafumi Usui. Au Japon, la mère qui tue son enfant est souvent une bonne mère. Elle l'aime. Son enfant est kawaï. Il est tel un takaramono [un «trésor», ndlr]. L'enfant est tout, plus que tout. Au Japon, il n'y a pas de distance entre l'enfant et ses parents. Ils le portent toute leur vie sur leur dos. Ils dépensent des sommes folles pour qu'il intègre la meilleure école maternelle, le meilleur collège, le meilleur lycée... Ils dorment ensemble [prennent aussi le bain ensemble, ndlr]. Et, parfois, se tuent ensemble. On appelle cela oyako shinju ... La mère criminelle, elle, n'a plus d'énergie pour éduquer son enfant. Alors, elle abdique.»
«Pas préparées». Pour le psychologue, la responsabilité des infanticides incomberait moins aux mères fautives qu'à la «nouvelle société» nippone. «Auparavant, ajoute-t-il, les Japonaises étaient initiées très tôt à l'éducation de leurs futurs enfants. Ce n'est plus le cas. Les Japonais surnagent aujourd'hui dans la richesse. Habituées à vivre dans une société trop pratique, d'enfants gâtés, des mères ne sont pas préparées à affronter des problèmes parfois simples. D'autres ne peuvent offrir à leur enfant ce que les autres ont. Par fierté, elles ne parlent pas de leurs soucis. A quoi d'ailleurs cela servirait ? Avant, les Japonais s'entraidaient. La solidarité était exemplaire. Plus de nos jours. Isolées et désemparées, des mères craquent. Elles décrochent.» Comme la mère de Yuka, sur un pont de Toyota City, par un jour nuageux de juillet.
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