December 1, 2005

Outreau : les réquisitions sont hors-normes

PARIS (AFP), 1 décembre 2005 - En intervenant exceptionnellement dans le procès d'Outreau mercredi, le procureur général de Paris, Yves Bot, a pesé de tout son poids en faveur d'un verdict d'acquittement qui ne fait plus guère de doute dans un dossier où la justice française aura été sévèrement mise en cause.

Très attendue en raison du réquisitoire de l'avocat général Yves Jannier, cette journée de mercredi aura été marquée par un surprise de taille dans cette affaire qui en a déjà connu beaucoup.

Le procureur général de Paris, Yves Bot, est intervenu à la suite de M. Jannier qui venait de requérir l'acquittement pour les six acccusés rejugés en appel depuis le 7 novembre. C'est la première fois qu'un procureur général vient soutenir à l'audience des réquisitions d'acquittement en France, se livrant dans le même temps à une sorte de mea culpa au nom de l'institution judiciaire et offrant ses "regrets" aux accusés.

Une intervention qui n'a pas fait l'unanimité parmi les syndicats de magistrats et a été vivement critiquée par les parties civiles. "Nous devons faire en sorte que cela ne se reproduise plus", a déclaré le procureur général, l'un des plus hauts magistrats du parquet en France, habillé de sa robe rouge aux parements d'hermine.

Plus exceptionnel encore, le procureur général, délaissant sa robe, a tenu dès la fin de l'audience une conférence de presse d'une vingtaine de minutes au sein même du prétoire pour les médias audiovisuels, mettant en scène une institution judiciaire qui cherche à montrer qu'elle a tiré les leçons de cette "catastrophe". Et ce, avant même le verdict attendu jeudi.

"Pour nous, c'est une souffrance de voir notre justice dysfonctionner de cette manière-là, on est complètement concernés", a déclaré le procureur général, soulignant que ce dossier avait suscité au sein du parquet général "une réflexion qui remonte à plusieurs mois". Le procureur général s'est refusé à attribuer la faillite de ce dossier au juge d'instruction Fabrice Burgaud, mis en cause tant par la défense que par la presse.

"Cela aurait été une échappatoire facile de dire que c'était la faute d'un seul, c'est plus grave que cela, plus grave qu'un dysfonctionnement individuel", a-t-il affirmé. "Le juge Burgaud, d'abord moi je ne connais que le substitut Burgaud qui professionnellement n'a rien de comparable avec ce qui ressort du dossier", a déclaré M. Bot.


Il avait soutenu le magistrat au moment du premier procès de Saint-Omer en 2004, alors qu'il était à la section anti-terroriste du parquet, M. Burgaud ayant bénéficié d'une prime au mérite de 8% pour son travail dans cette section. Cette intervention du procureur général a été diversement accueillie par les syndicats de magistrats.

Elle a été saluée par le président de l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), Dominique Barella, qui a déclaré: "Quand l'affaire est hors-normes, les réquisitions sont hors-normes. L'accusation ne tient pas suffisamment. C'est la preuve que l'institution judiciaire est capable de réagir".

En revanche, pour Aida Chouk, président du Syndicat de la magistrature (SM, gauche), "il s'agit d'une justice spectacle qui n'a pas lieu d'être dans un procès où les jurés ont besoin de toute leur sérénité pour délibérer". Enfin, pour Me Pantaloni, avocat de quatre des enfants victimes, "cette intervention est hallucinante. Il (M. Bot, ndlr) a dicté de fait son verdict à la cour d'assises de Paris, ce qui me paraît contraire à toutes les règles".

Libération, 1er décembre 2005, extraits :

C'était il y a quelques jours. Innocenté d'un viol, Kamel Oueslati, jardinier tunisien et sans papiers, a reçu, de la Commission nationale de réparation des détentions, la somme de 80 000 euros. Le prix des six ans qu'il a passés en prison. Dans sa requête, Me Xavier Allard, son avocat, avait osé un rapprochement avec l'affaire d'Outreau, «tant pour les erreurs de l'instruction que pour un séjour en prison rendu plus difficile par une accusation de viol». Pourquoi ne pas calculer les indemnités dues à son client à l'aune de celles promises aux (premiers) acquittés d'Outreau ? Pourquoi pas, pour tous les acquittés, une réception en fanfare par le garde des Sceaux, comme pour les acquittés d'Outreau? «Il m'a été répondu que la référence à Outreau était totalement inopportune et qu'un jardinier tunisien et clandestin avait moins souffert de la solitude en détention que d'autres, de par son statut, raconte Me Xavier Allard, alors, je me dis que : soit le système judiciaire fait semblant de demander pardon ­ hypocritement devant les caméras; soit, dans ce système, une infime minorité réfléchit et veut que les choses changent.»

Idéologie. «Il faudrait, assure Henri Leclerc, réfléchir à ces enquêtes très longues avec des gens en détention provisoire. Or, il est presque impossible, dans les affaires graves, d'obtenir d'un juge d'instruction qu'il reconnaisse ses erreurs et délivre un non-lieu. Il faut une réforme profonde de notre système pénal.» D'autant plus dans une société traversée par l'idéologie sécuritaire et la compassion victimaire. Au point que tout argument contraire, même raisonnable, en devient inaudible.


Libération, 1er décembre 2005 :

Entre l'arrestation, le 21 février 2001, du couple Myriam et Thierry Delay, et l'ouverture du procès devant la cour d'assises du Pas-de-Calais à Saint-Omer, le 4 mai 2004, il y a eu 10 000 pièces d'instruction.

25 ans et quatre mois. C'est la durée cumulée du temps passé en détention par les 13 personnes qui ont clamé leur innocence pendant quatre ans. Sans compter les 17 mois de François Mourmand, mort en prison.

100 000 euros ont déjà été versés à chacun des sept acquittés de Saint-Omer au titre de la «faute» de l'Etat. A ces sommes, s'ajoutent des dédommagements individuels parfois bien supérieurs.

Hormis les quatre fils Delay victimes de leurs parents, 25 enfants ont été placés sur réquisition du parquet: pas un ne s'était plaint d'abus sexuels, aucune de leurs familles n'était suivie pour violences. 20 sont encore placés aujourd'hui.


Le procès d'Outreau tourne au "mea culpa" judiciaire
LEMONDE.FR | 30.11.05

Concernant les responsabilités magistrats dans cette affaire, il a estimé que "cela aurait été une échappatoire facile de dire que c'était la faute d'un seul, c'est plus grave que cela, plus grave qu'un dysfonctionnement individuel". "C'est au scanner, à l'IRM qu'il va falloir passer ce dossier, il y a eu trop de cloisonnements, trop d'institutions qui sont intervenues", a-t-il prévenu. Et d'insister : "Outreau a fait naître le doute sur la justice, il va donc falloir transformer ce doute à nouveau en une confiance".

Evoquant le "dysfonctionnement majeur, catastrophique de l'institution judiciaire", M. Bot a également déclaré qu'il n'était "pas question de ne pas examiner les responsabilités individuelles" dans ce dossier.

Le juge Fabrice Burgaud qui a instruit l'affaire d'Outreau a été très critiqué pour son instruction "à charge"."Moi, je n'ai connu que le substitut Burgaud, qui professionnellement n'a rien de comparable avec ce qui ressort du dossier" d'Outreau, a dit à la presse Yves Bot. A l'audience, Yves Bot avait envisagé l'hypothèse de poursuites disciplinaires contre ce magistrat, poursuites dont le déclenchement est soumis au ministre de la justice.

Le ministre de la justice Pascal Clément donnera une conférence de presse, jeudi 1er décembre, après le verdict de la cour d'assises de Paris dans l'affaire de pédophilie d'Outreau, a annoncé son cabinet. Outre sur de possibles sanctions disciplinaires, il devrait se prononcer sur les réformes de procédure envisagées après le premier procès de l'affaire, en 2004.

Le Figaro, le 30 novembre 2005, extrait :

2000
-Décembre: Les services sociaux de Boulogne-sur-Mer signalent des soupçons d'abus sexuels sur des enfants par leurs parents à Outreau.

2001
-Février: Ouverture d'une information judiciaire pour viols et agressions sexuelles, corruption de mineurs et proxénétisme.

2002
-Juin: Un ferrailleur de 33 ans, suspect, meurt en prison.

2003
-Juillet: 17 personnes sont renvoyées aux assises malgré une demande de non-lieu du juge pour le mari de la boulangère et du procureur pour la femme de l'huissier.

2004
-24 juin: L'avocat général requiert dix condamnations et sept acquittements notamment pour le chauffeur de taxi et la boulangère.

-2 juillet: La cour d'assises acquitte sept des 17 accusés et condamne notamment Thierry et Myriam Delay à 20 et 15 ans de réclusion criminelle.

Le ministre de la Justice Dominique Perben exprime ses «regrets» aux personnes acquittées.

Six des dix condamnés font appel.

2005
-30 nov: L'avocat général Yves Jannier requiert l'acquittement des six accusés. Le procureur général de la cour d'appel de Paris Yves Bot exprime ses «regrets» aux accusés.

November 30, 2005

La défense des six accusés d'Outreau a renoncé à plaider

PARIS (AP), 30 novembre 2005 - Le parquet général de la cour d'appel de Paris a requis mercredi l'acquittement des six accusés de l'affaire de pédophilie d'Outreau avant que le procureur général Yves Bot n'exprime son "regret" aux cinq hommes et une femme rejugés depuis quatre semaines.

"De toutes les accusations portées contre les six accusés formulées exclusivement sur les déclaration des enfants, on ne peut rien retenir", a déclaré Yves Jannier, l'avocat général avant de requérir l'acquittement des six accusés. "Je ne suis pas là pour faire condamner des innocents", a-t-il ajouté.

Fait rarissime, le procureur général de la cour d'appel de Paris, Yves Bot, a ensuite pris la parole et exprimé son "regret en tant que magistrat" à l'égard des six accusés. Et symboliquement, a demandé une nouvelle fois à la cour d'assises d'appel de prononcer un verdict d'acquittement.

"Nous devons faire en sorte que cela ne se reproduise plus", a déclaré Yves Bot à propos des "dysfonctionnements de l'institution judiciaire" avant d'ajouter: "il n'est pas question de ne pas examiner les responsabilités individuelles".


PARIS (AP), 30 novembre 2005 - La défense des six accusés rejugés en appel dans l'affaire de pédophilie d'Outreau a renoncé à plaider après les réquisitions d'acquittement prononcées mercredi après-midi par le ministère public.

"Après ce que nous avons entendu, la défense renonce unanimement à plaider", a déclaré Me Jean-Louis Pelletier, avocat de l'abbé Dominique Wiel, en s'exprimant au nom de tous ses confrères.

L'avocat a demandé une minute de silence à la mémoire de François Mourmand, mort en cellule pendant l'instruction.

November 28, 2005

Des questions inhabituelles

PARIS (Reuters), 28 novembre 2005, extraits - L'audience a ensuite montré que le juge Burgaud avait demandé aux experts psychologues de répondre à des questions inhabituelles dans une telle mission, sur l'homosexualité éventuelle des accusés, leurs éventuels problèmes d'éjaculation précoce et même leur "sens moral".

Le psychologue, qui a conclu à "l'absence totale de sens moral" pour l'huissier Alain Marécaux et le prêtre Dominique Wiel, a reconnu que ces notions n'avaient aucun rapport avec la personnalité de quelqu'un coupable d'abus sexuel.

La défense a souligné que les contre-expertises qu'elles avaient demandées lors de l'instruction avaient toutes été refusées par le juge Burgaud.

PARIS (Reuters), 29 novembre 2005 - Les avocats des associations de défense des enfants ont nié toute responsabilité dans les fausses accusations de l'affaire de pédophilie d'Outreau à la fin du procès en appel de six personnes.

"Les incompétents sont ceux qui ont recueilli la parole de l'enfant (...) La responsabilité incombe entièrement à la justice", a dit Me Vanina Padovani, avocat de l'Enfant bleu.

"Nous n'avons jamais brandi le postulat que les enfants disaient toujours la vérité, ni prétendu qu'ils bénéficiaient d'une présomption de crédibilité", a ajouté Me Sophie Humbert, pour l'association Enfance majuscule.

Apparues avec la multiplication des procès pénaux visant des faits de pédophilie, ces associations sont de plus en plus critiquées par les avocats pénalistes, qui leur reprochent de "sacraliser" les paroles des enfants et de s'ériger en accusateurs sans en avoir la légitimité.

Leur rôle dans l'affaire d'Outreau est décrié, puisque les accusations portées à l'origine par 17 enfants, soutenues par ces associations, se sont révélées être fantaisistes.

Au premier procès, sept accusés ont été acquittés et l'avocat général pourrait requérir mercredi l'acquittement des six derniers.

A la barre, les neuf enfants accusateurs toujours retenus comme victimes ont admis avoir menti ou fait des récits de meurtres et d'abus sexuels dont le caractère imaginaire est déjà démontré par l'enquête.

Les avocats des associations ont expliqué qu'elles n'avaient aucune responsabilité dans l'erreur judiciaire.

"On tente de nous dénigrer. Mais nous ne sommes pas une meute de pitbulls, un petit parquet de droit privé. Il y a des enfants victimes, il faut les défendre, les protéger", a dit Me Padovani.

"Si on a associé Outreau à fiasco, la responsabilité en incombe à la justice et à elle seule, pas à nous, associations", a estimé Me Marie-France Petre-Renaud, avocate d'Enfance et partage.

Mercredi matin, les avocats du conseil général du Pas-de-Calais, représentant légal des enfants, plaideront à leur tour, avant le réquisitoire de l'avocat général, prévu dans l'après-midi. Le verdict est attendu jeudi.

November 27, 2005

Un bond en arrière de 30 ans?

PARIS (AFP), 27 novembre 2005, extraits - La défense des six accusés dans l'affaire de pédophilie d'Outreau n'imagine pas d'autre scénario la semaine prochaine que des réquisitions puis un verdict d'acquittement, qui viendrait confirmer un énorme fiasco judiciaire.

Rejugés en appel par la cour d'assises de Paris, les six accusés, qui ont toujours protesté de leur innocence, ont fait jusqu'à trois ans de détention provisoire.

Sept autres accusés, sur un total de 17, ont été acquittés au procès de première instance à Saint-Omer en 2004.

Avant même l'annonce du verdict, le Premier ministre Dominique de Villepin a demandé au ministre de la Justice Pascal Clément "de faire des propositions pour que de tels drames ne puissent se reproduire" et réfléchir à la responsabilité des magistrats.

A l'approche du réquisitoire de l'avocat général, mercredi, et du verdict, probablement vendredi, les avocats de la défense étaient dans l'ensemble confiants.

Pour Me Jean-Louis Pelletier, avocat de l'abbé Dominique Wiel (7 ans de prison pour viols et agressions sexuelles sur mineurs), "l'avocat général ne peut pas ne pas tirer la leçon de ce qui s'est passé. Cette affaire est un scandale judiciaire auquel on ne peut mettre fin que par six acquittements".

Trois semaines de débats ont confirmé les défaillances de l'instruction, des experts et des services sociaux.

Une assistante sociale a ainsi révélé cette semaine que la première accusation de viols de l'une des fillettes du couple Lavier, rejugé à Paris, avait été recueillie par une stagiaire.

...
Avocate d'une association de défense des droits de l'enfant, l'Enfant bleu, Me Vanina Padovani, craint de son côté que l'affaire d'Outreau ne "conduise à un bond en arrière de 30 ans sur la parole de l'enfant qui est décrédibilisée".

November 25, 2005

Il a fait plusieurs grèves de la faim et tentatives de suicide

PARIS (AFP), 25 novembre 2005 - Dans le désastre de l'affaire de pédophilie d'Outreau, l'huissier Alain Marécaux a perdu son étude, sa femme et voudrait aujourd'hui "rattraper le temps" perdu avec ses enfants.

Interrogé vendredi par la cour d'assises de Paris, cet homme de 41 ans a confié que l'année 2002 aurait du être "l'année du renouveau" pour lui et son épouse, qui avait fait une tentative de suicide. Il a été arrêté avec le groupe dit des "notables" le 14 novembre 2001.

"Je me suis rendu compte que je n'avais pas vécu avec ma femme mais à côté de ma femme. J'avais peur de perdre mon épouse et mes enfants, je voulais vendre mon étude", a raconté l'huissier.

Blanchi des accusations de viols sur deux des enfants Delay, Alain Marécaux a été condamné à 18 mois de prison avec sursis pour des attouchements sexuels sur son fils cadet qu'il a toujours niés.

Ce travailleur forcené, étudiant boursier, était à la tête d'une étude qui employait huit personnes, donnait des cours de droit des affaires et s'apprêtait à commencer un DESS de criminologie "lorsque le 14 novembre 2001 est arrivé".

"J'étais un drogué du travail, j'ai pas été le papa idéal et j'étais un mari absent", a-t-il déclaré à la cour, qui examine la personnalité des six accusés rejugés à Paris.

Alain Marécaux a fait plusieurs grèves de la faim et tentatives de suicide.

Pour sa nièce Sandrine, qui a accueilli à sa sortie de prison cet homme pesant une cinquantaine de kilos et marchant avec des béquilles, "le regard qu'il a en lui n'est plus le même".

Entendu à huis clos au début du procès, le fils de l'huissier a évoqué un "malentendu" sur les intentions de son père, selon des avocats.

Le jeune garçon (13 ans), qui allait à l'école avec l'un des enfants de Delay, a confié en février 2005 à une amie de la famille, entendue vendredi, avoir "raconté des conneries" au sujet de son père.

November 22, 2005

Procès d'Outreau : réquisitoires contre la justice

PARIS (Reuters), le 21 novembre 2005 - Le procès en appel de l'affaire de pédophilie d'Outreau a tourné lundi au réquisitoire contre le système judiciaire français, mis en cause pour ses procédures arbitraires et sa brutalité par trois accusés.

"Ma vie a basculé en une fraction de seconde. D'huissier de justice, je suis devenu un affreux membre d'un réseau international qui faisait son marché aux enfants dans une cité HLM d'Outreau", a déclaré à la barre Alain Marécaux, à la dixième audience du procès.

Blanchi en première instance de toute participation à un réseau qui s'est révélé être imaginaire, il a pourtant été condamné à 18 mois de prison avec sursis pour une supposée agression sexuelle sur son fils.

Après 23 mois de détention provisoire durant l'enquête, il a dû revendre son étude d'huissier et a repris aujourd'hui un travail de clerc d'huissier. Sa condamnation l'empêche de vivre avec ses trois enfants, qu'il ne voit qu'épisodiquement.

Son épouse, elle-même incarcérée avant d'être acquittée au premier procès, l'a quittée. A ce procès en appel, l'accusation d'agression sexuelle envers son fils a été très affaiblie, un psychologue disant que l'enfant lui avait avoué l'avoir inventée.

November 19, 2005

Outreau : mea culpa

PARIS (AFP), le 18 novembre 2005, extrait - La principale accusatrice de l'affaire de pédophilie d'Outreau, Myriam Badaoui, a avoué vendredi avoir "menti" et a disculpé les six accusés rejugés par la cour d'assises de Paris, donnant le coup de grâce à une accusation déjà très chancelante.

Les trois autres condamnés définitifs du procès de première instance à Saint-Omer - l'ex-mari de Myriam Badaoui, Thierry Delay, leur ancienne voisine, Aurélie Grenon et son ex-concubin David Delplanque -, ont eux aussi mis hors de cause les accusés, cinq hommes et une femme qui ont toujours clamé leur innocence.

Avant Myriam Badaoui, la cour avait fait une plongée dans l'univers sordide des Delay avec l'audition de Thierry : l'alcool, la collection de films d'horreur, pornographiques, la valise de "gonichets" (godemichés NDLR), la cassette porno comme cadeau de Noël pour le fils de 11 ans.

"Je souhaite que ces six personnes sont innocentées, acquittées (sic). Ils ont été inculpés par mon ex-épouse. On n'était que quatre dans l'affaire", a-t-il affirmé, faisant référence à son ex-épouse ainsi qu'à Aurélie Grenon et à l'ex-concubin de celle-ci, David Delplanque.

"Ca me fait mal que ces six personnes soient dans cette cour d'assises", a ajouté M. Delay, autrefois quasi-muet mais aujourd'hui très volubile grâce à "une thérapie de groupe" en prison.

Après avoir "présenté ses excuses" aux accusés, Thierry Delay, mal rasé et en pantalon de survêtement a eu une pensée pour François Mourmand "qui lui aussi était innocent" et s'est suicidé en détention provisoire.

November 17, 2005

Fautes de frappes et copier-coller

PARIS (Reuters), 17 novembre 2005 - Jean-Luc Viaux, un expert psychologue qui avait jugé crédibles les récits des enfants d'Outreau accusant de viols plusieurs dizaines de personnes, a été mis en cause par l'avocat général jeudi à la cour d'assises de Paris.

Alors que certains enfants lui racontaient avoir assisté à quatre meurtres et avoir participé à des orgies avec des animaux dans une ferme en Belgique, cet expert désigné à l'instruction avait remis un rapport confortant les accusations.

"Aucun élément de nos examens ne permet de penser que (les enfants) inventent des faits ou cherchent à imputer des faits à des personnes non concernées", concluait le rapport de ce professeur en psychologie, expert national inscrit à la Cour de cassation, la plus haute juridiction française.

Il évoquait la "constance" et la "cohérence" des quatre enfants qu'il avait examinés.

Ceux-ci avaient mis en cause environ 70 personnes.

A la barre, à la neuvième audience du procès en appel, Jean-Luc Viaux a expliqué qu'il s'agissait d'un problème de formulation.

"Je reconnais que la phrase prête à confusion sur le plan syntaxique. (...) Ça a prêté à malentendu", a-t-il déclaré.

"Un malentendu qui a coûté trente mois de détention provisoire à Dominique Wiel", a répondu Me Blandine Lejeune.

Elle est l'avocate de l'abbé Wiel, incarcéré de novembre 2001 à juillet 2004, et condamné à sept ans de prison pour viols en première instance.

Mardi et mercredi, les trois enfants qui l'accusaient ont admis au tribunal avoir menti.

Fait rarissime en cour d'assises, l'avocat général Yves Jannier a pris à partie à l'audience l'expert psychologue.

"Si la question ne correspondait pas à vos compétences, vous pouviez peut-être le dire ! Personne ne vous interdisait de dire que vous ne pouviez pas répondre à la question (de la crédibilité des enfants-NDLR)", lui a-t-il lancé.

FAUTE DE FRAPPE ET "COPIER-COLLER"

L'expert a finalement mis en cause une confrère avec qui il a signé le rapport, Marie-Christine Gryson. Cette dernière, qui se présente comme "victimologue", a déjà été disqualifiée publiquement au premier procès, où il a été découvert qu'elle travaillait pour les parties civiles.

Sur une question de la défense, Jean-Luc Viaux a ensuite reconnu avoir recopié pour les quatre enfants expertisés les mêmes conclusions, au mot près et à la faute de frappe près. "Sont (sic) témoignage reste mesuré", lit-on dans son rapport à quatre reprises.

Dans les couloirs, l'expert, furieux, a expliqué à la presse que son travail était médiocre en raison d'une rémunération médiocre. "Quand on paie des experts aux tarifs d'une femme de ménage, on a des expertises de femme de ménage", a-t-il dit.

Les autres experts requis par le juge d'instruction Fabrice Burgaud devaient être entendus dans la journée.

Le scandale provoqué dans cette affaire par les expertises a amené le ministère de la Justice à envoyer des circulaires aux juridictions pour recommander aux juges d'exclure à l'avenir, par principe, toute expertise de "crédibilité".

Il est envisagé également de renforcer le contrôle et la formation initiale et continue des experts.

November 10, 2005

Outreau : des réserves affleurent dès 2001

PARIS (AP), 10 novembre 2005, extrait - Il semble au capitaine Wallet que les enfants interrogés ne font que reprendre et répéter les accusations véhiculées dans les médias. "J'avais au départ une affaire qui tenait entièrement la route. Les enfants parlaient de films porno, de cassettes, de godemichés". Tout sera retrouvé au domicile de Myriam B., et Thierry, De. "Tout se vérifiait".

Après novembre 2001, ça ne colle plus. De ses "réserves", il ne s'en ouvre pas au juge d'instruction Fabrice Burgaud. "Mon travail, c'était d'entendre des enfants. Ce n'est pas à moi de juger de ces choses", a-t-il répondu à l'un des avocats de la défense.

Le capitaine Wallet a conservé, tout au long de son audition, son épaisse veste de cuir, armure symbolique censée le protéger du feu roulant des questions de la défense qui n'a eu de cesse de relever les contradictions et invraisemblances de l'enquête.


PARIS (AFP) , le 10 novembre 2005, extrait - France 2 a diffusé jeudi soir les images de cette bavure. On y voit deux policiers, entourés de collègues, lancer plusieurs coups de pieds et de poings à un jeune homme qu'ils venaient d'interpeller lundi à La Courneuve, tandis que d'autres policiers n'interviennent pas.

"Je crois que personne ne peut dire que ce ne sont pas des faits anormaux, y compris eux (...) Il est manifeste qu'ils ont perdu leur sang froid", a commenté sur France 2 Eric Meillan, directeur de l'Inspection générale des services (IGS).

"Un certificat médical constatait des lésions cutanées superficielles sur le front et sur la face de son pied droit" et "aucune incapacité temporaire de travail n'a été mentionnée", selon l'Intérieur.

Frédéric Lagache, secrétaire national d'Alliance (1er syndicat de gardiens), a jugé que "ce genre d'incidents devait arriver". "Nos collègues sont fatigués, stressés", a-t-il ajouté, "ce qui n'excuse personne mais on avait prévenu".


PARIS (AFP) , le 10 novembre 2005, extrait - Le ministre de l'Intérieur a également affirmé qu'il n'accepterait "aucun débordement des forces de l'ordre", après la suspension de huit policiers de Seine-Saint-Denis pour des "coups illégitimes" sur un jeune de 19 ans, lundi.

"Chaque fois qu'il y aura quelque chose qui n'ira pas, il faut le signaler. Il faut porter plainte", a dit Nicolas Sarkozy.

October 27, 2005

Pas assez rapide

[...] Un récent sondage (1) apprend que 60 % des Français ont plutôt une mauvaise opinion du fonctionnement de la justice. Autre donnée, 89 % d’entre eux jugent qu’elle n’est pas assez rapide. Ce que partage l’USM qui soulève le manque cruel de fonctionnaires dans les juridictions. " La machine judiciaire tourne à vide avec des jugements non dactylographiés, des audiences sans greffiers ou des capacités d’enregistrement informatique trop faibles ", souligne le livre blanc. À ces déficiences s’ajoutent parfois des locaux en piteux état. " Les magistrats en ont assez de porter le chapeau des dysfonctionnements qui incombent aux pouvoirs publics depuis des années ", lance Dominique Barella, estimant que " malheureusement, les Français ont la justice que l’État leur offre ". Et ce dernier n’est pas dans sa période la plus généreuse.

(1) Enquête ISPOS-LCI-le Point du 12 janvier.

L'Humanité, 16 janvier 2004

September 22, 2005

L'expertise de crédibilité


Culture Droit, Entretien avec Liliane Daligand, extrait :

La question de la crédibilité de la victime, de l'enfant surtout, est fréquemment posée. Cela pose d'ailleurs une défiance persistante à l'égard de la victime. Rarement celle de l'accusé. Je peux comprendre qu'un juge confronté à des versions contradictoires, celle de la victime, celle de l'agresseur supposé, veuille en sortir. Mais c'est pratiquement toujours la victime qui est soumise à l'expertise dite de crédibilité et jamais l'auteur qui nie les faits. Plus surprenant encore : la question de la crédibilité figure parfois dans la mission concernant la victime, alors que l'auteur a reconnu les faits !

D'abord, dire si le sujet présente des anomalies mentales ou psychiques et, dans l'affirmative, les décrire. Puis, préciser si les troubles éventuellement constatés sont consécutifs aux faits qu'il aurait subi ou s'ils étaient préexistants. Dans cette hypothèse, il nous est alors souvent demandé de préciser si les troubles ont pu contribuer aux faits ou s'ils n'ont pas développé chez le sujet une tendance à la fabulation de nature à faire envisager son récit comme imaginaire, et préciser si le sujet paraît ou non sous influence notamment d'une personne de la famille, de nature à susciter ou à déterminer son discours. Enfin, il nous est habituellement demandé de faire toutes observations utiles sur la crédibilité qui peut être accordée aux déclarations de l'intéressée, sur son état mental actuel et sur la nécessité ou non d'envisager pour lui une psychothérapie.

Rien n'interdit au juge d'instruction de faire réaliser une expertise de crédibilité au seul vu de l'enregistrement ". Dans ce cas, l'expert pourrait même asseoir ses conclusions sur une scène filmée sans rencontre directe avec la victime. Cela me paraît inacceptable, il y a des pratiques qui sont totalement contraires à la clinique et à l'éthique !


Colloque LFSM des 1er et 2 décembre 2005 :

CENTRE CHAILLOT-GALLIERA
Paroles d’enfants : parole sacrée, sacrée parole !
La crédibilité de la parole de l’enfant.
L’après Outreau :

  • Séparation conjugale et fausses allégations

  • Interprétation du discours de l'enfant par des parents inquiets

  • Crédibilité : authenticité et mensonge

  • Le récit chez lenfant

  • L'écoute de l'enfant

  • La parole de l'enfant : passage obligé, passage vérité ?

  • Traumatisme et résilience

  • Image de la victime dans le discours de l'agresseur